L'Airbnb des migrants croule sous les offres d'hébergement

Une start-up française propose un réseau social capable de mettre en relation réfugiés et proposition d'hébergement. Succès garanti.

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Foday Mamoud Janneh, Alice Barbe et Carlos Arbelaez, membre de l'association Singa et entrepreneurs.
Foday Mamoud Janneh, Alice Barbe et Carlos Arbelaez, membre de l'association Singa et entrepreneurs. © DR

Temps de lecture : 3 min

Alice Barbe allume son ordinateur et n'en revient pas : plus de 50 propositions d'hébergement de réfugiés sont arrivées en moins d'une demi-heure. La coordinatrice de ce réseau social d'un nouveau genre est épuisée, mais confiante : peu de start-up connaissent un décollage aussi flamboyant. La plateforme CALM, pour « Comme À La Maison », met en relation réfugiés sans toit et particuliers qui en proposent un bénévolement. Une sorte d'Airbnb du réfugié, avec mention « social et solidaire ».

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Depuis le début de la semaine, les propositions d'accueil pleuvent de toutes parts. Il y en a désormais plus de 600. Dans les villes, dans les campagnes, à l'étranger, pour un mois, deux mois, voire plus... Hier, elle a même reçu une proposition pour un an. Dans la quantité de mails fraîchement arrivés, une famille offre deux chambres « dans une ferme à 10 minutes d'un village, où les étés sont chauds, sans être étouffants ». Lui veille sur 270 brebis, elle cultive des légumes qu'elle cuisine simplement. Le couple propose « un espace où le réfugié pourra se reconstruire pendant 6 mois ». D'autres proposent de prêter leur résidence secondaire à la campagne, un chalet face au mont Blanc, un appartement au bord de la mer... « Même ceux qui n'ont pas de place nous proposent d'installer un matelas dans leur salon, mais nous refusons poliment », explique Alice Barbe.

Au rythme de l'émotion collective

Son réseau social vit au rythme de l'émotion collective et offre une lucarne sur le mouvement de générosité qui balaye le pays. Depuis que Merkel a parlé et depuis la publication de la photo d'un enfant mort échoué sur une plage, l'élan est gigantesque. « Ne croyez pas que ceux proposent un hébergement sont des militants, il n'y a vraiment aucun profil type », tempère la jeune entrepreneuse. Ceux qui offrent un hébergement sont accompagnés par l'association Singa, qui chapeaute le développement de ce réseau social. Ils sont d'abord conviés à une formation d'accueil des réfugiés, prodiguée, entre autres, par Quitterie Simon.

Cette « spécialiste de l'interculturalité » et titulaire d'un MBA « diversité, dialogue et management » prépare les accueillants à désamorcer les malentendus qui surgiront inévitablement pendant leur cohabitation. Elle raconte sa propre expérience : « Un jour, j'ai reçu chez moi un groupe d'Afghans. J'avais investi beaucoup d'affect dans leur accueil, beaucoup cuisiné pour leur offrir un bon déjeuner. Lorsque j'ai posé le dessert sur la table, j'ai demandé : Qui en veut ? Personne n'a bougé. Comme je n'allais pas manger mon dessert toute seule, je suis repartie avec mon plat. Je ne savais pas à ce moment que leur culture exigeait que j'insiste deux ou trois fois avant qu'ils n'acceptent. Même s'il était évident qu'ils avaient très envie de ce dessert. » Et puis, il y a ce code tacite qui consiste à ne jamais demander les raisons qui ont poussé à l'exil. Le passé de certains se révèle souvent encombrant. Comme cet homme qui ne supporte pas de se retrouver attablé en face de son hôte dans une pièce aux portes fermées, ou celui qui sursaute à chaque claquement de porte... Ces symptômes sont courants chez les personnes emprisonnées qui ont eu à subir des interrogatoires musclés.

Pour les réfugiés statutaires

L'« Airbnb du migrant » s'adresse pour le moment exclusivement aux réfugiés statutaires, c'est-à-dire aux étrangers ayant obtenu le statut délivré par les services de l'Ofpra. La France en compte 252 264, qui ne sont, bien évidemment, pas tous en situation d'urgence. « Ce statut n'est qu'un début. J'ai dormi dans des centres d'hébergement d'urgence du 115, dans la rue ou dans des Noctilien après l'avoir obtenu », explique Foday Mamoud Janneh, président de Singa et lui-même réfugié. Pour l'heure, le système de mise en relation entre hôtes et demandeurs est en cours de développement : la collecte des profils se fait en ligne, mais les « assemblages » entre profils se font grâce au travail des membres de l'association. À terme, l'algorithme sera capable de connecter automatiquement des profils sur le principe des affinités. Il sera prêt pour cet hiver...

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Commentaires (15)

  • Forban78

    Son action construite sur le compassionnel est destructrice pour les migrants eux-mêmes.

    Au lieu de les voir confiés à une structure compétente, capable de s'occuper d'eux dans tous les domaines y compris administratif et de l'emploi, l'idée les disséminer dilue le problème sur le sol national. Elle déresponsabilise du même coup et totalement l'état français. A vouloir faire du bien sans être spécialistes de rien, les français auront à coup sûr dans quelques mois, enfoncé ces familles dans la précarité. Les migrants ne sont pas les nouveaux jouets des nantis !

    Pépère doit se frotter les mains ! Il lui a sans doute suffit de prier intensément l'esprit du 11 janvier qui curieusement n'est pas encore réapparu dans les medias ! Cela ne devrait tarder !

  • Forban78

    Cela s'appelle encourager la démission de l'état... Je veux bien vous suivre, mais que l'état me rembourse mes 50 euros, ce qu'il ne fera jamais.

  • Jepirad

    Je suis d'accord de donner de l'argent. Ça peut être une solution provisoire. Mais à qui et serai-je sûr de l'utilisation à de bonnes fins ?