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La voiture sans volant donne le vertige aux assureurs

Les futurs véhicules autonomes posent de nombreuses questions en termes de responsabilité et pourraient bouleverser la relation entre clients et assureurs.

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Publié le 11 septembre 2015 à 21h01, modifié le 14 septembre 2015 à 12h25

Temps de Lecture 3 min.

La voiture autonome – que devrait tester Emmanuel Macron, le ministre de l’économie, lundi 14 septembre chez PSA – laisse entrevoir la promesse de routes beaucoup plus sûres. Selon le cabinet KPMG, la fréquence des accidents devrait chuter de 80 % d’ici à 2040. Pourtant, le règne annoncé de l’automobile sans conducteur — qui sera bientôt autorisée à faire l’objet de tests dans le trafic — commence à donner la migraine aux assureurs. Non pas tant à cause de la contraction prévisible de ce marché qui pèse, en France, 20 milliards d’euros par an et pourrait presque fondre de moitié dans les vingt-cinq prochaines années. Ce qui inquiète surtout la profession, c’est qu’elle s’attend à ouvrir une boîte de Pandore.

« Lorsqu’un véhicule conçu pour que personne ne tienne le volant sort de la route, vers qui se tourner pour identifier le responsable ? Le constructeur du modèle, le sous-traitant qui a conçu les algorithmes, le gestionnaire des données, la société qui a fabriqué les capteurs, les pouvoirs publics qui entretiennent l’infrastructure routière ? », résume Pascal Demurger, directeur du groupe MAIF et président du Groupement des entreprises mutuelles d’assurance (GEMA).

La cybercriminalité et les questions éthiques

François Nédey, directeur technique assurances de biens et de responsabilités chez Allianz France, considère que « l’avènement de la voiture autonome est inéluctable mais cela pose des problèmes inextricables en termes de responsabilité ». Selon lui, « des évolutions très profondes de la réglementation devront intervenir, quitte à ce que cela prenne une dizaine d’années ».

Sièges en vis-à-vis, écrans sur les parties latérales, la F015 concept car Mercedes Benz.

Parmi les assureurs, des groupes de travail se sont constitués pour tenter d’anticiper les mutations annoncées. « En 2100, lorsque tous les véhicules seront équipés de systèmes de prévention des collisions, la situation sera gérable. Le problème, c’est la longue période de transition qui verra cohabiter des vieilles Mobylette et des voitures robotisées avec, à la clé, des règlements de sinistres longs et compliqués », s’inquiète le spécialiste des risques émergents dans une compagnie. Aussi, beaucoup d’assureurs plaident-ils pour l’instauration d’un système dit de « responsabilité sans faute ». « Pour simplifier, dit un professionnel, la victime est indemnisée et les assureurs des diverses parties s’accordent ensuite pour déterminer les responsabilités. »

Autres gros sujets de préoccupation : la cybercriminalité et les questions éthiques. Depuis les démonstrations de hacking réalisées ces derniers mois sur des voitures de séries connectées à l’Internet, l’éventualité d’un piratage à distance est prise au sérieux.

“Les assureurs demanderont sans doute à valider les algorithmes des logiciels installés par les constructeurs”, François Nédey, directeur technique chez Allianz France

De même, la définition des algorithmes destinés à déterminer les choix à réaliser dans certaines situations d’urgence ouvre des débats qui donnent le vertige. Trouvant soudainement sur son chemin un véhicule arrivant en sens inverse et un tronc d’arbre lui barrant l’autre moitié de la route, contre lequel de ces deux obstacles la voiture autonome décidera-t-elle de se fracasser ? « A partir du moment où ils seront tenus d’indemniser les dommages, les assureurs demanderont sans doute à valider les algorithmes des logiciels installés par les constructeurs », considère François Nédey.

La voiture autonome présentée par PSA.

Dans ce contexte, se prépare une vaste redistribution des cartes. « La relation client pourrait être bouleversée car ce n’est plus avec le propriétaire de la voiture mais avec le constructeur automobile que l’assureur dialoguera », souligne le patron de la MAIF. Ce tête à tête avec les marques ne pourrait que tirer les primes vers le bas et la systématisation des contrats de groupe favoriser la concentration de la profession.

Autre possibilité : que BMW, Toyota, Volkswagen, Renault ou PSA Peugeot Citroën deviennent eux-mêmes les assureurs de leurs véhicules autonomes. Pour l’heure, seuls des échanges informels ont eu lieu entre la profession et le monde de l’automobile. Il ne fait guère de doute qu’à moyen terme, les discussions vont s’intensifier. « La voiture sans chauffeur, c’est un saut dans l’inconnu. Et les assureurs ont horreur de l’inconnu », sourit-on chez Allianz.

normand@lemonde.fr

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