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Sécurité sociale : le prix des médicaments de nouveau dans le collimateur

•Pour la deuxième année consécutive, le chiffre d'affaires de l'industrie va devoir baisser de 1 % en 2016.•Des surtaxes seront appliquées sur les revenus excédents.

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Par Solveig Godeluck

Publié le 5 oct. 2015 à 01:01

Pour les comptes de la Sécurité sociale, le médicament est à la fois le problème et la solution. C'est le problème, car le coût des traitements est en train d'exploser partout dans le monde avec le retour de l'innovation de « rupture ». Mais c'est aussi une partie de la solution, parce qu'en période de vaches maigres, l'assurance-maladie est outillée pour couper dans ces dépenses-là.

Le projet de budget de la Sécurité sociale pour 2016 en est l'illustration. Pour la deuxième année consécutive, il fixe un objectif de baisse de 1 % du chiffre d'affaires net de remises des industriels du médicament. Ce taux négatif, appelé « taux L », « traduit l'objectif gouvernemental de stabilisation des dépenses de remboursement de l'ensemble des médicaments par l'assurance-maladie » sur trois ans, expose l'avant-projet de loi. En effet, comme la part des traitements intégralement financés par l'Etat progresse avec le vieillissement et les affections chroniques, il faut compenser ce surcoût en abaissant les prix et les volumes par ailleurs.

Alors que l'ensemble des dépenses de santé sont pilotées à l'aide d'un « objectif national » (l'Ondam) de croissance des enveloppes (hôpital, soins de ville, médico-social), mais pas limitées autoritairement dans le médicament, le législateur a ajouté un couperet. Si le taux de -1 % n'est pas respecté, les revenus des industriels qui dépassent seront surtaxés de façon exponentielle.

Mécanique parafiscale

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Depuis l'année dernière, les remises ont été intégrées dans l'assiette de la taxe, ce qui la rend encore plus offensive. Enfin, pour 2014-2016, l'arsenal de régulation s'est enrichi d'un « taux W », qui cible les nouveaux traitements contre l'hépatite C. Le couperet tombe à 700 millions d'euros de remboursements annuels. En 2014, où il n'était encore qu'à 450 millions d'euros, il a été largement dépassé, ce qui a rapporté 76,5 millions d'euros à l'Assurance-maladie selon le Comité économique des produits de santé. En 2015, les taux W et L (l'un est enchâssé dans l'autre) auraient un rendement de 200 millions d'euros.

Cette mécanique parafiscale inquiète les industriels. « D'un côté, la ministre nous annonce une stabilité des dépenses remboursées sur trois ans. De l'autre côté, nous ne pouvons pas anticiper ce qui va nous arriver en 2016 », regrette Eric Baseilhac, directeur des affaires économiques au LEEM, le syndicat des industriels du médicament. Une fois ôtés les remises et les médicaments génériques (qui sont considérés comme un régulateur du système en raison de leurs prix moindres), l'assiette de la taxe est floue. Au LEEM, on l'estime à une vingtaine de milliards d'euros, pour un chiffre d'affaires total du médicament remboursable de 25,2 milliards en 2014. « Un industriel ne pouvant pas savoir quelles remises ont été concédées par ses concurrents ne peut pas estimer et donc provisionner ce qu'il devra au titre du taux L », souligne Eric Baseilhac.

Les industriels éprouvent un sentiment d'injustice car ils paient collectivement le succès d'un seul laboratoire, Gilead, qui fabrique un traitement très cher contre l'hépatite C. De plus, les baisses de prix s'appliquent sur un chiffre d'affaires qui intègre la marge des distributeurs et celle des pharmaciens, régulées directement par les pouvoirs publics. Alors qu'ils négocient un nouvel accord-cadre du médicament, les industriels cherchent donc une solution pour échapper à la pérennisation du taux W. Et pour éviter que cet outil fasse des petits ailleurs que dans l'hépatite C.

Des baisses de prix à tous les étages

En 2016, le projet de loi de financement de la Sécurité sociale affiche 550 millions d'euros de baisse du prix des médicaments.Selon le LEEM, il faut y ajouter quelque 285 millions d'euros de baisses comprises dans l'enveloppe « promotion des génériques », et environ 60 millions d'euros dans celle de la « liste en sus » gérée par les hôpitaux. Au total, l'action sur les prix « rapporterait » donc 900 millions d'euros.

Solveig Godeluck

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