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Politique

Migrants : la leçon de Merkel à Hollande et Sarkozy

Face à la crise de réfugiés, l'Allemagne a su très vite faire preuve de solidarité politique. La France, pays des droits de l'homme, s'est montrée frileuse, empêtrée dans sa "crise identitaire"...
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Migrants en Allemagne
Migrants en Allemagne.
FRANK RUMPENHORST / DPA / AFP

  72% des Allemands approuvent la politique d'ouverture et d'accueil de la chancelière Merkel envers les migrants, notamment ceux qui fuient la Syrie. Ce samedi, en quelques heures, 10.000 (!) migrants se sont précipités en Allemagne où ils ont reçu un accueil chaleureux d'une partie de la population descendue dans la rue pour les recevoir. Des chiffres commencent à circuler dans la presse sur ce qu'il en coûtera au budget de la république fédérale pour l'année 2015: 10 milliards d'euros supplémentaires et le très strict ministre des Finances Schäuble non seulement ne dément pas, mais estime nécessaire la dépense puisque  son pays pourrait recevoir jusqu'à 800.000 migrants. 800.000, c'est le chiffre officiel ! Schäuble se contente de préciser, en duo avec Merkel, qu'aucun impôt nouveau ne financera cet effort budgétaire.

Pendant ce temps...

62% des Français, selon un sondage Odoxa pour Le Parisien, estiment que les réfugiés syriens sont des migrants "comme les autres", que leur situation politique et humanitaire ne doit pas leur valoir un traitement de faveur. 55% des sondés, si l'on se réfère à cette même et récente étude d'opinion, s'opposent à tout "assouplissement" des règles envers les migrants. Qu'est-donc devenu le pays des droits de l'homme, celui qui accueillait à bras ouverts les survivants du génocide arménien, les républicains espagnols traqués par le franquisme, les dissidents du bloc soviétique ? Cette question n'a pas fini de hanter la communauté nationale, les responsables politiques, les intellectuels et les journalistes dans les jours, les semaines et les mois qui viennent.

Un humanisme allemand isolé dans l'Europe

Car il est vrai que la comparaison avec l'Allemagne n'est guère flatteuse. Une société ouverte contre un pays en apparence rabougri. Une économie florissante contre un rebond qui tarde à venir. Optimisme justifié contre pessimisme dépressif... Nous pourrions poursuive et étendre à l'infini cette litanie qui, bien sûr, comporte clichés et poncifs à propos du mal être français. Et pourtant... Il suffit de s'astreindre à une synthèse de la presse internationale pour mieux comprendre à quel point la chancelière Merkel s'est définitivement imposée comme le grand leader de l'Europe démocratique, reléguant derrière, loin derrière le président Hollande.

Voilà ce qu'on peut, entre autres, relever: "Germany! Germany! Germany! Un leadership d'un genre nouveau. Un acte de responsabilité. Un modèle de gouvernance, un modèle d'intégration. Merkel le seul chef politique qui a su trouver les mots de la solidarité. Est-ce son mérite ? Ou (sic!) le démérite des autres" ? Hollande, le britannique Cameron, l'italien Renzi et l'espagnol Rajoy, élus de droite et de gauche confondues, se sont montrés incapables eux de se raccrocher au souffle de la grande Histoire, celle qu'il ne faut pas rater. Déception française donc.

La France n'a pas su se rassembler autour de valeurs universelles

Angela Merkel, fille d'un pasteur protestant, formé à l'esprit de résistance dans l'ex RDA, a instantanément su qu'elle ne pouvait s'égarer, que la force des symboles et des images emportait tout sur son passage. Des réfugiés. Des transports de train. Des convois d'autobus. Enfants, femmes, vieillards, ballotés de camp de transit en gymnase désaffecté. Les Allemands ont suffisamment travaillé sur leur histoire, leur passé, leur mémoire pour ne pas s'égarer à l'instant décisif - passer du devoir de mémoire à la solidarité politique en action. Les Français, eux, en sont incapables, inhibés et tétanisés qu'ils sont par leur "crise identitaire", cette peur exacerbée, justifiée parfois, de l'autre, du migrant dans le contexte actuel. Le rétrécissement français n'est pas une vue de l'esprit. Il éclate au grand jour et la comparaison avec l'Allemagne de Merkel est saisissante. Affligeante.

Les principaux responsables politiques français, en particulier François Hollande et Nicolas Sarkozy semblent s'être ressaisis. Enfin et tant mieux. L'ex-chef de l'Etat a compris que comparer les migrants à une "fuite d'eau" valait indignité. Il trouve désormais les mots justes, les mots forts. Retour à Sarkozy l'humaniste, l'antithèse de celui qui avait eu l'épouvantable idée de concevoir un ministère de "l'Immigration et de l'Identité Nationale". Une erreur fondatrice. Personne ne se plaindra de ce retour à la normale. Quant au président de la République, il a l'intelligence de s'aligner, peu ou prou, sur la chancelière Merkel, acceptant toute une série d'évolutions, notamment une répartition des migrants par quotas. Hollande suiveur et non pas initiateur... Sa conférence de presse à venir nous démentira... Peut être ? Sans doute l'appel des artistes l'a-t-il secoué : "Nous comprenons très bien les inquiétudes que la situation peut faire naître chez nos concitoyens, en particulier les plus confrontés aux difficultés sociales. Mais nous considérons qu'il est du devoir des gouvernements occidentaux de dépasser ces inquiétudes et d'agir. Le courage et la grandeur consistent précisément à bousculer l'opinion si nécessaire pour défendre les valeurs essentielles de la démocratie". En 1980, quand les boat people vietnamiens se noyaient en mer de Chine, Jean-Paul Sartre et Raymond Aron, enfin réconciliés, exhortaient ensemble le président Giscard d'Estaing à intervenir. Les interlocuteurs de François Hollande ont désormais pour identité Dany Boon, Daft Punk et Line Renaud.

Changement d'époque...

 

 

 

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