Palestine : la carte de la reconnaissance

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Palestine : la carte de la reconnaissance

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Carte. Cette carte interactive fait le point sur la reconnaissance internationale de l'Etat palestinien, et sur ce qu'elle permet d’espérer pour la paix.

Un drapeau hissé. Sera-ce le seul bénéfice de cette 70e session de l’Assemblée générale des Nations unies pour la Palestine ? Et si le symbole comptait, finalement ?

La stratégie alternative de la diplomatie

D'un côté, l’enterrement des accords d’Oslo 20 ans après leur signature, la poursuite de la colonisation dans les territoires palestiniens, la crispation de Netanyahou, la décrédibilisation du Hamas et du Fatah, et la violence, toujours, dans les rues de Jérusalem. De l’autre, la Palestine déclarée "Etat observateur" à l'ONU en 2012, membre de la Cour pénale internationale_ en 2015, et reconnue par deux nouveaux gouvernements cette année :_ le Vatican et Sainte-Lucie , haussant le nombre de pays reconnaissant l'Etat palestinien à 137 selon la mission permanente de l’Etat palestinien à l’ONU. Devant l’échec des négociations, et prenant acte de sa faiblesse militaire, l’Autorité palestinienne opte à la fin des années 2000 pour une stratégie offensive alternative : la voie diplomatique de la reconnaissance internationale, qui passe par l’ONU. Cette 70e session aura vu pour la première fois se lever les couleurs du drapeau palestinien, tandis que Mahmoud Abbas promettait un discours “explosif”, qui n'a fait que réaffirmer la voie de la reconnaissance internationale.

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Cette carte présente l’évolution de la reconnaissance internationale de l’Etat palestinien . Survolez ou cliquez sur les pays pour obtenir des informations précises sur les dates de reconnaissance, zoomez et circulez dans la carte :

Trois vagues de reconnaissances internationales_ :_

  1. **1988-1989 : La solidarité des "non-Occidentaux".**En novembre 1988, Yasser Arafat déclare à Alger l'indépendance de la Palestine. 83 pays reconnaissent l'Etat palestinien dans la foulée. Parmi eux, de nombreux pays de la Ligue arabe, des gouvernements asiatiques, africains et d'Europe orientale.
  2. 2008-2013 : L'Amérique latine s'émancipe de la politique de Washington. En 5 ans, 16 des 19 pays d’Amérique latine reconnaissent la Palestine. “Il s’agit d’un moyen pour les États latino-américains de mettre en scène leur autonomie en matière de politique étrangère, et plus largement, d’exister sur la scène internationale” selon la politiste brésilienne Cécilia Baeza dans la revue Mouvements (avril 2013).
  3. ** 2014-2015 : L'Europe en mouvement ?** Le Vatican, qui avait reconnu Israël en 1993, ainsi que Sainte-Lucie, viennent de reconnaître l'Etat palestinien, tandis que fin 2014, un premier pays de l'UE, la Suède, proclamait officiellement sa reconnaissance. L'année dernière, les Parlements européen, français et britannique votaient leur soutien à une proclamation gouvernementale, qui, seule, pourrait donner une suite légale aux résolutions des assemblées. Laurent Fabius a répondu que la reconnaissance française se ferait en temps et en heure, dans la perspective de " la recherche de la paix".

La reconnaissance, une étape vers la paix ?

Dès 1980, la CEE veut la création d'un Etat palestinien dans les frontières de 1967, les accords d’Oslo le prévoient à partir de 1999 il devait être créé en 2005 au terme de la « feuille de route »... Pivot de la négociation de la paix, la "solution des deux Etats" qui implique la reconnaissance de la Palestine est un message envoyé aussi bien à l'Autorité palestinienne qu'à la diplomatie israélienne. Benyamin Netanyahou continue aujourd'hui à s'opposer à cette dynamique diplomatique. Le processus de négociation s'enfonçant dans l'impasse, la reconnaissance ne perd pas pour autant toute sa valeur, et notamment symbolique.

La puissance symbolique de la reconnaissance

En droit international, reconnaître un Etat revient à prendre acte de la réunion de ses trois composantes :

  • un peuple : comme le rappelle Philippe Moreau Defarges,chercheur de l'IFRI, si l'idée d'un peuple palestinien est aujourd'hui acquise, ce n'était pas le cas en 1948, lorsque n'étaient considérés que les "Arabes de Palestine",
  • un gouvernement : l'Autorité palestinienne, démocratiquement élue, et présidée par Mahmoud Abbas.
  • un territoire : ce dernier point est problématique, la discontinuité territoriale entre Gaza, la Cisjordanie et Jérusalem Est étant aujourd'hui constitutive du territoire palestinien.

La fragmentation territoriale(délicates frontières de 1967, divers régimes juridiques des territoires selon les Accords d'Oslo, statut de Jérusalem...) compromettant l'exercice d'un pouvoir étatique, reconnaître l'Etat palestinien revient pour la communauté internationale à se placer avant tout sur un plan symbolique. Toutes proportions gardées, la revendication actuelle de l'"Etat islamique " le montre bien : la portée du label étatique reste inégalée sur le plan géopolitique. Etre reconnu comme Etat, c'est être considéré comme un égal sur la scène internationale, comme un interlocuteur légitime, comme une autorité apte à recevoir et à gérer un soutien financier (Unesco, ONU...), et au plan moral, selon le philosophe Paul Ricœur, être reconnu c'est devenit un sujet de réciprocité, de mutualité, voir à terme, de bienveillance (Parcours de la reconnaissance, trois études , Stock, 2004).

Pour la seule résolution permettant à la Palestine de lever son drapeau à l'ONU , huit pays, dont les Etats-Unis, Israël, le Canada et l'Australie, ont voté contre, dénonçant une "mesure symbolique incapable de faire avancer la paix". Plusieurs pays européens dont le Royaume-Uni et l'Allemagne se sont abstenus. Quelle meilleure preuve, justement, de la portée des symboles ?

A écouter sur France Culture :

Le reportage de la Rédaction

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