Les usines à start-up, cure de jouvence des grands groupes
De plus en plus de grandes entreprises investissent dans des accélérateurs. Il s’agit à la fois de développer des marchés et de s’inspirer des start-up.
Par Sandrine Cassini
En ce mois de juillet, les 300 mètres carrés de Microsoft Ventures nichés dans le Sentier, le cœur du quartier historique des start-up à Paris, sont vides. La dernière promotion de jeunes pousses de l’accélérateur de start-up de l’éditeur de logiciels vient de prendre congé. A la rentrée, une dizaine de nouvelles pousses viendront envahir les bureaux aux couleurs flashy. Pour les aider à franchir le cap de la levée de fonds, Microsoft a mis les petits plats dans les grands : coaching intensif et conseils divers et variés en technique, communication ou marketing.
Evangéliser et coacher
Dans le monde, Microsoft a déjà coaché 300 start-up. Comme BNP Paribas, Orange, SAP et beaucoup d’autres, l’éditeur de logiciels a monté ses usines à start-up, finançant des développements parfois en pure perte. Pourquoi ? Souvent les motivations sont différentes. Pour Orange, qui possède dans le monde dix Orange Fab et fournit à chaque promotion de cinq à six start-up de l’expertise et l’accès à de nouveaux clients, il s’agit de développer de nouveaux marchés. « Cela nous permet de tester des briques technologiques et cela nous aide à créer des écosystèmes », explique Mari-Noëlle Jégo-Laveissière, directrice de l’innovation. Orange a monté des offres communes avec AfriMarket, une solution de transfert d’argent vers l’Afrique, et répondu à des appels d’offres avec MyBee, un porte-monnaie électronique. En tout, 105 start-up sont déjà passées dans ses incubateurs.
Pour Microsoft, il s’agit d’évangéliser les jeunes pousses avec ses technologies. Microsoft offre à ses start-up « 500.000 euros de services cloud, de quoi tenir trois ans », dit Roxanne Varza, en charge des lieux. Une offre attractive qui pousse la start-up à opter pour Microsoft Azure, le cloud de l’éditeur. « Si, demain, une des start-up repart avec un bout de technologie Microsoft et devient Criteo, c’est bien », explique Roxanne Varza.
Inspirations
Dans un univers qui change à toute vitesse, penser autrement est également au cœur des préoccupatons. Air Liquide n’a pas opté pour un incubateur à start-up – il préfère prendre des participations directes –, mais a ouvert près de Bastille, à Paris, un iLab où se croisent équipes de R&D, cadres et experts en tout genre. L’idée : imaginer les concepts de demain, en brisant les carcans de l’interne. « On ne peut faire de l’innovation en se regardant soi-même. Là on innove par le regard des autres, de manière disruptive », explique Pierre-Etienne Franc, son directeur des technologies.
Pour s’inspirer de la culture des jeunes pousses, Orange va emménager sur un même campus ses propres équipes innovation et les start-up d’Orange Fab. « On peut avoir des relations informelles, cela permet d’aller poser des questions », dit sa directrice de l’innovation. Au Numa à Paris, entièrement dédié aux start-up et financé notamment par BNP Paribas, Orange, la SNCF et Cisco, on confirme cette volonté de changement de « l’ancienne économie ». « Les entreprises viennent chercher une nouvelle culture, une nouvelle manière de travailler. En interne, les blocages sont souvent trop importants », dit la directrice du Numa, Marie-Vorgan Le Barzic.
Sandrine Cassini