Le volvan Cotopaxi, en Equateur dégage une colonne de cendres, le 17 août 2015

Une colonne de cendres se dégageant du volcan Cotopaxi, en Equateur, le 17 août 2015

afp.com/MATEO BUENDIA

La nouvelle a au moins le mérite d'être clairement annoncée: "Afin de garantir la sécurité des citoyens, la censure préalable est décrétée concernant l'information sur le processus éruptif du volcan Cotopaxi émise par les médias de communication", énonce en Equateur un décret instaurant l'état d'exception. Un décret qui survient à un moment où le président socialiste Rafael Correaaffronte un vaste mouvement de protestation.

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Situé à 45 km au sud de Quito, la capitale, le volcan culmine à 5897 mètres d'altitude et est considéré comme l'un des plus dangereux du monde. Il est secoué depuis vendredi par de nombreuses explosions, dégageant d'imposantes colonnes de cendres ainsi que des fragments solides et incandescents. La réaction du gouvernement? "D'abord, évacuer 505 habitants des localités voisines. Puis, contrôler l'information pour éviter une possible panique collective". "Dans ces cas-là, l'information est très importante", a déclaré Rafael Correa, pour justifier sa censure. Le président entend mettre en garde contre le risque "de créer des rumeurs", qui lancées sur Twitter, pourrait "provoquer la panique".

Les Equatoriens "ne pourront s'informer que par les bulletins officiels"

L'état d'exception sera en vigueur pour 60 jours, au maximum. Durant cette période, les Equatoriens "ne pourront s'informer que par les bulletins officiels émis sur le sujet par le ministère coordinateur de la sécurité, avec l'interdiction de diffusion de toute information non autorisée par un média de communication, qu'il soit public ou privé, ou via les réseaux sociaux". Cette mesure a évidemment crispé les médias équatoriens, déjà régulièrement critiqués par Correa pour leurs liens supposés avec l'opposition. En 2013 ce dernier, qui n'est pas un grand ami de la liberté de la presse, avait déjà proposé de supprimer les journaux imprimés.

"Le président argue que c'est pour éviter la panique avec des informations alarmistes. On part du principe que les journalistes et les citoyens sont alarmistes, il y a ce préjugé implicite", a critiqué Diego Cornejo, le directeur de l'Association équatorienne d'éditeurs de journaux (Aedep). Pour ce journaliste, cette censure est "disproportionnée et inopportune", car elle arrive justement "dans un moment de mobilisation sociale".

Le ministre de la Communication Fernando Alvarado a assuré que les médias pourraient réaliser leur travail en couvrant l'éruption. Mais ils devront le faire avec "énormément de responsabilité et d'attention pour que leurs histoires, leurs reportages, leurs photographies ne s'écartent en aucun cas du message officiel clair sur la dangerosité, la prévention, la tranquillité de la population".

Le président veut modifier la Constitution pour être réélu

Sa coïncidence avec les protestations menées par l'opposition et des groupes indigènes a en effet de quoi surprendre. Jeudi dernier, une grande journée d'action contre le gouvernement s'est soldée par 67 policiers blessés et 47 manifestants arrêtés, au terme de violents affrontements avec les forces de l'ordre. Ce mouvement, qui a bloqué de nombreuses routes du pays, visait à dénoncer la méthode de gouvernement de Correa, que ses opposants qualifient d'autoritaire, alors que président veut modifier la Constitution pour briguer un quatrième mandat.

Une inconnue demeure jusqu'ici: les autorités n'ont pas spécifié les sanctions en cas de non-respect de la censure.

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