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Cataracte : un collyre pour remplacer la chirurgie ?

Une équipe sino-américaine a testé sur le lapin et le chien une protéine qui a réduit l’opacité engendrée par la dégénérescence du cristallin. Les essais sur l’homme n’ont pas débuté.

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Publié le 22 juillet 2015 à 20h19, modifié le 23 juillet 2015 à 09h53

Temps de Lecture 3 min.

Oeil d'un chien atteint de cataracte avant (à gauche) et après traitement par un collyre à base de lanostérol : l'opacification du cristallin est réduite.

A l’avenir, le traitement de la cataracte pourrait ne plus être réduit à la seule chirurgie. C’est l’éventualité que fait apparaître une étude de chercheurs chinois et américains, publiée mercredi 22 juillet par la revue Nature. Grâce à un collyre à base de lanostérol, une substance produite naturellement par l’œil, ils ont fait régresser l’opacité du cristallin, la lentille qui transmet la lumière dans notre œil et la focalise sur la rétine, chez des chiens qui développent naturellement une cataracte. La molécule n’a pas encore été testée chez l’homme.

La cataracte touche une personne sur cinq à partir de 65 ans, une sur trois chez les plus de 75 ans et près de deux sur trois après 85 ans. Affectant des dizaines de millions de personnes dans le monde, elle est responsable de plus de la moitié des cécités. L’opacification du cristallin se traduit par une diminution de l’acuité visuelle, une altération de la vision des couleurs, perçues comme plus ternes qu’elles ne le sont, des couleurs vives qui éblouissent, une sensation de brouillard permanent devant les yeux…

Un cristallin pour la vie

Les cellules formant le cristallin se multiplient au cours de la vie embryonnaire. Elles cessent pratiquement de proliférer passé 20 ans et perdent leurs noyaux au cours de leur évolution. Nous vivons donc le reste de notre vie avec un cristallin qui n’est plus renouvelé. Il est formé de lames concentriques, comme un oignon. Les cellules produisent en grande quantité des protéines, les cristallines, qui forment une sorte de gel. Ces protéines contribuent à la transparence du cristallin. Mais, lorsqu’elles s’accumulent sous forme d’agrégats insolubles, le cristallin s’opacifie.

Dans la très grande majorité des cas, cette opacification accompagne le vieillissement, mais il existe des formes héréditaires, liées à des mutations génétiques. L’équipe sino-américaine dirigée par Kang Zhang (université de Californie à San Diego) a ainsi identifié deux mutations différentes d’un gène dit « LSS », chez deux familles très affectées par des cataractes congénitales. Ce gène gouverne la synthèse d’une enzyme, qui catalyse la production du lanostérol.

Accroissement de la transparence

L’étude des chercheurs chinois et américains démontre que le lanostérol est capable de dissoudre les structures protéiques anormales au sein de cellules du cristallin. Allant plus loin, ils ont évalué son aptitude à s’opposer au lent processus de dénaturation des cristallines et de formation d’agrégats comme on le constate au cours de la cataracte liée à l’âge.

Pour cela, ils ont mis au point un collyre à base de lanostérol et l’ont utilisé, d’une part, in vitro sur des cristallins de lapins atteints de cataracte et, d’autre part, in vivo chez des chiens ayant, eux aussi, spontanément développé une cataracte. Les cristallins de lapins traités présentaient une augmentation significative de leur transparence. L’instillation du collyre chez des chiens adultes de plusieurs races, exempts de la mutation du gène LSS, a montré, là encore, une diminution de la sévérité de la cataracte et un accroissement de la clarté du cristallin.

Ces résultats ouvrent la perspective d’une alternative entre la chirurgie, actuellement le seul traitement disponible, et une approche pharmacologique de cette maladie invalidante.

Chirurgie avec des ultrasons ou du collyre ?

Indolore, la chirurgie consiste en l’ablation du cristallin et son remplacement par un implant. L’intervention, sous anesthésie locale la plupart du temps, dure entre dix et trente minutes. La technique la plus moderne consiste à réaliser une incision de 3 mm dans la cornée. Une petite sonde à ultrasons est introduite pour fragmenter le cristallin opacifié dont les morceaux sont aspirés. L’implant est mis en place par le même orifice. Dans le cas où la cataracte est bilatérale, l’intervention est pratiquée successivement sur les deux yeux en respectant un intervalle de quelques mois.

Néanmoins, les techniques les plus modernes ne sont pas accessibles partout, et cette chirurgie reste soumise au risque infectieux (de l’ordre d’un cas de complications infectieuses pour plusieurs milliers d’interventions). Surtout, comme le fait remarquer Fielding Hejtmancik (National Eye Institute, Rockville Maryland) dans un article de commentaire paraissant dans le même numéro de Nature, le vieillissement de la population mondiale devrait « nécessiter un doublement du recours à la chirurgie de la cataracte au cours de vingt prochaines années. Les mêmes données démographiques sur la population suggèrent que si le développement de cataractes liées à l’âge chez les individus sensibles pouvait être différé de jusqu’à dix ans, les besoins en chirurgie pourraient pratiquement être réduits de moitié ».

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L’application de gouttes oculaires pour les personnes chez lesquelles les premiers signes de cataracte ont été dépistés, avant toute expression symptomatique, aurait l’avantage de la simplicité. Restent à pratiquer les indispensables essais chez l’homme pour établir l’innocuité et l’efficacité de cette approche novatrice.

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