Les vives tensions entre Palestiniens et Israéliens ont gagné mercredi le centre même d'Israël tandis que la Cisjordanie continuait à être agitée par des violences au cours desquelles trois Palestiniens ont été blessés, apparemment par des soldats israéliens infiltrés dans les rangs des manifestants.

Dans la succession des attaques qui suscite depuis jeudi des comparaisons avec les intifadas de 1987 et 2000, des images hors du commun sont venues de Cisjordanie occupée et du barrage de Bet El, théâtre d'affrontements quasiment quotidiens.

Quatre hommes, apparemment des «moustaaribine», les membres d'unités spécialisées infiltrées en déguisement parmi les manifestants, ont ouvert le feu sur des lanceurs de pierres parmi lesquels ils s'étaient auparavant fondus en masquant eux aussi leurs visages sous le keffieh, selon les images photos et vidéo capturées par l'AFP.

Les «moustaaribine» avaient soudain entrepris d'arrêter des meneurs en sortant leurs pistolets quand les Palestiniens, comprenant le subterfuge, leur ont lancé des pierres. Ils ont alors tiré, blessant trois manifestants, dont l'un très gravement.

L'armée israélienne, comme d'autres forces de sécurité, dispose bien de telles unités, a dit à l'AFP un porte-parole, Arye Shalicar, sans confirmer que les hommes ayant opéré à Bet El en faisaient partie. Il a aussi indiqué qu'un blessé de Bet El entre les mains d'Israël était dans un état critique.

Les autorités israéliennes et palestiniennes semblaient depuis mardi soir tenter de calmer les esprits. Mais les attaques commises par des Palestiniens isolés, souvent jeunes, se sont succédé au cours de la journée.

État d'alerte maximale 

Devant cet accès de violences, le premier ministre israélien Benyamin Nétanyahou a reporté sa visite prévue jeudi en Allemagne. Il a appelé les Israéliens à être en «état d'alerte maximale» face au risque d'attentats.

Pour la première fois depuis le début de l'accès de fièvre, un Palestinien de Hébron âgé de 17 ans, Amjad Hatem Al-Jundi, a été tué, loin de la Cisjordanie et de Jérusalem, dans le centre d'Israël après avoir attaqué et légèrement blessé un soldat israélien.

Un autre Palestinien également originaire d'Hébron, poudrière de Cisjordanie, a modérément blessé avec son couteau un juif orthodoxe mercredi soir dans un centre commercial de Petah Tikva, près de Tel Aviv, avant d'être maîtrisé.

La Vieille ville de Jérusalem et ses environs immédiats ont connu leurs troisième attaque au couteau de la part de Palestiniens contre des juifs depuis cinq jours. L'auteur, une jeune femme de 18 ans de Jérusalem-Est, Shurooq Dweiata, a poignardé dans le dos sa victime qui a réussi à sortir son arme et à tirer. La jeune femme est dans un état critique.

C'est la veille seulement qu'Israël avait rouvert aux Palestiniens la Vieille ville, située à Jérusalem-Est, partie palestinienne de Jérusalem annexée et occupée par Israël.

Un Palestinien de 19 ans y avait mortellement poignardé samedi un soldat juif et un rabbin, avant d'être abattu. L'auteur d'une autre attaque, contestée par sa famille, a également été tué le lendemain.

Quatre Israéliens et cinq Palestiniens sont morts depuis jeudi. Des centaines de Palestiniens ont été blessés alors que se multipliaient en Cisjordanie et à Jérusalem-Est les confrontations entre de jeunes lanceurs de pierres et les soldats ou policiers israéliens, qui ripostent de plus en plus systématiquement à balles réelles.

Une Israélienne sauvée des Palestiniens 

Des affrontements ont été rapportés, non seulement de Bet El, mais aussi de Hébron ou Jéricho où un jeune a été atteint d'une balle dans la région du coeur.

Les violences entre Palestiniens et colons israéliens redoublent.

Un jeune Palestinien a été grièvement blessé mercredi par des tirs de colons près de Bethléem, a indiqué à l'AFP le Croissant-Rouge.

Dans le même secteur, un groupe de Palestiniens a cherché à extraire une Israélienne de son véhicule et peut-être à l'enlever, a indiqué un porte-parole de l'armée israélienne. Elle a été sauvée par les tirs en l'air d'autres colons.

Une grande partie des 400 000 colons, qui coexistent difficilement avec les 2,8 millions de Palestiniens de Cisjordanie, est en colère depuis le meurtre d'un couple assassiné jeudi dans une attaque attribuée par Israël à une cellule du mouvement islamiste Hamas.

Les Palestiniens, les jeunes surtout, sont frustrés ou exaspérés après des décennies de vaine attente d'un État indépendant et d'épreuves permanentes liées à l'occupation. La querelle autour de l'esplanade des Mosquées, lieu saint pour les musulmans comme pour les juifs, catalyse les animosités.

Après avoir surenchéri dans les déclarations musclées, M. Nétanyahou a paru soucieux mercredi de ne pas enflammer les esprits, et a prôné «sang-froid et résilience».

Et dans un communiqué à Bruxelles, la chef de la diplomatie européenne Federica Mogherini a appelé M. Nétanyahou et le président palestinien Mahmoud Abbas «encourager les deux camps à la retenue et à éviter des actions qui exacerbent les tensions».

PHOTO AFP

Des policiers israéliens clandestins arborant le keffieh détiennent un manifestamt palestinien.