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Les liens étroits entre Merkel et « das Auto »

En Allemagne, le secteur bénéficie d'une grande influence auprès des élus.

Par Thibaut Madelin

Publié le 5 oct. 2015 à 01:01

C'était en septembre 2008 à Wolfsburg. Angela Merkel était accueillie par quelque 20.000 employés dans l'usine historique du groupe automobile. « Le gouvernement soutient Volkswagen. VW est une partie très importante de l'Allemagne, une partie connue dans le monde entier, lance la chancelière à côté du patron, Martin Winterkorn. A l'étranger, VW est un des symboles de l'Allemagne pour des milliards de gens. Et ça doit continuer ! ».

Dimanche, la chancelière a juste tenté de limiter les dégâts en défendant le made in Germany : « Je pense que la réputation de l'industrie allemande, la confiance dans l'économie allemande, n'est pas ébranlée [...] », a-t-elle déclaré à la radio, soucieuse de garder ses distances avec un dangereux scandale.

En 2008, elle avait pris directement parti pour le constructeur contre le instances européennes. Alors que la Cour de justice de l'Union critiquait la loi Volkswagen qui limite les droits de vote d'un actionnaire dans le capital à 20 %, soit le montant détenu par l'actionnaire public, le Land de Basse-Saxe, Angela Merkel était passé outre: « il y aura à l'avenir une loi Volkswagen ! »

Tout chancelier se doit de défendre l'industrie automobile, qui génère au total un emploi sur sept en Allemagne. A fortiori son leader. Mais, en plein scandale Volkswagen, la bienveillance du pouvoir politique pour cette industrie stratégique pourrait se retourner contre lui. A-t-il fermé les yeux sur la hausse manifeste des émissions de polluants des moteurs Diesel depuis 2007, comme le reproche Jürgen Resch ? « Le gouvernement s'est mis à genou devant les "Autokonzernen" », accuse le directeur de l'association environnementale DUH.

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Une chose est sûre, les liens entre l'industrie automobile et la politique sont étroits. Témoins : Timo Steg, ancien porte-parole du chancelier social-démocrate (SPD) Gerhard Schröder, puis d'Angela Merkel dans la grande coalition, est aujourd'hui directeur des relations institutionnelles de Volkswagen. Eckart von Klaeden, ancien conseiller de la chancelière, occupe le même poste chez Daimler. Avant lui, Martin Jäger, le porte-parole du ministre des Finances, Wolfgang Schäuble, a eu la même fonction.

Prendre du recul

La Fédération de l'industrie automobile allemande (VDA), présidée par Matthias Wissmann, ancien ministre des Transports CDU, rejette les accusations de conflits d'intérêts. « Dans d'autres pays, le passage de la politique à l'économie est beaucoup plus naturel que chez nous », se défend la VDA, qui milite pour des tests d'échappement réalistes... « L'industrie automobile est une des plus influentes en Allemagne », constate Christina Deckwirth, de l'association Lobby Control, qui appelle le gouvernement à prendre du recul. « Elle est une vitrine de l'économie et fait partie de la raison d'Etat. Du coup, la politique ne la met pas sous pression, mais au contraire la protège. »

Outre la loi Volkswagen qui a résisté aux assauts de Bruxelles, le coup de force d'Angela Merkel reste son intervention en 2013 contre un projet de normes sur les émissions de CO2 des véhicules. Alors qu'un pénible compromis entre les 28 Etats membres avait été atteint, la chancelière était intervenue au dernier moment pour le torpiller. Même le commissaire européen Günther Oettinger, pilier de la CDU, a ensuite admis que la ficelle était un peu grosse. Quelques semaines plus tard, l'annonce d'un don de la famille Quandt, actionnaire de BMW, à la CDU, déclenchait un violent débat en Allemagne.

Correspondant à Berlin Thibaut Madelin

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