Brexit : des milliers de travailleurs demandent la nationalité britannique
Selon des témoignages recueillis par The Guardian, des milliers de citoyens européens travaillant au Royaume-Uni demandent la nationalité britannique par crainte des complications provoquées par une éventuelle sortie de l’Union européenne du pays.
Par Étienne Combier
« Tout le monde parle d’un Brexit en termes macroéconomiques ou politiques ; personne ne considère ce qu’il pourrait signifier au niveau personnel pour tant de personnes. » Les mots de Stéphanie Zihms, une post-doctorante allemande travaillant au Royaume-Uni, résument le sentiment de milliers de travailleurs issus de l’Union européenne (UE) vivant au Royaume-Uni. Selon des témoignages recueillis par « The Guardian », la peur d’une sortie de l’UE du Royaume-Uni après le référendum prévu en mars 2016 poussent des Européens établis dans le pays à demander une nationalité dont ils n’avaient auparavant pas besoin.
Le Brexit, contraction de Britain et exit (sortie, en anglais) est en effet dans toutes les têtes après la réélection massive des conservateurs en mai dernier. Comme il s’y était engagé, le Premier ministre David Cameron a fixé la date du référendum pour trancher si le Royaume-Uni veut vivre à l’intérieur de l’UE ou en dehors.
2,4 millions de citoyens européens affectés
En cas de Brexit, 2,4 millions de citoyens européens travaillant au Royaume-Uni et près de 2 millions de Britanniques travaillant sur le continent seraient touchés. Une sortie impliquerait de fait l’annulation de décennies de régulations et de législations. Même si les ajustements pourraient prendre des années, des milliers de citoyens européens ne veulent pas prendre le risque d’être touchés.
Les conséquences d’un Brexit pour les travailleurs seraient importantes : retour du permis de travail, fin des arrangements en matière médicale, fin des traitements facilités des retraites perçues dans d’autres pays de l’UE ou encore des transferts d’argent plus coûteux sont craints. Au cœur de cette peur, l’exemple des travailleurs non-européens. « Je vois ce qui se passe pour des collègues venant d’Inde ou de pays non-européens. Les problèmes sans fins qu’ils ont à obtenir et renouveler leur visa de travailleur qualifié... Je ne voudrais pas que ça puisse nous arriver », s’inquiète Fabrizio Fazzini, un ingénieur sicilien travaillant à Bristol.
Un processus coûteux
Selon l’enquête en ligne menée par « The Guardian », une large majorité des 1.200 citoyens européens ayant participé « sont en train de changer de nationalité ou réfléchissent à le faire. » Mais ce processus reste coûteux. A titre d’exemple, le quotidien indique que l’acquisition de la nationalité britannique pour Fabrizio Fazzini, sa femme et ses deux enfants devrait lui coûter 3.500 livres sterling (4.930 euros). Un investissement important.
En plus des citoyens européens, le Brexit affectera également des citoyens britanniques travaillant dans l’Union européenne. Une fonctionnaire retraitée vivant en France indique ainsi que son adhésion à la Sécurité sociale est « dépendante, selon des accords européens, du fait que je reçoive ma pension de l’Etat britannique. Si le Royaume-Uni devait quitter l’UE, il devra négocier des accords réciproques avec la France et d’autres pays européens à propos de la couverture médicale des citoyens britanniques ». Ainsi, comme les travailleurs européens, les Britanniques commencent à demander la nationalité du pays où ils résident, certains par exemple utilisant leurs ancêtres irlandais pour obtenir le passeport de ce pays. Si un Brexit devait vraiment avoir lieu, ils pourraient n’être que les premiers.
Etienne Combier