Comment les rugbymen sont devenus des armoires à glace

Où sont passés les gringalets des lignes arrière et les bedonnants de la première ligne ? Depuis que le rugby est devenu professionnel, voilà vingt ans, dans la foulée de la Coupe du monde 1995, ses joueurs se sont transformés physiquement.

Plongée au cœur d’une métamorphose qui concerne tous les pays et tous les postes avec les premiers intéressés : les 1 770 joueurs qui ont participé aux Coupes du monde pour les dix meilleures équipes de la planète.



Photo : AFP
Sources des données : L'Équipe, World Rugby

Eddy Ben Arous
Ce point bleu est Eddy Ben Arous. Le pilier de l’équipe de France va participer à sa première Coupe du monde à l’occasion de l’édition 2015. Pour l’occasion, il a été mesuré à 184 cm (en ordonnée) pour 109 kg (en abscisse). Il est l’un des 1 770 joueurs sélectionnés par les dix meilleures équipes du monde (Australie, Nouvelle-Zélande, Afrique-du-Sud, Argentine, France, Angleterre, Irlande, Pays de Galles, Ecosse et Italie) en Coupe du monde depuis 1995. Nous avons recensé, pour tous ces joueurs, leur taille et leur poids, afin de mesurer l’évolution morphologique du rugby depuis vingt ans, soit depuis que ce sport est devenu professionnel.

Trapu comme un première ligne
Si on affiche maintenant l'ensemble des première ligne sélectionnés depuis vingt ans par nos dix équipes, on remarque que Eddy Ben Arous en est le représentant type. Envoyés au front à l'avant de la mêlée, les piliers et les talonneurs sont des joueurs plutôt petits (pour des rugbymen, s'entend), et trapus. Ils mesurent ici pour la plupart entre 1,80 et 1,85 m et pèsent 100 à 115 kilos.

Grand comme un deuxième ligne
Ancien capitaine de l'équipe de France, Fabien Pelous était un deuxième ligne. Autrement dit, il était à peu près aussi lourd qu'un première ligne, mais beaucoup plus grand : 1,98 m pour 108 kg en 2003 comme en 2007. Un physique logique pour ces joueurs qui constituent un lien essentiel au cœur de la mêlée – d'où leur poids conséquent – et qui sont sollicités pour conquérir les ballons en touche – d'où le fait qu'ils tutoient facilement les 2 mètres. La différence de taille entre les première et les deuxième ligne saute aux yeux sur notre échantillon.

Léger comme un demi
Buteur d'exception, maillon essentiel du sacre de l'Angleterre en 2003, Jonny Wilkinson a le profil type d'un demi : cette année-là, il était pointé à 1,78 m et 84 kg. Qu'ils soient de mêlée ou d'ouverture, les demis lient les avants (les joueurs qui constituent la mêlée) aux lignes arrière et ont la réputation d'être les plus petits formats d'un XV. Nos données le confirment, puisqu'ils s'affichent encore plus petits que les première ligne et surtout beaucoup moins épais, avec un poids qui excède très rarement 90 kg.

1 460 joueurs à la loupe
Tous les autres postes des lignes arrière – trois-quart centre, trois-quart aile et arrière – ainsi que les troisième ligne se situent quelque part au milieu des trois postes précédemment étudiés : moins grands que les deuxième ligne, moins lourds que les première ligne, mais plus costauds que les demis, même s’il existe toujours des exceptions. Une parmi d’autres : l’ex-star des All Blacks Jonah Lomu, trois-quart aile hors norme pointé à 1,96 m pour 118 kg en 1999.

Tout le monde a grossi
Reste à voir quelle a été l’évolution morphologique des joueurs entre 1995 et 2015. Ces courbes, qui montrent l’évolution de la moyenne par ligne d’une coupe du monde à l’autre, affichent une tendance claire : quel que soit le poste, les joueurs sont devenus plus grands et plus lourds. L’évolution est moins marquée en termes de taille pour les avants (premère, deuxième et troisième ligne), mais spectaculaire un peu partout en terme de poids : presque tous les postes ont vu leur poids moyen grossir de dix kilos. C'est indéniable : en vingt ans, les joueurs de rugby internationaux ont tous considérablement «gonflé».

Une massification progressive
Une autre façon d’appréhender cette évolution est d’observer l’indice de masse corporelle (IMC), un indicateur défini par l’Organisation mondiale de la santé qui met en rapport le poids et la taille d'un individu. Sans surprise, les première ligne sortent du lot : aux yeux de l'OMS, ils sont tout simplement en «obésité modérée», même si le surplus de gras des piliers, visible lors de n'importe quel match il y a encore dix ans, devient de plus en plus rare. Au-delà de ce cas particulier, on ne peut que constater l'augmentation de l'IMC moyenne de chaque poste, à tel point que les trois-quarts aile d'aujourd'hui ont désormais un gabarit plus important que les troisième ligne de 1995... On peut aussi remarquer que les écarts entre les différents postes se sont resserrés, preuve d’une «massification» généralisée des joueurs.

Le Nord rattrape le Sud
Cette évolution a-t-elle été différente d’un pays à l’autre ? Oui. Si tous les pays étudiés ont vu leur IMC moyenne grandir entre 1995 et 2015, les trois pays majeurs de l’hémisphère Sud – Australie, Nouvelle-Zélande et Afrique-du-Sud – étaient clairement en avance sur ceux de l’hémisphère Nord et l’Argentine il y a vingt ans. Depuis, les équipes du Tournoi des six nations ont comblé ce retard, de même que l’Argentine, qui a suivi la même courbe que les nations européennes majeures. Aujourd'hui, les différences sont bien plus ténues qu'en 1995 entre toutes ces nations.

A vous de jouer !
Ici, vous pouvez prendre en main les données afin de mener vos propres expériences. Affichez les pays et/ou les éditions de Coupe du monde de votre choix en cochant les cases correspondantes et testez notre base de données.

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