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Économie

Crise du porc, pourquoi on marche sur la tête

EDITO Qui aura le courage de dire que la France n'a plus d'avenir dans l'élevage intensif qui maltraite les animaux et nourrit mal les hommes? Le consommateur doit prendre ses responsabilités en choisissant des produits français de qualité.
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Porc
(Photo d'illustration)
FRED TANNEAU / AFP

Les chaînes d’information passent en boucle des images d’élevages porcins français depuis plusieurs jours. Pas facile d'illustrer le désespoir des producteurs, les charges qui ne cessent d’augmenter et les tarifs en baisse. Impossible de montrer le célèbre cadran de Plérin fermé depuis deux séances en raison du retrait de gros acheteurs (dont Cooperl, le premier transformateur de viande porcine en France) qui refusent d’appliquer le tarif minimal de 1,40 euro le kg, expliquant qu’il ne correspond pas à la réalité économique du marché, soumis à une concurrence acharnée de nos voisins européens et déstabilisé par l’embargo russe.

Du coup, nous avons droit à ces images de cochons pathétiques sur leurs caillebotis en plastique et redécouvrons avec effroi dans quelles conditions indignes nous élevons cet animal pourtant si proche de l’homme. Les éleveurs ne paraissent pas s’en rendre compte, eux qui (hormis quelques rares exceptions) ne prennent même plus la peine de donner un peu de paille fraiche à leurs animaux, condamnés aux sols modernes et glissants permettant une parfaite évacuation des déjections dans leurs minuscules enclos où ils ne peuvent bouger. Inutile de rappeler les traitements imposés aux truies, la castration des mâles sans anesthésie, les porcelets dont on coupe la queue et meule les dents à vif… Mais notons au passage que la loi française vient de préciser le statut des animaux en leur reconnaissant le statut d'"êtres vivants doués de sensibilité".

Il faut manger du bon cochon!

La parenthèse sur le bien-être animal peut paraître indécente au moment où les éleveurs sont confrontés à des difficultés financières exceptionnelles et alors que de nombreuses familles vont peiner à acheter des cartables pour la rentrée, mais c’est un argument fort pour convaincre les consommateurs qu’ils doivent changer d’habitude et payer leur jambon plus cher. Le consommateur qui, en d'autres circonstances, a su bouder les lasagnes ou ralentir sa consommation de viande de bœuf du jour au lendemain, a un réel pouvoir pour changer le paradigme. Il faut manger du bon cochon et tirer la filière vers le haut par nos achats.

Plus grave encore, les conditions d’élevages inhumaines apportent de l’eau au moulin des militants végétariens de plus en plus nombreux et écoutés. Quand plus personne ne mangera de viande, le problème de l’élevage ne se posera plus!

En attendant, le cochon français, passé ou non par le marché de Plérin mais vendu 1,40 le kilo et qui finira en tranches de jambon sous blister dans la grande distribution, ne voit jamais le soleil et ne foule jamais l’herbe des prairies. Alors que le projet de ferme des 1.000 vaches a suscité une levée de boucliers assez large, tant il paraissait caricatural d’une agriculture bêtement intensive, les fermes de 1.000, 3.000, 4.000 cochons sont aujourd’hui une réalité.

Environnement : un Amoco Cadiz vert et silencieux en Bretagne

Car la seule réponse que l’on a trouvé à ce jour pour corriger les effets de la baisse des prix c’est de décréter un tarif minimum obligatoire, en espérant que les industriels voudront bien l’appliquer, et d’agrandir les élevages, en s’inspirant du modèle allemand, pourtant bien loin d’être meilleur avec ses fermes usines devenues gigantesques.

Il ne faut pourtant pas être un grand économiste pour savoir qu’accroître la production d’un produit dont le prix est déjà très bas, va contribuer à le faire baisser encore plus. La course à la taille n’apporte aucune solution mais contribue largement à dégrader l’environnement. Il y a longtemps déjà que l’on ne boit plus d’eau du robinet dans plusieurs départements bretons, et les gaz de schiste n’y sont pour rien. Cette région est gravement polluée par les lisiers de ses élevages porcins comme le prouve la prolifération des algues vertes sur le littoral. C’est un nouvel Amoco Cadiz vert et silencieux, provoqué par de mauvaises décisions. Inutile d’étendre les dégâts aux régions voisines.

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