Réfugiés : Total voit plus loin

Tout a commencé aux Rencontres franco-allemandes d'Evian, début septembre. Remués par le spectacle de ces milliers de réfugiés errants, Patrick Pouyanné et Benoît Potier, respectivement patrons de Total et d'Air Liquide, décident d'agir. Mais comment ? « Ce que l'on souhaite faire concrètement, ce n'est pas simplement un chèque à un organisme tiers », explique le DG du géant pétrolier. Hormis leurs produits et services, les deux entreprises proposent leurs bâtiments et leur logistique aux ONG et à l'Etat. « Total se sent d'autant plus concerné que la compagnie est née en Irak en 1924 avant d'essaimer au Moyen-Orient (Syrie, Lybie etc.). Dans ces pays, travaillent ou travailleront de nombreux salariés du groupe », décrypte le porte-parole officiel de Total, non sans rappeler la relation particulière de l'ancien PDG, Christophe de Margerie, avec cette région.

Des solutions d'hébergement

De retour au siège, le patron de Total a mobilisé le secrétariat général du groupe et le service RH avec une consigne : concrétiser « vite » des solutions d'hébergement. Son idée est d'ouvrir les centres de vacances du groupe pour accueillir 300 réfugiés, mais la mise en oeuvre n'est pas simple. Consultés sur la démarche, le comité d'entreprise, ainsi que les représentants du personnel, gestionnaires de ces bâtiments, ont évidement approuvé sans réserve. Reste à obtenir l'approbation des maires des communes concernées. Si ces élus n'ont pas le droit de sélectionner par confession, astreints à l'obligation d'accueillir tout réfugié selon les termes de la Convention de Genève, ils peuvent toutefois botter en touche pour des questions de sécurité ou de budget. Pour les convaincre, Total s'est d'ores et déjà engagé à prendre en charge tous les frais afférents (repas, vêtements, cartes prépayées, moyens de communication etc.). En attendant - en concertation avec la Fondation Total - le groupe oeuvre au côté de la Croix-Rouge pour aider au regroupement des familles séparées et envisager la scolarisation des enfants. Mais Total voit déjà plus loin et réfléchit aux modes d'enseignement du français et de l'anglais aux adultes « car ils ne pourront pas rester dans ces centres ». L'ambition annoncée de Patrick Pouyanné est de dispenser des formations qualifiantes, voire de proposer des emplois. « Dans les raffineries qui travaillent en 3×8, nous avons en permanence de nombreux besoins », lâche le porte-parole. « On mettra les moyens qu'il faudra », promet Patrick Pouyanné qui suit personnellement jour par jour l'état d'avancement du projet. « Sans enjeu d'image, ni arrière-pensée fiscale », insiste le porte-parole officiel. La Croix-Rouge confirme : « Ce n'est pas un coup de com car les entreprises qui viennent à nous aujourd'hui sont nos partenaires traditionnels. »