
La sierra Nevada subit de plein fouet les effets de la sécheresse exceptionnelle qui sévit depuis quatre ans en Californie. Selon des travaux publiés lundi 14 septembre dans la revue Nature Climate Change, le manteau neigeux de la chaîne montagneuse, qui traverse le grand Etat de l’Ouest américain du nord au sud, a atteint au 1er avril 2015 son plus bas niveau depuis au moins cinq siècles.
Les auteurs précisent que la masse neigeuse mesurée cette année n’y représente que 5 % de la moyenne historique relevée à la même période.
Le record battu en 2015, notent les chercheurs, correspond à la température moyenne record, relevée en Californie entre janvier et mars ; ce qui « met en lumière le rôle de la température à accentuer la sévérité de la sécheresse ».
- Comment les analyses ont-elles été faites ?
Les auteurs ont analysé des séries de cernes d’arbres, dont ils ont extrait une estimation des variations, depuis l’an 1500, des précipitations hivernales et de la température moyenne de fin d’hiver, sur l’ensemble de l’Etat. Ils ont pu contrôler la validité de leur reconstruction en observant un bon accord entre l’estimation issue des cernes d’arbres et les mesures in situ réalisées en 1934 et en 1977, deux années marquées de très faible enneigement.
- Cette faiblesse de la couverture neigeuse est-elle une menace pour la Californie ?
La question est effectivement cruciale : elle détermine partiellement l’abondance de la ressource en eau disponible.
« Dans le climat de type méditerranéen de la Californie, environ 80 % des précipitations surviennent pendant les mois d’hiver, notent Soumaya Belmecheri, Valérie Trouet (université d’Arizona à Tucson) et leurs coauteurs. Le manteau neigeux de la Sierra Nevada joue un rôle critique dans le renflouement des réservoirs de l’Etat et fournit 30 % de ses ressources en eau. »
- Ce phénomène de rétractation est-il observé ailleurs ?
Oui. En Europe occidentale, les vagues de chaleur qui se sont succédé cet été sont ainsi à l’origine du retrait, exceptionnel, des glaciers alpins.
Selon Christian Vincent, chercheur au Laboratoire de glaciologie et de géophysique de l’environnement (LGGE), la période d’ablation (c’est-à-dire de retrait) n’est pas encore achevée qu’elle marque déjà un record. « On constate des bilans de masse très déficitaires, qui se situent au niveau du record de 2003, alors que la fonte va continuer jusqu’en octobre », dit le glaciologue.
Selon les mesures conduites par le LGGE, la mer de glace a déjà perdu 2,4 mètres d’épaisseur et le glacier de Saint-Sorlin près de 3 mètres. Le record précédent remonte vraisemblablement à 1947, mais cette donnée ne repose que sur des extrapolations opérées à partir de mesures faites à l’époque sur un glacier suisse.
Ce record battu un mois avant la fin de la saison le confirme : la perte de masse des glaciers des Alpes se fait tambour battant. « Dans les trente prochaines années, les simulations suggèrent que la mer de glace devrait avoir reculé de 1,2 km, plus ou moins 200 mètres selon les scénarios climatiques, explique M. Vincent. Quant au glacier de Saint-Sorlin, [massif des Grandes Rousses] il devrait avoir disparu vers 2080 ; ce qui sera le cas de tous les glaciers alpins dont le point culminant est au-dessous de 3 500 mètres. »
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