
Face aux baisses successives de l'aide française et au désengagement de la France du terrain de la solidarité internationale, Action contre la faim, Equilibres & Populations, Global Health Advocates France, Médecins du Monde, Oxfam France, le Planning Familial, Sidaction et Solthis se sont réunis au sein du Collectif Santé 2015 pour défendre l'aide en santé.
C'est le moment de vérité!
Aujourd'hui, les chefs d'Etats du monde entier se réunissent pour adopter les Objectifs de développement durable (ODD), nouveau plan d'action universel pour éradiquer la pauvreté et réduire les inégalités dans le monde pour les quinze prochaines années. Cette feuille de route ambitieuse souhaite "permettre à toutes et tous de vivre en bonne santé et promouvoir le bien-être de toutes et tous à tout âge" en garantissant, entre autres, un accès universel à des soins de santé de qualité, la fin des épidémies de VIH/sida et de tuberculose et la fin des décès infantiles qui peuvent être évités d'ici 2030.
En quinze ans, les Objectifs du Millénaire pour le développement (OMD), qui ont précédé les ODD, ont contribué à une mobilisation financière et politique sans précédent et créé un élan en faveur de la santé mondiale. De nombreux progrès ont pu être réalisés: diminution de plus de 50% du taux de mortalité des enfants de moins de cinq ans, baisse de 45% du taux de mortalité maternelle, chute de 40% de nouvelles infections au VIH, diminution de moitié de la proportion de personnes atteintes de sous-nutrition.
Pourtant, le droit à la santé est aujourd'hui loin d'être une réalité pour tous, avec plus de 400 millions de personnes n'ayant pas accès aux services de santé les plus essentiels.
Pour permettre à toutes et tous de vivre en bonne santé, il n'y a pas d'alternative: la communauté internationale doit rester mobilisée, mettre à disposition des financements à la hauteur des besoins des populations et veiller à un suivi rigoureux de la mise en œuvre des ODD. Le contraire risque de priver de traitements et de soins des millions de personnes et de remettre en cause les progrès réalisés.
De nombreux pays du Sud se sont engagés à augmenter leurs ressources domestiques pour les services sociaux mais c'est un processus de longue haleine; l'aide publique au développement demeure indispensable pour atteindre les objectifs fixés. D'autres pays l'ont bien compris: le Royaume-Uni consacre désormais 0,7% de son RNB à l'aide publique au développement, l'Allemagne a prévu d'allouer, d'ici 2019, 8 milliards d'euros supplémentaires au développement, le Canada s'est engagé à verser 2,85 milliards de dollars canadiens sur cinq ans pour la santé des femmes et des enfants.
Dans ce "Concert des Nations", le bilan français est décevant. Loin d'atteindre l'engagement des 0,7%, la France n'alloue que 0,36% de son RNB à la solidarité internationale. Le budget de l'aide publique au développement est en baisse depuis quatre ans.
Ces réductions successives ont des conséquences directes et importantes sur les engagements de la France pour la santé mondiale; des inquiétudes planent quant au maintien rigoureux de l'engagement auprès du Fonds Mondial de lutte contre le VIH/sida, la tuberculose et le paludisme, aujourd'hui et après 2016. Nous n'avons pas d'indications sur les moyens de financer les politiques en faveur de la couverture sanitaire universelle, et en faveur de la santé et droits sexuels et reproductifs ainsi que de la santé infantile et la lutte contre la sous-nutrition après 2015 et l'Initiative de Muskoka.
Au total, ce sont aujourd'hui près de 83 millions d'euros promis qui n'ont pas été versés à différentes initiatives de santé en 2015.
Depuis plusieurs mois, nos associations réunies au sein du Collectif Santé 2015 alertent le gouvernement quant aux réductions successives des budgets dédiés à la santé des plus démunis et aux promesses non tenues.
Le projet de loi de finances pour 2016 donnera la première indication sur le niveau d'ambition de la France à contribuer au financement des ODD. C'est une échéance cruciale pour réaffirmer l'engagement français pour la santé mondiale.
Au-delà des discours et face à cet ambitieux programme de développement durable à l'échelle mondiale, la diplomatie française sera jugée sur sa capacité à impulser une dynamique positive, notamment en matière de santé. Cela signifie un engagement financier et politique croissant pour les quinze années à venir.
La France a un rôle d'exemplarité et de leader à tenir sur la scène internationale. A la parole, il faut que la France joigne les actes.