
Le haut-commissaire de l’Organisation des Nations unies (ONU) chargé des droits de l’homme, Zeid Ra’ad Al-Hussein, a dénoncé vendredi 11 septembre la « politique nationale systématique d’expulsions de force des Roms » en France, deux semaines après l’évacuation contestée de l’un des plus vieux bidonvilles du pays. Le haut-commissaire appelle les autorités françaises à « remplacer cette politique punitive et destructrice par une politique véritablement inclusive ».
A la fin d’août, le Samaritain, l’un des plus anciens bidonvilles roms de France, où logeaient 80 familles à La Courneuve, a été évacué malgré l’intervention de l’évêque, la présence d’enfants scolarisés et la mobilisation citoyenne. Une décision qui a suscité une pluie de critiques, dont celles de M. Al-Hussein :
« L’expulsion a été menée sans avertissement, alors que celui-ci est normalement de vingt-quatre heures au minimum. Elle est survenue tôt dans l’après-midi alors que les habitants étaient absents. Des biens leur appartenant ainsi que certaines pièces d’identité auraient été détruits. Seul un petit nombre de familles se sont vu offrir un hébergement, et pour trois nuits uniquement. De ce fait, la plupart de ces personnes sont devenues sans abri. »
Le haut-commissaire souligne aussi que les événements de La Courneuve ne sont que « les derniers d’une série d’expulsions forcées collectives de migrants roms en France depuis 2012 » et a fait part de sa préoccupation devant des rapports faisant état de nouvelles expulsions à venir. En dehors de la France, ces expulsions forcées se sont poursuivies ces dernières années en Bulgarie, en Albanie, en République tchèque, en Grèce, en Hongrie, en Italie, en Roumanie, en Russie, en Serbie, en Turquie et au Royaume-Uni, rappelle-t-il.
Différences de traitement
Jeudi, 300 Roms ont été expulsés de leur camp à Asnières-sur-Seine, dans les Hauts-de-Seine. Des élus de Seine-Saint-Denis et des associations ont déploré ces expulsions de camps, réclamant la même mobilisation pour les Roms que pour les réfugiés d’Irak et de Syrie.
« Nous nous réjouissons » de l’annonce que la France va accueillir 24 000 réfugiés, a souligné la sénatrice EELV de Seine-Saint-Denis, Aline Archimbaud. « Mais je ne peux pas comprendre pourquoi les populations roms, qui sont aussi des populations réfugiées, subissent un tel traitement. » Les Roms subissent « un racisme latent, sournois, violent, dans plusieurs pays d’Europe », a-t-elle dénoncé.
Patrick Braouezec, l’ancien maire PCF de Saint-Denis et président de la communauté d’agglomération Plaine Commune, a également regretté qu’« au moment où les Etats européens se mobilisent pour des réfugiés, ils sont incapables de se mobiliser pour des populations européennes qui vivent sur nos territoires ».
Plusieurs associations – Médecins du monde, la Croix-Rouge, la Voix des Roms, etc. – ont aussi dénoncé les destructions de campements, qui entraînent des situations d’errance et interrompent l’accès aux droits et les démarches d’insertion.
« Nous sommes dans la rue avec les enfants depuis deux mois », a expliqué Antonella Covaci, expulsée d’un village d’insertion à Saint-Ouen à la fin du mois de juillet. « Je travaille, j’ai un CDD, mais maintenant que je dors dans la rue, c’est difficile d’aller travailler, » a témoigné Iulian Minzat, qui vivait dans le bidonville du Samaritain depuis sept ans. Jozsef Farkas, qui y vivait depuis trois ans, a lancé une pétition contre cette évacuation, qui a recueilli plus de 40 000 signatures.
Voir les contributions
Réutiliser ce contenu