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Arabie saoudite : légion d’honneur et décapitations

Le prince Mohammed ben Nayef, ministre de l’intérieur et prince héritier d’Arabie saoudite, a obtenu la légion d’honneur des mains de François Hollande. L’an dernier, son pays a exécuté 146 personnes, souvent par décapitation.

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Publié le 23 septembre 2015 à 16h53, modifié le 07 mars 2016 à 11h09

Temps de Lecture 3 min.

François Hollande et le prince héritier Mohammed ben Nayef, vendredi 4 mars à l'Elysée.

C’est en toute discrétion que François Hollande a remis, vendredi 4 mars, la légion d’honneur « au titre de personnalité étrangère » à Mohammed ben Nayef, ministre de l’intérieur et prince héritier d’Arabie saoudite. Mais cette discrétion n’a pas suffi à éviter la polémique sur ce choix diplomatique, alors que l’Arabie saoudite, important client de l’industrie d’armement française, multiplie les atteintes aux droits de l’homme.

L’un des plus grands exécuteurs de la planète

En trois mois, de janvier à mars, le royaume wahabbite a exécuté 70 personnes, dont 47 en une seule journée, le 2 janvier. Parmi ces condamnés à mort, le plus souvent décapités au sabre, des criminels de droit commun, mais aussi des opposants politiques, comme le chiite Nimr al-Nimr.

En 2015, l’Arabie saoudite a exécuté 153 personnes, contre 87 en 2014. Entre janvier 1985 et juin 2015, au moins 2 208 personnes ont été victimes de la peine de mort, parmi lesquelles plus d’un millier d’étrangers, des mineurs et des handicapés mentaux.

Exécutions par an en Arabie Saoudite
Source : AFP

Une exécution tous les 2,5 jours en 2015

En août 2015, Amnesty International dénonçait une « frénésie d’exécutions » dans le pays. Riyad affirme appliquer la peine capitale pour les crimes graves, sur la base de la charia, la loi islamique : meurtre, viol, trafic de drogue, vol à main armée, enlèvement, mais aussi apostasie (refus de la religion), adultère et « sorcellerie ».

L’Arabie saoudite est le troisième plus grand exécuteur au monde, derrière la Chine et l’Iran. Dans son rapport 2014 sur la peine de mort dans le monde, Amnesty dénonçait des procès qui se déroulent « en secret », et où « les accusés ne bénéficient que rarement de l’assistance d’un avocat », et peuvent « être déclarés coupables sur la base d’aveux” obtenus sous la contrainte ».

Des blogueurs fouettés

Dix ans de prison, dix ans d’interdiction de sortie du territoire et mille coups de fouet pour « insulte à l’islam » : le blogueur Raïf Badaoui a payé cher ses appels à réformer le royaume. Farouche défenseur de la liberté d’expression, il avait demandé sur son site Internet la fin de l’influence religieuse dans les décisions du gouvernement.

Dix ans de prison, dix ans d’interdiction du territoire et 1 000 coups de fouet pour avoir appelé à réformer le royaume

Mais en Arabie saoudite, toute critique contre la famille royale, les institutions religieuses et l’islam est passible de poursuites. Sous couvert de lutte contre la cybercriminalité, de nombreux militants ont été condamnés et leurs comptes ont été fermés.

Des femmes mineures à vie

Pas à une contradiction près, le royaume a ratifié en septembre 2000 la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes, sans être tenue de respecter toute disposition contraire à la loi islamique. On a peine, au final, à voir laquelle elle respecte, même si on peut constater une – très – lente évolution sur ce sujet.

Depuis 2015, les femmes ont le droit de voter, mais toujours pas de conduire

Si les femmes ont ainsi acquis en 2015 le droit de voter et d’être éligibles aux élections municipales, elles restent traitées en éternelles mineures : citons l’obligation du recours à l’autorisation d’un tuteur masculin pour voyager, se marier, accéder à des études supérieures, etc. Elles ne peuvent en outre toujours pas conduire une voiture.

Des migrants frappés et expulsés…

Passages à tabac, conditions de détention déplorables : la campagne d’expulsion de centaines de milliers de travailleurs migrants « sans papiers » menée depuis 2013 a entraîné un grand nombre d’abus, selon un rapport de l’ONG Human Rights Watch.

« Un grand nombre d’entre eux sont retournés dans leurs pays démunis, incapables d’acheter de la nourriture ou de payer pour le transport vers leurs régions d’origine, dans certains cas parce que des fonctionnaires saoudiens ont arbitrairement confisqué leurs biens personnels. »

« De nombreux migrants ont été renvoyés vers des lieux où leur sécurité est menacée », note l’ONG, à l’image des Somaliens renvoyés à Mogadiscio.

En moins d’un an,
36 000 Somaliens, 163 000 Ethiopiens et 613 000 Yéménites expulsés

En moins d’un an, l’Arabie saoudite a expulsé 36 000 Somaliens, 163 000 Ethiopiens et 613 000 Yéménites, selon l’Organisation internationale des migrations.

Ceux qui sont en « règle » le sont en vertu de la Kafala, un système qui oblige les migrants à travailler sous l’égide d’un parrain, en général leur employeur. Ce système empêche les employés de changer librement de patron, même quand les conditions de travail sont devenues inacceptables pour eux, mais aussi de quitter le pays – leur passeport leur étant souvent « confisqué » à leur arrivée pour n’être rendu qu’au terme de leur période de travail. En 2014, 90 organisations non gouvernementales avaient appelé les pays du Golfe à réformer ce système.

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