La FNSEA est en passe de réussir son coup. Son appel à un grand rassemblement national ce 3 septembre à Paris est couronné de succès, avec plus de 1000 tracteurs qui vont changer pour une journée le visage de la capitale, rappelant à la France la détresse du monde paysan. Les revendications du syndicat qui a réuni 55,5% des suffrages aux dernières élections professionnelles: trois milliards d'euros pour "relancer la compétitivité de l'agriculture française", un moratoire d'un an sur de nouvelles normes et réglementations, une révision de la fiscalité pour faire face aux années de mauvaises récoltes. L'analyse de Laurent Pinatel, porte-parole de la Confédération paysanne (19,6% aux dernières élections) qui conteste les choix de la FNSEA pour une agriculture toujours plus productive.

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Quelle est votre position par rapport à cette journée de mobilisation?

Si autant de monde est venu, ce n'est pas seulement parce que la FNSEA a une excellente capacité d'organisation. Il y a un profond désarroi chez les agriculteurs, qui n'ont plus aucune vision de leur avenir. C'est pour cela qu'ils sont montés à la capitale, là où les décisions se prennent. Ce qui m'ennuie c'est qu'ils espèrent y trouver des solutions, alors qu'avec cette manif ils ne font qu'organiser leur propre mort.

Pourquoi n'y aurait-il pas de solution pour eux?

Pendant que la FNSEA a mobilisé les agriculteurs à Paris, son président Xavier Beulin fait la tournée des popotes pour obtenir ce qu'il veut. Il passe au Sénat, à l'Assemblée, chez Manuel Valls, qui devrait faire des annonces en début d'après-midi. Mais la modernisation selon la FNSEA, cela consiste à faire grandir les fermes pour les rendre plus compétitives. La première économie d'échelle sur une ferme, c'est l'emploi! On ne leur a pas dit qu'il n'y aurait pas de place pour tout le monde avec une agriculture industrialisée.

Moderniser les fermes, cela reste pourtant nécessaire?

Oui, on doit moderniser mais en favorisant les fermes de taille moyenne. Ce qui est néfaste, c'est une sur-modernisation, un surinvestissement. Il faut arrêter de chercher à conquérir des marchés à l'export qui ne sont pas intéressants. Il faut arrêter de produire du lait qu'on ne vend pas, du porc qu'on ne vend pas. L'export rémunérateur de produits AOC, c'est bien, mais vendre des produits de base au plus bas prix, c'est une impasse. Il faudrait avoir le courage politique d'affronter cette réalité pour rééquilibrer la PAC. A l'échelle européenne au moins, cela pourrait fonctionner.

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