Financement des partis : le FN a rendez-vous chez les juges

 

Financement des partis : le FN a rendez-vous chez les juges

    A trois mois des élections régionales (6 et 13 décembre), qui devraient permettre au Front national (FN) de poursuivre sa conquête de collectivités territoriales, le parti accumule les déboires judiciaires. Outre les recours à répétition de Jean-Marie Le Pen pour contester son exclusion du parti qu'il a co-fondé et de la présidence d'honneur, le FN pourrait être mis en examen ce mercredi matin en tant que personne morale pour recel de produits d'abus de biens sociaux et complicité d'escroquerie ou placé sous le statut intermédiaire de témoin assisté. C'est le trésorier Wallerand de Saint-Just qui répondra, au nom du parti à la flamme, à la convocation des juges Renaud Van Ruymbeke et Aude Buresi du pôle financier du tribunal de grande instance de Paris à 9h30.

    La justice, qui a ouvert une information judiciaire en avril 2014, suspecte un système frauduleux d'enrichissement avec de l'argent public. A l'occasion des élections législatives de 2012, l'agence de communication Riwal, dirigée par Frédéric Chatillon, un des proches de Marine Le Pen, fournissait à Jeanne, un micro-parti proche du FN, deux kits de campagne (tracts, affiches, sites internet...) pour les candidats.

    Vendus 9 000 ou près de 16 000 euros aux candidats, ces kits auraient été surfacturés au préjudice final de l'Ã?tat qui rembourse les frais de campagne des candidats dépassant les 5%, selon une source proche du dossier. Ce matériel, acheté par 525 des 565 candidats frontistes, leur aurait en outre été imposé comme une contrepartie obligatoire de leur investiture, ce qu'interdit le code électoral.

    « Faux ! », a réagi Wallerand de Saint-Just lors d'un point presse mardi. « La plupart ont choisi le kit dans un souci de facilité. Mais plusieurs ont refusé et ont été investis sans difficult?. En février 2015, le quotidien Libération avait pourtant publié le document transmis à l'époque aux secrétaires départementaux du FN. «L'investiture du FN n'est validée qu'après signature du bon de commande relatif au kit de campagne. Celui-ci est donc obligatoire et s'impose à tout candidat investi par le FN», pouvait-on lire. Le trésorier du parti, tête de liste FN aux régionales en Ã?le-de-France, voit lui dans cette affaire « un acharnement » avant les régionales.

    Huit personnes sont mises en examen dans ce volet de l'affaire, notamment Frédéric Chatillon, connu pour son passé de leader du GUD, le syndicat étudiant d'extrême droite, et Jean-François Jalkh, secrétaire général de Jeanne et par ailleurs vice-président du FN.

    Les juges soupçonnent aussi Riwal d'avoir financé illégalement le FN. La société aurait notamment mis gratuitement à sa disposition des locaux ou des employés, accordé à Jeanne un crédit sans intérêt ayant atteint 8 millions d'euros fin 2012 et plus d'un million d'euros fin 2013, le même procédé ayant été utilisé pour le FN à hauteur de 900 000 euros fin 2013.

    Mais l'enquête a été fragilisée par un vide législatif, le délit d'acceptation par un parti politique d'un financement provenant d'une personne morale étant puni par la loi sur la transparence du financement des partis politiques mais assorti d'aucune sanction. Face à cette faille, en attendant qu'une nouvelle loi soit votée, qui ne serait de toute manière pas rétroactive, le ministère public a demandé en juin aux magistrats de mettre en examen le FN pour recel de produits d'abus de biens sociaux et complicité d'escroqueries. L'enjeu de la convocation de ce mercredi.