
Génocide des Yézidis: les chiffres réactualisés au 1er octobre 2015
Muhammad Haji Salih est ministre des Martyrs et des victimes d'Anfal, au sein du gouvernement de la région autonome du Kurdistan. Le jeudi 1er octobre 2015, à Garmiyan, il a rendu public un nouveau bilan sur le drame des Yézidis, en ouverture d’une conférence sur le génocide.
Ce bilan indique que 430.000 “Kurdes yézidis” ont été chassés de leurs maisons par Daesh en août 2014.
“Au moins 75% des réfugiés de Shingal ont fui vers la montagne quand les jihadistes ont attaqué la ville,” a indiqué Muhammad Haji Salih, avant de préciser que plus de 600 enfants et personnes âgées sont morts de faim et de soif dans ces montagnes où Daesh a encerclé les survivants des massacres pendant plusieurs mois. Des combattants kurdes de Rojava avaient heureusement réussi à ouvrir une brèche pendant quelques semaines, permettant la fuite de 250.000 Yézidis vers les zones kurdes où ils ont trouvé refuge dans des camps de fortune. Mais la brèche s’est refermée fin septembre 2014. Il a fallu 8000 peshmergas soutenus par les avions de la coalition pour lever définitivement le siège mi décembre 2015 et réunir les rescapés.

Après de longs mois d’enquête auprès des survivants, le rapport dévoilé le 1er octobre 2015 par le ministre a confirmé la mort de 1800 Yézidis. Parmi eux figurent les 400 hommes du village de Kojo abattus sur place par les terroristes. Le territoire reconquis depuis par les peshmergas et le YPG a permis de retrouver le charnier où les 400 victimes ont été enterrées par Daesh.
Côté otages, la commission d’enquête a confirmé un chiffre qui circulait depuis longtemps, à savoir que plus de 5.000 femmes et enfants ont été enlevés par les terroristes. Depuis, près de la moitié ont été libérés par les peshmergas lors de combats avec Daesh ou grâce à la participation financière du KRG et de riches Kurdes qui paient des passeurs pour faire évader des Yézidis.
Muhammad Haji Salih a enfin affirmé que 14 sanctuaires yézidis, certains datant de plusieurs milliers d'années, avaient été détruits par les terroristes.

Photos du Phénix kurde dans un camp de déplacés yézidis près de Shekhan (décembre 2014).
La cour pénale internationale saisie par les Yézidis
Aujourd’hui, les Yézidis exhortent la Cour pénale internationale (CPI) d'enquêter sur les jihadistes qui ont commis des crimes de génocide et pratiqué l'esclavage sexuel sur les otages. Avec le soutien du gouvernement régional du Kurdistan d'Irak, deux groupes ont soumis un rapport à la Cour basée à La Haye avec de nombreux documents pour étayer leur plainte. Ils évoquent des “atrocités systématiquement commises au titre du génocide”, estimant que “ces crimes relèvent de la compétence de la CPI”, comme l’a réaffirmé Mourad Ismael, de l'organisation des droits Yézidis “Yazda”, devant les médias.
Le rapport de cette organisation apporte des éléments sur l’exécution sommaire de plus de 700 hommes Yézidis, le meurtre des malades et des personnes âgées, le viol et l'esclavage de milliers de femmes, et l'enlèvement de leurs enfants, qui sont obligés de se convertir à l'islam et de se battre pour Daesh, groupe terroriste qui a ouvertement dit qu'il veut éliminer la religion yézidie, qu'il considère comme païenne.
"La communauté Yézidie a été brisée par les crimes fous des terroristes qui cherchaient à anéantir les Yézidis sur la base de leur caractère distinctif religieux”, insiste Mourad Ismael.
Yazda estime que quelque 3.000 personnes, dont des enfants et des personnes âgées, ont été tuées, bien que le nombre exact n’est pas clair (NDLR: la commission d’enquête, rappelons-le, n’a confirmé l’identité que de 1800 Yézidis assassinés… mais il y a des disparus).
L'organisation déclare que 12 fosses communes ont déjà été trouvées autour de la zone du Mont Shingal.
Yazda estime également que plus de 5.200 personnes ont été prises en otage pendant les attaques en août 2014 (chiffre qui rejoint celui du KRG), mais qu’environ 1900 ont réussi à s’échapper (le KRG cite le chiffre de 2200). Les autres sont toujours détenues.
Mourad Ismael se dit “confiant”, estimant que, "une fois que le tribunal aura lu les détails du rapport, il se déclarera compétent sur l'affaire”.