La dépense publique, cette autre courbe qui ne s'inverse pas

Des économies par milliards, mais une dépense publique qui continue d'augmenter : cette année encore, le gouvernement butera sur ce paradoxe budgétaire.

Source AFP

Le gouvernement va se féliciter d'avoir enclenché la baisse de la  dépense publique en proportion du PIB. Mais en  valeur absolue, la dépense publique de la France ne baisse pas.
Le gouvernement va se féliciter d'avoir enclenché la baisse de la dépense publique en proportion du PIB. Mais en valeur absolue, la dépense publique de la France ne baisse pas. © ISOPIX/SIPA

Temps de lecture : 3 min

Des économies par milliards, mais une dépense publique qui continue d'augmenter : cette année encore, le gouvernement butera sur ce paradoxe budgétaire, dont l'opposition mais aussi le patronat font leur miel. Il y a de quoi y perdre son arithmétique : la semaine prochaine, lors de la présentation du projet de loi de finances, Bercy va vanter ses économies prévues l'an prochain. Aux dernières nouvelles, elles devraient être d'un peu moins de 20 milliards d'euros.

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Le gouvernement va se féliciter d'avoir enclenché la baisse de la dépense publique en proportion du produit intérieur brut (PIB). Mais en valeur absolue, la dépense publique de la France, cumulant État, régimes sociaux et collectivités locales, ne baisse pas. En 2016 comme en 2017, elle devrait même grimper, d'au moins 1 % à chaque fois.

« Le tendanciel »

Seule exception : la dépense du seul État, qui, elle, a bel et bien commencé à baisser. La Cour des comptes pointait en juillet dernier cette exception française : la France est le seul pays européen à avoir augmenté sa dépense publique globale, corrigée de l'inflation, entre 2010 et 2014. Cette progression s'explique en partie par ce que les hauts fonctionnaires de Bercy appellent « le tendanciel ». C'est la force d'inertie de la dépense publique, qui même à politiques inchangées, progresse chaque année pour des raisons liées au vieillissement, ou encore à l'avancement des fonctionnaires.

Difficile de convaincre l'opinion publique ou les milieux économiques avec un tel concept, que la Cour des comptes qualifie pudiquement de « largement conventionnel ». C'est-à-dire que ce sont les pouvoirs publics eux-mêmes qui estiment l'évolution « spontanée » des dépenses, et donc l'effort qu'ils fournissent pour la contenir. Pour sortir de ces calculs sophistiqués, le président UMP de la commission des Finances de l'Assemblée nationale, Gilles Carrez, préconise de geler tout simplement l'ensemble de la dépense publique, en supprimant toute référence au « tendanciel ». Denis Ferrand, de l'institut de recherches économiques Coe-Rexecode, « préférerait une trajectoire en euros sonnants et trébuchants », pour dominer une dépense publique semblable à « un paquebot qu'il est très difficile de ralentir ».

« Choc de productivité »

Le Medef, principale organisation patronale, demande, lui, d'économiser plus de 135 milliards d'euros, dans un programme fourmillant de précautions de langage, entre « culture de réingénierie » et « choc de productivité » dans la sphère publique. Voilà qui permettrait, selon l'organisation patronale, de faire baisser la dépense mesurée en pourcentage du produit intérieur brut à 48 % en 2020, soit la moyenne actuelle en zone euro, contre plus de 57 % en 2014.

Pour Mathieu Plane, chercheur à l'OFCE, institut orienté à gauche, « baisser la dépense publique en valeur absolue, c'est de l'affichage politique ». « Il faut prendre en compte le vieillissement, le fait que les soins médicaux sont de plus en plus chers », autant de facteurs échappant à la calculette, souligne-t-il. Faire baisser radicalement la dépense publique, au-delà des « coups de rabot », impliquerait de bouleverser un modèle social élaboré au long du XXe siècle. En clair, non seulement augmenter l'âge de la retraite ou réduire le nombre de fonctionnaires, mais aussi confier au système privé des missions jusque-là prises en charge par la collectivité : Sécurité sociale, santé, voire éducation.

L'essentiel des dépenses publiques en France ne va plus depuis belle lurette aux fonctions dites « régaliennes » : diplomatie, défense, police et justice pèsent moins d'un dixième du total. Tandis que les dépenses de sécurité sociale, inexistantes il y a un siècle, dépassent celles de l'État depuis 1995. « On peut imaginer un tiers secteur, au-delà du public et du privé. L'avenir, ce ne sera pas de privatiser les universités, mais par exemple de créer des entités dotées de financement privé avec une mission de service public », estime Laurent Bigorgne, directeur de l'institut Montaigne, pour qui l'accumulation de dépense publique « étouffe les jeunes au profit des plus âgés. » « S'il faut mener un débat, ce n'est pas seulement en termes comptables », lance Mathieu Plane, de l'OFCE. « Ce sont des choix de société : est-ce que les actifs payent pour les retraités ? Est-ce que les bien portants payent pour les malades ? » demande-t-il, ajoutant : « Si on privatise, c'est un peu le système du chacun pour soi. »

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Commentaires (14)

  • chrisyl

    Comme le Keno : gagnant a vie... Sans travailler...

  • sergio46

    Nous sommes le seul pays au monde à entretenir, et plus que généreusement avec des avantages iniques et indécents, 1 million de fonctionnaires inutiles, pour plus de 60 milliards d'euros par an !
    Tout le reste n'est que bavardage sans intérêt ! Ite, missa est !
    90% des dépenses ne vont pas à des fonctions régaliennes et sont stupidement affectées des conditions totalement aberrantes accordées aux fonctionnaires !

  • TEMERAIRE 1

    Une fois de plus, on remporte la coupe !
    C'est la Commission Européenne qui le dit.
    Nos prélèvements sociaux représentent 16. 9% de notre PIB, loin devant nos adversaires. L'Allemagne peine à 15. 38% et le Danemark lui, est bon dernier avec 0. 81%.
    Les champions de l'assistanat et des impôts, c'est nous ! Cocorico.