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LégislativesDes élections en Haïti dans l'indifférence des citoyens

Portraits de candidats et affiches aux couleurs des partis sur les murs de Port-au-Prince.

Le 9 août 2015, les Haïtiens sont appelés aux urnes pour renouveler l'ensemble de leurs députés et deux tiers des sénateurs. Ce premier tour des élections législatives sera le point de départ d'un véritable marathon électoral. Pour l'heure, les citoyens ne montrent que très peu d'intérêt pour les scrutins.

Portraits de candidats et affiches aux couleurs des partis ont tardivement envahi l'espace public, y compris à Port-au-Prince. Devant un poteau électrique entièrement recouvert des photos de divers candidats aux postes de député et sénateur, Luckson reste totalement indifférent.

«Lui, je le connais, mais il ne fera rien pour moi. Elle, je n'ai jamais vu sa tête», témoigne le cireur de chaussures en passant en revue les portraits qui décorent désormais son angle de rue. Brièvement, les commerçants voisins et leurs clients devisent sur l'identité des candidats, se disputent sur le passé de ces prétendants aux postes parlementaires.

Tous sont d'accord sur un point: ils n'iront pas voter dimanche, «car cela ne sert à rien».

Dans un pays où la politique est perçue comme un milieu gangréné par le clientélisme et la corruption, la grande majorité des citoyens pauvres ne croient pas au pouvoir de leur vote.

Aux dernières élections qu'Haïti a connu - le deuxième tour du scrutin présidentiel en 2011 - moins d'un quart des citoyens s'étaient exprimés. Pour le renouvellement ce dimanche de l'intégralité des postes de députés et des deux tiers du Sénat, les estimations prévoient un taux de participation avoisinant seulement les 15%.

Une campagne faible

La communauté internationale, qui offre un soutien financier et logistique pour la tenue de ces élections, s'inquiète de l'indifférence des citoyens haïtiens menaçant le succès des scrutins.

Sandra Honoré, chef de la mission de l'ONU en Haïti, a lancé mardi un appel pour motiver les électeurs à se rendre aux urnes. «Votre participation en nombre et votre décision de faire une croix sur la violence est l'occasion pour vous de démontrer que vous choisissez définitivement la paix et la démocratie», a annoncé en créole la diplomate onusienne dans son message vidéo posté sur internet.

A son lancement, en mars, le processus électoral avait été marqué par une avalanche de candidatures: plus de 1800 candidats sont en lice pour les 129 postes parlementaires à pourvoir. Un engouement absent à quelques jours du vote.

«L'intensité de la campagne a été plutôt faible», affirme José Antonio de Gabriel, chef adjoint de la mission d'observation électorale de l'Union européenne. «On ne voit pas une forte mobilisation des candidats et des partis.»

Trois scrutins d'ici 2016

La longueur du processus électoral permet d'expliquer cette absence de réunions publiques et de mobilisation des citoyens. Députés, sénateurs, maires, élus locaux et président de la République: d'ici décembre, Haïti va renouveler la quasi totalité de son paysage politique.

Dimanche n'est que la première des trois journées de vote que le pays va organiser d'ici la fin de l'année. «Les Haïtiens ont devant eux un long processus électoral avec trois scrutins, ce qui n'est pas toujours facile pour les finances des partis», reconnaît José Antonio de Gabriel.

Mais au-delà des affiches placardées sur les murs, nombre de partis n'ont pas de projet politique à présenter aux électeurs. «On voit en Haïti que les législatives ont une forte composante locale: il serait bon pour les candidats de bien présenter des programmes structurés et d'être favorables au débat des idées. Pour le moment, nous voyons très peu cela», regrette le chef adjoint de la mission d'observation électorale de l'UE.

Luckson, qui travaille six jours par semaine pour gagner de quoi nourrir sa famille, rit à l'idée de voter en fonction des programmes des candidats. «C'est un truc pour les étrangers, ça! Les candidats, ça promet toujours beaucoup mais à la fin, nous les pauvres, on a rien. Y'a que leurs familles et leurs amis qui y gagnent.»

ats