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Libération
à la barre

La défense de François Pérol malmenée par le tribunal

Le parquet a requis deux ans de prison et 30 000 euros d'amende à l'encontre de l'ancien secrétaire général adjoint de l'Elysée, bombardé à la présidence de la BPCE après s'être occupé de ce dossier à la présidence de la République.
par Renaud Lecadre
publié le 3 juillet 2015 à 7h43

Le parquet de Paris a requis jeudi deux ans de prison avec sursis et 30 000 euros d'amende (1) contre François Pérol, poursuivi pour prise illégale d'intérêts après avoir accepté la présidence de la BPCE en mars 2009, lui qui avait piloté depuis son bureau de l'Elysée, dont il était le secrétaire général adjoint sous le mandat de Nicolas Sarkozy, la constitution de cette nouvelle banque. Elle est issue de la fusion entre les Banques populaires et les Caisses d'Epargne, opérée à l'époque sur fond de crise bancaire. Une affaire «régalienne, souveraine, que rien ne saurait soustraire de sa présidentialité», a résumé le parquet.

Procès politique ? Le réquisitoire du parquet a commencé par une diatribe quasi-altermondialiste : «On est passé d'une économie administrée à une économie dirigeante», entraînant une «prolifération de possibilités» carriéristes. Fort bien, mais quelle conséquence sur le procès pénal en cours ?

«Si c'est bien M. Sarkozy qui décide»

Le tribunal correctionnel peut se reposer sur le rantanplan de service, en la personne de Claude Guéant. En cours d'enquête, cet ancien homme à tout faire de Nicolas Sarkozy avait nié jusqu'à l'absurde, proclamant que l'initiative de la nomination de François Pérol proviendrait des «établissements bancaires eux-mêmes»... Convoqué la semaine dernière à témoigner à la barre du tribunal comme témoin, Guéant s'est rapproché de la vérité : «Le Président a demandé à M. Pérol de prendre cette fonction, en ne lui laissant guère le choix.» Il croyait bien faire, en soulageant son ancien collaborateur élyséen, sauf que les avocats des parties civiles (les syndicats Sud et GCT de la BPCE) ont bondit sur l'occasion : «Si c'est bien M. Sarkozy qui décide, alors M. Pérol est clairement dans la prise illégale d'intérêts.» Lequel a dû ramer par la suite : «Il ne m'a pas donné d'instructions mais a plutôt été ambivalent. Je lui ai donné une réponse positive deux jours plus tard : c'était ma décision, pas celle du Président.»

Pour le parquet, la décision de ne pas saisir la commission de déontologie «scelle l'élément intentionnel» du délit. Et de réclamer une sanction «symbolique, non pas utilitaire», comme l'illustre cette peine complémentaire d'interdiction de toute fonction publique, alors que François Pérol a depuis renoncé à son statut de fonctionnaire. Symbole, symbole. Le jugement a été mis en délibéré.

(1) Le maximum prévu par la loi, nonobstant le sursis.

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