L’immobilier sort-il de la crise, ou bien est-ce plus esthétiquement l’architecture qui échappe aux conflits plombant de façon répétée la liberté créative des maîtres d’œuvre ? Déjà, l’été avait apporté sont lot de surprises avec la remise sur rail du projet Samaritaine conçu par l’agence japonaise Sanaa. La question des tours à Paris restait en suspens, véritable épouvantail des associations. Or Ivanhoé Cambridge, filiale immobilière de la Caisse de dépôt et placement du Québec, a obtenu mardi 22 septembre auprès de la Ville de Paris le permis de construire pour son projet de tours Duo conçu par l’architecte Jean Nouvel.
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Sauf retournement toujours possible, les crispations suscitées par l’émergence de tours dans la capitale semblent s’atténuer. Déjà, le groupe Unibail s’était vu confier le 18 septembre la réalisation des tours Sisters, riches en formes galbées, dessinées par Christian de Portzamparc. Un projet de deux immeubles de grande hauteur (IGH, soit 50 m), qui se substitue à celui de la tour Phare signé par l’architecte américain Thom Mayne. Ce projet devait prendre place entre la Grande Arche et le CNIT, avec ses 300 mètres et 69 niveaux de bureaux, et devenir la plus haute tour de France. Restera à calculer les indemnités de l’architecte américain, lauréat du Pritzker Prize, comme le sont Nouvel et Portzamparc.
Les tours Duo après la tour Phare et les tours Sisters. « La délivrance du permis de construire nous fait entrer dans une nouvelle phase de ce projet enthousiasmant », a déclaré dans un communiqué Meka Brunel, la vice-présidente exécutive pour l’Europe d’Ivanhoé Cambridge. Issues d’une « vision urbanistique réfléchie et concertée » et insérées dans la zone d’aménagement concertée (ZAC) Paris Rive Gauche, elles « apporteront, selon elle, leur pierre au rayonnement de Paris ».
Fausses jumelles
Situées dans le 13e arrondissement de la capitale, en bordure de la Seine et des voies ferrées, la première tour offrira 39 étages sur 180 mètres et la seconde, 27 étages sur 122 mètres. La destination de ces immeubles de grande hauteur est mixte : d’une part 96 100 m2 de bureaux, de l’autre, sur 12 000 m2, un hôtel, un restaurant bar avec une vue panoramique sur Paris, un auditorium, des commerces, un jardin et des terrasses végétalisées. Ils devraient être en outre les premiers en France à bénéficier du label d’excellence WELL (WELL Building Standard).
Evoquant ces tours asymétriques, Jean Nouvel, qui a déjà réalisé à Paris l’Institut du monde arabe, la Fondation Cartier pour l’art contemporain, le Musée du quai Branly et la Philharmonie, parle d’une « composition architecturale lisible ». Malgré les remarques majoritairement négatives formulées par les riverains du quartier Bruneseau, selon les responsables d’associations, la commissaire enquêtrice Marie-Claire Eustache a rendu un avis favorable à la demande de permis de construire. « Le projet de construction des tours Duo soumis à enquête m’apparaît complet et bien maîtrisé dans ses différents aspects et impacts », résume-t-elle.
Les crispations suscitées par l’émergence de tours dans la capitale semblent s’atténuer
Reste à s’interroger sur la valeur des deux ensembles de tours. Les fausses jumelles de Jean Nouvel apparaissent à l’acmé de la dissymétrie, sans la moindre concession à une possible douceur des formes. A l’inverse, le projet Portzamparc mise tout sur les courbes. Deux projets à l’opposé l’un de l’autre… Et qui se défendent par des arguments opposés.
Les espaces de bureaux, chez Nouvel, seront « flexibles, adaptés aux nouveaux modes de management et de travail », et offriront « une large gamme de services associés » tels qu’un espace dédié au fitness, précise Ivanhoé Cambridge.
Choisi en avril 2012 au terme d’une consultation internationale lancée par la Ville de Paris, Ivanhoé Cambridge est l’investisseur unique de ce projet dont le montant n’est pas divulgué. Il espère commencer les travaux au deuxième trimestre 2016, après commercialisation de la moitié des surfaces de bureaux.
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