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Elites et numérique : la grande déconnexion française

L'affaire des taxis l'a montré : le gouvernement oscille entre sa volonté de ménager les professions réticentes au basculement numérique et son souci de favoriser l'éclosion d'un écosystème français. Du côté de l'opposition, le désintérêt pour le sujet est souverain.

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Publié le 13 août 2015 à 01:01Mis à jour le 6 août 2019 à 00:00

Il aura fallu deux mois au pourtant « connecté » ministre Macron, questionné sur le décalage entre l'appel à la conquête du secteur numérique français et la poursuite des interpellations de chauffeurs Heetch, pour relancer une concertation sur l'évolution du métier de taxi. Tout un symbole du retard à l'allumage pour poser les jalons de l'indispensable modernisation du secteur du transport individuel de personnes, devenu le miroir des effets des nouvelles technologies et de leurs applications commerciales.

Cette prise en compte tardive ne suffira pas à effacer les cicatrices d'une année qui aura signé la déconnexion complète de nos élites politiques de la révolution technologique en marche.

Sur tous les sujets, ils ont hésité, tâtonné et, au final, n'ont fait que des déçus. A vouloir ménager les plus réticents à ce basculement tout en favorisant l'éclosion d'un écosystème numérique français, ils n'ont satisfait ni les uns ni les autres. Certes, le gouvernement a pris des airs de grande agence de communication, multipliant les discours, les colloques, les interviews pour promouvoir l'industrie numérique française avec les initiatives French Tech et en valorisant, à raison, les figures montantes du secteur. Mais la communication n'a jamais fait une politique. L'opposition ne fait guère mieux, variant sur le sujet et selon les personnalités entre un désintérêt souverain et une prudence teintée de méfiance envers cette économie que l'Etat ne peut contrôler.

Au final, le cadre régulatoire et, surtout, le débat public qui l'accompagne restent totalement inadaptés. Sur le plan fiscal, trois ans après le mouvement des « pigeons », avons-nous mis fin à l'exil des jeunes talents ? Sur le plan social, peut-on promettre le plein-emploi en refusant tout sauf le contrat temps plein à durée indéterminée ? Sur le plan de l'attractivité, est-on certain que la France attire des financements suffisants ?

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Trois milliards et demi d'euros ont été levés par des start-up en Europe au deuxième trimestre 2015. Un milliard est allé au Royaume-Uni, 600 millions en Suède, 550 millions en Israël, 500 millions en Allemagne et... seulement 100 petits millions en France. Dans la même veine, le groupe Compass vient de noter les principaux hubs technologiques mondiaux. Loin des rodomontades la présentant comme la capitale européenne du numérique, Paris ne se classe qu'au 11e rang, derrière Berlin (9e) et Londres (6e), notamment grâce à son marché intérieur. La croissance y est la plus faible des vingt-cinq cités notées, à l'exception de Moscou.

Vouloir mettre à jour le modèle français, ce n'est surtout pas être candide face à la nouvelle économie mais avant tout mener un nécessaire travail de projection. Aux Etats-Unis, Uber et le futur du travail sont devenus le point nodal de la prochaine campagne présidentielle, là où se joue le débat entre républicains et démocrates, qui débattent de la responsabilité des employeurs et des vertus de la technologie. Quand Jeb Bush vante Uber comme un tremplin pour le rêve américain, Hillary Clinton interroge la sécurité financière de ce type de travail. Marco Rubio proteste contre la législation anti-Uber de Miami quand Martin O'Malley veut plus de droits portatifs pour les chauffeurs d'Uber.

Les politiques préparent souvent leur rentrée pendant l'été. Voici donc d'excellents devoirs de vacances pour 2015. Pour la rentrée du gouvernement comme de l'opposition, ce travail sera plus utile que les habituels coups de menton et polémiques stériles. Sur le sujet, nous sommes convaincus que les Français sont prêts et surtout capables de réussir dans cette nouvelle économie. Ils attendent de leurs responsables politiques une vision claire pour faire cohabiter cette nouvelle économie et un modèle protecteur auquel ils aspirent légitimement.

Jonas Haddad, avocat, est délégué national des Jeunes Républicains Robin Rivaton, économiste, est membre du conseil scientifique de la Fondapol

Jonas Haddad et Robin Rivaton

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