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ll y a un peu plus de deux ans, un communiqué de presse de l'IFPEN (Institut français du pétrole et des énergies nouvelles) provoquait un mini déferlement médiatique dans le monde de la vulgarisation scientifique : on y apprenait que de l'hydrogène est émis non seulement au fond des océans – on le savait depuis les années 1970 par les travaux de l'Ifremer – et dans certaines chaînes de montagnes, mais aussi en plein milieu des continents. En outre, on avait déjà trouvé des gisements de ce gaz combustible, sans les avoir cherchés. En trouver d'autres, cette fois en les cherchant, semblait donc un pari prometteur. De fait, nos recherches effectuées en collaboration avec une équipe russe suggèrent que les sites où de l'hydrogène s'échappe du sol sont très nombreux sur les continents.
De l'hydrogène gazeux présent sur Terre en abondance, sans avoir à le fabriquer ? Si tel est bien le cas, le secteur de l'énergie pourrait être bouleversé. Ce n'est pas tous les jours qu'une nouvelle source d'énergie se révèle, et une telle découverte embarrasse les décideurs. En effet, lancer de grands programmes de recherche et développement sur un sujet pionnier, comme l'est celui de l'hydrogène naturel, est risqué : le succès pourrait ne pas être au rendez-vous (mais si on connaissait, avant de lancer un programme de recherche, son résultat final, la recherche n'existerait plus...).
Par ailleurs, après bientôt deux siècles de dépendance vis-à-vis des énergies fossiles (charbon et pétrole), envisager de nouvelles structures techniques et sociétales pour y intégrer l'hydrogène naturel est un défi. Il est plus aisé d'exploiter de vieilles sources d'énergie (le soleil, le vent) avec des technologies d'aujourd'hui (panneaux photovoltaïques, éoliennes)...
L'hydrogène qui nous occupe ici se réfère au composé gazeux H2, plus proprement nommé dihydrogène, et dont les molécules sont l'association de deux atomes

L'essentiel
- L'hydrogène utilisé aujourd'hui est produit à partir d'hydrocarbures ou par électrolyse de l'eau, et ne constitue donc pas une source d'énergie.
- Des émissions naturelles d'hydrogène ont été découvertes récemment dans plusieurs régions continentales.
- De tels sites d'émission, où le flux d'hydrogène est important, semblent nombreux.
- Des études sont nécessaires pour évaluer la possibilité d'exploiter industriellement cet hydrogène naturel, qui pourrait constituer une source d'énergie.
Références
Éric Deville est géologue à l'ifpen (Institut français du pétrole et des énergies nouvelles) et professeur à ifp School, à Rueil-Malmaison.
A. Prinzhofer et É. Deville, Hydrogène naturel - La prochaine révolution énergétique ?, Belin, 2015.
É. Deville et A. Prinzhofer, L'hydrogène naturel : une source potentielle d'énergie propre et renouvelable, Géologues, n° 185, pp. 105-110, 2015.
V. Milesi et al., Formation of CO2, H2 and condensed carbon from siderite dissolution in the 200-300 °C range and at 50 Mpa, Geochimica et Cosmochimica Acta, vol. 154, pp. 201-211, 2015.
N. Larin et al., Natural molecular hydrogen seepage associated with surficial, rounded depressions on the European craton in Russia, Natural Resources Research, publié en ligne le 15 novembre 2014.