Prix de l'énergie : la chute inexorable du pétrole et du charbon
•Le prix du charbon est au plus bas depuis douze ans.•Celui du pétrole pourrait s'enfoncer sous les 40 dollars.
Par Pierrick Fay
Les énergies fossiles seraient-elles en train de plonger dans l'ère glaciaire ? Alors que le prix du charbon est au plus bas depuis douze ans, celui du baril de pétrole se rapproche de son plus bas depuis mars 2009, après avoir perdu près de 30 % depuis son pic de juin. Mercredi soir, le baril de WTI a plongé de 1,82 dollar en une seule séance, à 40,80 dollars. La raison ? Une hausse surprise des stocks de pétrole aux Etats-Unis, qui confirme que sa production d'or noir a bien mieux résisté que prévu à la chute des cours. Par ailleurs, les pays de l'Opep laissent leurs vannes grandes ouvertes. L'Arabie saoudite a ainsi exporté, en juin, 430.000 barils de plus chaque jour (pour une production de 7,365 millions), « ce qui indique que le pays continue de suivre sa stratégie de défense de ses parts de marché. Les prix du pétrole n'ont pas fini de fléchir », parie Commerzbank. « C'est le coeur du problème, martèle la Société Générale, l'offre de pétrole est trop importante. La production de l'Opep a augmenté de 1,6 million de barils par jour depuis novembre, poussée par l'Arabie saoudite et l'Irak. » Et le prochain retour progressif de l'Iran sur le marché n'augure rien de bon pour les prix.
Dans le même temps, rappelle la Société Générale, « la demande reste faible pour des raisons saisonnières ». C'est en effet la fin de la « driving season » aux Etats-Unis (la consommation de carburant augmente en période de vacances) alors que l'on entre dans la phase de maintenance des raffineries. En outre les craintes sur l'économie chinoise pèsent sur la tendance. La Société Générale a donc revu à la baisse de 7,50 dollars ses prévisions pour le brent (à 57,50 dollars à la fin 2015) et le WTI (à 52,50 dollars). Les analystes de Citi sont encore plus pessimistes. Ils craignent, si cet excès d'offre persiste, que le prix du baril WTI tombe à 32 dollars, soit le niveau atteint lors de la crise de 2008-2009. Les stocks américains, 456 millions de barils, sont ainsi excédentaires de 100 millions de barils par rapport à la moyenne des cinq dernières années...
Conversion aux énergies renouvelables de la Chine
Le constat est encore plus alarmiste pour le prix du charbon, en chute libre depuis sept ans. Le prix de référence européen du charbon pour l'année à venir a perdu près de 75 % depuis son pic de 2008. Principal coup dur pour le charbon, l'effritement de la demande chinoise, mais aussi indienne. Le ralentissement économique n'est pas seul en cause, puisque la Chine a aussi décidé de prendre en main son problème de pollution et progresse dans sa politique de développement des énergies renouvelables. Ce mouvement pèse mécaniquement sur le cours du charbon, dont la Chine est le premier importateur mondial. La Société Générale l'atteste : « Les importations chinoises de charbon ont diminué en 2014 pour la première fois en trois ans. Et la tendance se confirme en 2015. »
En parallèle, l'offre reste largement excédentaire sous l'effet de l'incroyable volume d'investissements qui a marqué la première décennie du XXIe siècle. Deutsche Bank prévoit un surplus d'offre de 10 millions de tonnes sur le marché maritime en 2015. La production en Australie comme en Russie ne réduit pas. Les exportations australiennes ont atteint 98 millions de tonnes au premier semestre (+3,8 % en un an). Les cours sont aussi très sensibles à l'environnement macroéconomique, à la chute des prix du pétrole et à la force du dollar.
Selon la Société Générale, si « les prix du charbon sont trop faibles pour refléter convenablement la balance de l'offre et de la demande », ils devraient « demeurer à leur plus bas niveau », le marché « ne devant redevenir favorable qu'à partir de 2017-2018 ».
Pierrick Fay Laura Le Saux