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VIDEO. Nicolas Sarkozy et Alain Juppé ne font plus semblant

LA POLITIQUE EN COULISSES - Dominique de Montvalon, rédacteur en chef au Journal du Dimanche, décrypte l'actualité politique. Cette semaine, il revient sur le ton qui est monté à droite dans la campagne pour la primaire de 2016. Entre Nicolas Sarkozy et Alain Juppé, le drame est-il assuré?

Dominique de Montvalon , Mis à jour le
Entre Nicolas Sarkozy et Alain Juppé, ça chauffe.
Entre Nicolas Sarkozy et Alain Juppé, ça chauffe. © Visual Press

Nicolas Sarkozy et Alain Juppé parviendront-ils jusqu’à la tenue de la primaire dite "de la droite et du centre" prévue les 20 et 27 novembre 2016 sans que l’un ou l’autre ne "craque", nerveusement ou politiquement? La question se pose à observer la façon dont les deux favoris actuels de la compétition viennent, en quinze jours et mine de rien, de se rendre coup pour coup alors que Nicolas Sarkozy souhaitait une trêve jusqu’aux élections régionales de décembre...

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Premier acte : La Baule. Le maître d’œuvre ce jour-là est le filloniste, vendéen et bosseur Bruno Retailleau, dont la cote à droite a grimpé vertigineusement depuis son élection-surprise à la tête du groupe UMP du Sénat. En plus, il réussit le miracle : Juppé-Sarkozy-Fillon, les trois hommes, après palabres, consentent à poser ensemble devant les photographes . Mais lorsque Sarkozy entame à la tribune son discours, les deux autres se sont déjà éclipsés. Happés par d’ardentes obligations et surtout peu désireux de paraître s’aligner derrière celui qui apparaîtrait alors comme le patron.

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Acte 2 : Le Touquet, dont le député et maire Daniel Fasquelle est aujourd’hui un ardent sarkozyste. Tout le monde est invité jusqu’à ce Juppé et Fillon fassent savoir qu’ils ne pourront malheureusement pas être là. Pris, là encore, par d’ardentes obligations. Or, ce samedi 12 septembre, Sarkozy est encore à Paris, fignolant son discours de l’après-midi – réfugiés, immigration, assimilation, Schengen 2 - lorsqu’il apprend que Juppé, à la surprise générale, est finalement venu saluer ses amis républicains au Touquet. Joli coup médiatique, très peu apprécie de Sarkozy qui va répliquer avec, sur les thèmes forts du moment, carrément l’esquisse d’une sorte de discours-programme personnel .

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Acte 3 : Mercredi à Paris, au siège des Républicains, Sarkozy, devant l’état-major du parti (mais sans Juppé ni d’ailleurs Fillon), clôt un débat sur l’immigration en annonçant que le parti va soumettre dans la foulée aux militants 11 questions auxquelles ils auront, sur Internet , 48 heures pour répondre par oui ou par non. Exemple : "Etes-vous d’accord pour que les allocations familiales et les aides au logement ne soient plus ouvertes aux étrangers dès leur arrivée, mais seulement après au moins cinq ans de séjour légal?"

Pour faire bonne mesure, Sarkozy en ajoute une, ou plutôt il en improvise une douzième (puisqu’elle ne figure pas sur le document officiel du parti). Intégration ou assimilation, quelle est la bonne solution? Un thème auquel Juppé a déjà répondu – et il le redira dès le lendemain en rendant publiques, agacé, ses propres réponses. Avant donc que ne soient connues les réponses des militants. Lui récuse l’idée d’assimilation, du moins s’il s’agissait, écrit-il, "de nier les différences ou l’identité de chacun". Dans ce cas, "le terme n’a pas de sens". C’est abrupt, c’est clair.

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Imposer ses propres thèmes

Dans le camp Juppé, le questionnaire Sarkozy aura donc fait grincer des dents. Mais Sarkozy poursuit sa contre-attaque vendredi matin à la Une du Parisien , face aux lecteurs du journal. "L’intégration a marché pour vos parents, leur dit-il. Elle marche pour vous, mais elle ne fonctionne plus". Et toc! Marquage étroit. A chacun son credo. 

Objectifs de Juppé : ne pas se laisser "cornériser", imposer sa propre démarche, continuer de faire la course en tête. Ainsi, vendredi matin, le maire de Bordeaux publiait-il une "Lettre ouverte" aux maires de France ulcérés de la baisse de la dotation globale de l’Etat aux collectivités territoriales en leur disant, en collègue : "Trop, c’est trop."

Objectifs de Sarkozy : ne pas laisser le champ libre à Juppé (qui a déjà publié il y a un mois un premier livre sur l’école), ne pas s’engluer à la présidence des Républicains, imposer ses propres thèmes sur un terrain – les migrants, les réfugiés, Schengen – dont il est convaincu que ce seront des thèmes majeurs en 2017.

Juppé toujours dans la course, contrairement à ce que pensait Sarkozy

Si Sarkozy appuie soudain ses coups, c’est parce qu’il observe les sondages et voit que Juppé – contrairement à ce qu’il imaginait il y a un an - est toujours dans la course. Il le fait aussi parce qu’il a le sentiment, à tort ou à raison, que Juppé, qui vantait naguère la "mondialisation heureuse", peut se retrouver vite en porte-à-faux avec la nouvelle donne européenne et les crispations que le drame des réfugiés et des migrants provoque. Enfin Sarkozy ne veut pas avec Juppé se retrouver dans la situation qui avait été la sienne en 2012 où, jusqu’au bout, il n’était pas parvenu à imposer à François Hollande un vrai "corps à corps" politique. Ses coups, lors du duel télévisé, partaient souvent, on s’en souvient, dans le vide.

Non seulement la droite française n’a aucune expérience vécue du système des primaires, mais ce système est contraire à la culture bonapartiste du chef qui, à droite en tout cas, est historiquement et culturellement dominante. D’où la question : aussi bien organisées soient-elles –et, pour le moment, elles le sont- les primaires tiendront-elles jusqu’au bout sans drame? Une évidence : cela va turbuler sec.

Source: JDD papier

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