AZF : 14 ans après, la blessure indélébile

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    Ce lundi, on commémore en ordre dispersé à Toulouse le 14ème anniversaire de l'explosion de l'usine AZF. La catastrophe a fait 31 morts et 2.500 blessés. Les victimes n'en ont toujours pas fini avec le feuilleton judiciaire. Elles refusent un 3e procès à Paris

    Le 21 septembre 2001, il y a quatorze ans, la France connait la plus grande catastrophe industrielle de son histoire moderne, avec l'explosion de l'usine AZF (AZote Fertilisants), un site de la filiale de Total Grande Paroisse. L'explosion est ressentie à des dizaines de kilomètres autour de Toulouse. L'accident tue 31 personnes, 26 hommes et 5 femmes, âgés de 24 à 93 ans.

    Ce jour-là, 450 employés travaillent dans l'usine . 22 meurent sur place. Les neuf autres se trouvaient près de l'usine, chez elles, dans des commerces ou des entreprises de la Route d'Espagne. Le 31ème mort, un retraité opéré dans une clinique voisine à ce moment-là décédé peu après d'une maladie nosocomiale. 

    Un troisième procès... dans 16 mois : "Plus on juge loin, moins on juge sévèrement"

     C'est une information que nous vous révélions dès vendredi : le procès en cassation des victimes d'AZF a été fixé à janvier 2017, 15 ans et 4 mois après la catastrophe.

    Car il y a déjà eu deux procès AZF. En appel l'entreprise Grande Paroisse avait été condamnée à 225 000€ et l'ancien directeur de l'usine, Serge Biechlin à un an de prison ferme et 45.000 euros d'amende mais début 2015, les avocats du groupe pétrolier se pourvoient en cassation. Ils ont fait valoir qu'un des magistrats qui a participé à ce deuxième procès avait des liens avec l'Inavem, un organisme qui regroupe des associations de victimes. Conformément à la nouvelle loi,  ce troisième procès aura lieu à Paris, d'où l'appel des sinistrés à la garde des Sceaux, Christiane Taubira, pour qu'il soit "relocalisé" à Toulouse. Ils ont lancé une pétition, selon eux le nouveau texte concernant le jugement de catastrophe peut ne pas s'appliquer à AZF qui est antérieur. Maître Stella Bisseuil, avocate de l'association des familles endeuillées, estime que l'on fait un "cadeau" à Total en maintenant cette audience à Paris. 

    "Plus on juge loin et moins on juge sévèrement. Total a son siège social à la Défense, c'est évident que c'est une difficulté qui est faite aux victimes et une facilité qui est faite à Total. Il y a une coresponsabilité de Total et de l'Etat ! Total qui s'acharne pour sauver son image et l'Etat qui n'aide pas la justice et les victimes à être normalement jugées"

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     Comme chaque année, les commémorations auront lieu en ordre dispersé. Les anciens salariés d'AZF qui n'acceptent pas la version officielle sur les causes de l'accident se réunissent régulièrement sur le lieu de mémoire à l'entrée de l'ancienne usine.

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    Pour les victimes, celles qui ont survécu, les quelques 2.242 blessés officiels dont 782 ont été hospitalisés, la plaie est encore ouverte. 21 % des résidents de la zone proche ont déclaré à l'InVs (Institut de veille sanitaire) avoir eu recours à des antidépresseurs et la moitié en prenait encore dix-huit mois après.

    "J'ai passé 28 mois sans marcher, et 18 semaines en psychiatrie. J'ai perdu 70% de mon audition. Je ne conduis plus. Je suis devenue une épave, j'ai failli me suicider" — Anne-Marie, une victime d'AZF

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