Startup : des valorisations excessives ?

La Tribune publie chaque jour des extraits issus des analyses diffusées sur Xerfi Canal. Aujourd'hui, des valorisations excessives pour les startups ?
Xerfi Canal présente l'analyse d'Aurélien Duthoit, directeur des synthèses, Precepta

Comment expliquer les niveaux de valorisation jamais atteints par les start-up du web ? Nombre de jeunes pousses, à l'occasion de levées de fonds ou d'introduction en Bourse, atteignent des valorisations dépassant le milliard d'euros avec des chiffres d'affaires nuls ou négligeables et des dizaines ou centaines de millions d'euros de pertes. Il n'est ici pas question de savoir si une bulle est en train de se former ou non, mais de comprendre les motifs stratégiques qui justifient la confiance des investisseurs.

Deux modèles en particulier concentrent l'essentiel des valorisations

Le premier modèle est celui des services à forte audience, comme tous les dispositifs de réseaux sociaux, avec en point de mire une monétisation publicitaire probable. C'est le modèle de Whatsapp, acquis par Facebook pour 19 milliards de dollars avec zéro chiffre d'affaires.

Le deuxième modèle est celui des services de mise en relation financés par des commissions sur les transactions et des frais. C'est le cas de Blablacar, l'une des start-up françaises et européennes les mieux valorisées.

Un troisième modèle, celui des géants logiciels comme Microsoft ou Oracle, reste lui aussi très prisé, mais son existence remonte aux années 80 et 90.

Les raisons de la valorisation

  • Première raison à ces niveaux de valorisation, le caractère concentré des marchés sur lesquels ces sociétés opèrent. Parce que ces services s'appuient sur des effets de réseau puissants donnant un avantage maximal aux opérateurs disposant de la communauté la plus importante, ils ont vocation à devenir de quasi-monopoles sur leurs marchés pertinents, avec tout ce que ça implique en termes de rentabilité potentielle.
  • Deuxième raison, ces sociétés opèrent largement à coûts fixes. Une fois le point d'équilibre éteint, et il est souvent élevé au vu du caractère intensif en technologies des services proposés, les volumes d'activité vont nourrir des niveaux de rendement très élevés. Les marges de certaines sociétés technologiques, parfois supérieures à celles des champions du luxe, ne disent pas autre chose.
  • Troisième raison, les coûts de l'infrastructure matérielle qui permettent ces services innovants sont, à capacité égale, structurellement sur le déclin. C'est l'une des conséquences de la fameuse Loi de Moore sur les progrès exponentiels des semi-conducteurs. Pensez par exemple à Amazon et ses services de cloud computing, lancés en 2006 dans une incompréhension assez générale. Près de dix ans plus tard et probablement de lourdes pertes, ils génèrent aujourd'hui 15% de marge opérationnelle et sont l'activité la plus dynamique du géant de l'e-commerce.
  • Quatrième raison, ces niveaux de valorisation sont largement alimentés par la perspective d'un rachat dans une logique stratégique, par un géant du web par exemple, ou dans une logique financière, par des investisseurs privés. Or, le coût du capital n'a peut-être jamais été aussi durablement bas dans les pays développés, et les réserves de cash des géants du web et du logiciel n'ont jamais été aussi conséquentes. Rappelons qu'Apple, Microsoft, Cisco, Google et Oracle disposent d'un trésor de guerre cumulé supérieur à 430 milliards de dollars.
  • Dernière raison enfin, la peur chez les opérateurs bien en place de rater une opportunité majeure. L'histoire des plus grands groupes de technologie est jalonnée d'anecdotes d'investisseurs sceptiques ou de grands groupes n'ayant pas cru en une startup devenue Goliath des années plus tard. Nombre d'entreprises pensent aujourd'hui le problème à l'envers et ne raisonnent plus en termes de retour sur investissement potentiel, mais en termes de pertes acceptables, et sont à ce titre disposé à investir massivement pour ne pas rater la prochaine vague qui, peut-être, les submergera.

>> Plus de vidéos sur le site Xerfi Canal, le médiateur du monde économique

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