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A Calais, les passeurs font monter les enchères

Avec le renforcement des contrôles, les passages clandestins par Calais et le tunnel sous la Manche se font de plus en plus difficiles. Du coup, les réseaux de passeur s’adaptent…

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Des migrants tentent de rejoindre l'Angleterre.
Des migrants tentent de rejoindre l'Angleterre. © Reuters

Mardi soir, entre 100 et 150 migrants ont bloqué le trafic des Eurostar en s'allongeant sur les voies à la gare de Calais-Fréthun. Objectif : ralentir le trafic et bloquer les trains pour permettre à d'autres de se glisser dans les soufflets, sous la motrice, entre les voitures… Cette opération de force est le signe que la sécurisation du port et du site Eurotunnel renforcée depuis le 1er juillet commence à porter ses fruits.

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On ne passe plus qu'au compte-gouttes à Calais. Les passeurs cherchent de nouveaux moyens, de nouvelles routes, et les prix s'envolent. "Sur le site d'Eurotunnel, les Anglais nous disaient au début de l'été qu'ils interpellaient entre 40 et 50 clandestins par nuit, raconte un fonctionnaire. Depuis la rentrée, ils n'en chopent plus que trois ou quatre. Ils ne donnent jamais les vrais chiffres pour ne pas affoler leur opinion publique, mais cela montre une tendance."

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Une filière albanaise peut rapporter plus d'un million

Pour les passeurs, Calais est un marché avec une offre et une demande. "De nombreux migrants tentent de passer tout seuls en grimpant dans les camions, explique Christian Salomé de L'Auberge des migrants, une des principales associations de bénévoles, mais depuis quelque temps, cela devient difficile, la police surveille toutes les aires d'autoroute." Trois catégories de passeurs se partagent le marché calaisien. Les Albanais, qui s'occupent des clandestins venus de l'est de l'Europe et des Balkans. Ils ne vivent pas dans la "jungle", mais dans les hôtels bon marché de la ville et les chaînes low cost des zones industrielles. Ils "tiennent" les aires d'autoroutes de l'ouest de la ville. Les Irako-Kurdes et les Égyptiens, spécialisés dans le convoyage des Moyen-Orientaux et des Africains, qu'ils se partagent avec les Afghans.

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"Depuis le début de l'année, explique le commissaire Julien Gentile de l'Ocriest, l'Office central pour la répression de l'immigration irrégulière, nous avons démantelé une trentaine de réseaux. Nous n'avons jamais découvert de grands réseaux internationaux qui contrôleraient le marché depuis le pays d'origine jusqu'à la destination finale. Ce sont de grosses PME, familiales voire communautaires, qui opèrent à Calais, avec pour certaines des ramifications dans l'Est parisien. Une filière albanaise, les plus professionnelles, peut rapporter plus d'un million par an."

Les Érythréens acceptent de servir de leurre pour payer moins cher

Le prix moyen du passage varie entre 3.000 et 6.000 euros. Mais les passeurs s'adaptent en fonction des moyens de leurs clients. Les Érythréens, qui sont les plus démunis, paient en moyenne moins de 500 euros. Souvent, ils acceptent de servir de leurre, en participant aux opérations de groupe pour attirer l'attention des forces de l'ordre. Pendant ce temps-là, les passeurs exfiltrent les "gros" payeurs. "Quand on paie peu, on sait que ce sera long, explique une Soudanaise. On donne au passeur la moitié de la somme avant de partir. Si on réussit, on paie la moitié en Angleterre. Sinon, il nous rend l'argent jusqu'à la fois suivante." Les montants engagés peuvent cependant atteindre les 10.000 ou 15.000 euros pour des opérations sophistiquées qui engagent la complicité d'un chauffeur de camion, l'aménagement d'une cache dans un véhicule ou un transfert par le port de Rotterdam…

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Les Syriens qui arrivent à Calais ont généralement de l'argent et la plupart ne restent dans le Pas-de-Calais qu'une nuit ou deux. La SNCF s'est engagée à dresser un grillage sur une longueur de 3 km et à défricher 30 ha de pâture pour rendre l'assaut des trains plus difficile. La recherche de l'"étanchéité" maximale à Calais provoque de nouvelles migrations vers Dieppe, plus au sud, ou Ostende en Belgique. Le maire de Téteghem, près de Dunkerque, a vu le camp de réfugiés de sa commune doubler en quelques jours. Tout comme le ballet des voitures immatriculées en Grande-Bretagne… La loi du marché.

Source: JDD papier

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