Présenté comme l’un des plus ambitieux engagements climatiques à l’approche de la COP 21, l’objectif européen repose encore sur des incertitudes non-négligeables. En effet, selon les calculs de l’ONG Carbon Action Network (CAN), les émissions cumulées de l’UE pourraient varier de 37 à 43 milliards de tonne de CO2 entre 2021 et 2030, soit un écart de 14% en fonction des mesures choisies pour les mettre en œuvre. Le CAN appelle l’Europe à viser plus haut, tandis que se tient aujourd’hui un conseil de l’environnement qui doit acter la position de l’Union pour la COP 21.

Réduire les émissions de gaz à effet de serre de 40% en 2030, c’est l’engagement – a priori – ambitieux qu’a pris l’Union Européenne en mars 2015 en vue de la COP 21. Une ambition remise en cause par l’ONG Carbon Action Network dans une étude publiée récemment. D’après ses calculs, les réductions d’émissions de l’Europe entre 2021 et 2030 sont incertaines à hauteur de six milliards de tonnes de CO2.



Le montant de 6 milliards de tonnes est calculé à partir de quatre facteurs à prendre en compte ou non dans le calcul de l’objectif pour 2030, à savoir :
– Le transfert ou non des surplus du marché du carbone ETS après 2020 : 2,6 milliards de tonnes
– La prise en compte ou non des émissions du secteur de la forêt : 1,835 milliard de tonnes
– La fixation de la date de référence des objectifs pour les secteurs hors-ETS : 0,878 milliard de tonnes
– Le transfert ou non des surplus d’émissions des secteurs hors-ETS après 2020 : 0,7 milliard de tonnes

L’Europe doit s’engager pour 2025



"La plupart des décisions d’application et de déclinaison de l’objectif pour 2030 ont été repoussées à l’après conférence de Paris", déplore l’ONG. Selon le scénario choisi, les émissions de l’UE cumulées sur cette période pourraient donc varier de 37 à 43 milliards de tonnes de CO2. Dans le moins ambitieux des scénarios, les émissions européennes en 2030 seraient à peine plus faibles que celles déterminées par son objectif pour l’année 2020.

Le Climate Action Network appelle donc l’Europe à sortir du flou entourant son engagement et à en préciser les modalités d’application. "Les leaders européens doivent envoyer au monde un message clair selon lequel ce scénario a minima ne se produira pas."

L’ONG plaide notamment pour que l’UE s’engage, comme pour le protocole de Kyoto, sur des périodes plus courtes (par intervalle de cinq ans) à la fin desquelles il serait possible de revoir à la hausse les ambitions de réduction des émissions.
Le CAN juge également "essentiel" que les émissions provenant du transport international (aviation et trafic maritime) soient prises en compte dans le budget carbone européen.

Divergences sur les objectifs à long-terme



Ce vendredi, les ministres de l’environnement de l’Union européenne doivent justement s’accorder sur une position commune en vue de la conférence climatique de Paris (COP 21). Si l’objectif de réduire d’au moins 40% leurs émissions de CO2 d’ici 2030 par rapport à 1990 est acté, les États membres sont encore divisés sur les objectifs à long terme.

Certains pays, dont la Pologne, la Hongrie, la République tchèque et la Slovaquie, sont réfractaires à un objectif de réduction de 60% à l’horizon 2050 par rapport à 2010. Ils préfèrent garder la fourchette large proposée par le GIEC (Groupe intergouvernemental sur l’évolution du climat) qui va de 40 à 70% de réduction des émissions de CO2.

Par ailleurs, à l’horizon 2100, la Commission européenne souhaite reprendre la position du G7. Réunis en juin dernier, les membres des sept pays les plus industrialisés du monde ont annoncé par la voix de la chancelière allemande, Angela Merkel, la décarbonation complète de l’économie mondiale "au cours de ce siècle".

L’objectif pour la Commission européenne est de mettre la pression sur les autres pays afin d’arriver à un accord ambitieux pendant la COP 21. "Si Paris ne peut constituer une réponse au défi que pose le changement climatique, il s’agit néanmoins d’un moment extrêmement important pour sensibiliser et créer un certain niveau d’ambition. Nous avons donné l’objectif de réduction le plus important. Il correspond à des législations concrètes qui nous donnent l’assurance d’arriver à -40% d’émissions de CO2 en 2030. Nous attendons la même rigueur de la part de nos partenaires", a expliqué Pierre Schellekens, chef de cabinet adjoint de Miguel Arias Cañete, le commissaire européen à l’énergie et au climat, lors d’un déjeuner de presse organisé à Bruxelles le 15 septembre.

Reste que pour l’instant, l’engagement européen n’est jugé ni "ambitieux" ni "équitable" par le Carbon Action Network, qui appelle l’Europe à revoir à la hausse ses ambitions avec un objectif de réduction d’au moins 55% en 2030.

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