Sonita Alizadeh n'était pas destinée à cette vie. Il n'était pas écrit que cette jeune Afghane, 18 ans, vienne aux Etats-Unis pour poursuivre sa passion, la musique et surtout le rap, loin de son pays et de sa famille. Loin aussi du mariage forcé qui l'attendait. C'est contre cette pratique qu'elle rappe, justement, dans sa chanson intitulée Filles à vendre, dont le clip a été diffusé ce week-end lors du sommet Women in the World, à Londres. Le mois prochain, un film qui lui est consacré doit aussi être montré à un festival du documentaire (IDFA), à Amsterdam.

Publicité

"Laissez-moi murmurer ces mots. Personne ne doit m'entendre parler des filles que l'on vend. Ma voix ne doit pas être entendue, car elle est contre la charia. Les femmes doivent se taire. C'est une tradition chez nous", scande-t-elle, un code barre tatoué sur le front, et un oeil au beurre noir.

Dans les médias américains, elle raconte avoir écrit ce cri de colère après que ses parents ont tenté, pour la deuxième fois, de lui imposer un mari. Réfugiée en Iran après y avoir échappé une première fois, à l'âge de 10 ans, elle a vu sa mère lui proposer une alliance de ce type alors qu'elle avait 16 ans. Une alliance qui impliquait que le futur mari l'achète, pour quelque 9000 dollars...

"Comment peux-tu vendre ta fille?"

"Je lui ai demandé: comment peux-tu vendre ta fille? Elle m'a répondu que c'est une tradition", décrit Sonita Alizadeh à CNN. "Dans mon pays, une gentille fille doit rester silencieuse. Elle ne parle pas de son avenir et doit écouter sa famille même quand on lui dit d'épouser ce type, ou celui-ci, ou celui-là. Une gentille fille est comme un chien, avec qui on joue. Mais je suis une chanteuse et je veux un avenir radieux", poursuit-elle auprès du New York Times.

"Ma musique était le cauchemar de ma mère. Maintenant, elle est l'une de mes plus grands fans", assure-Sonita Alizadeh, espérant faire évoluer les moeurs en Afghanistan. Emue par le sort des jeunes filles afghanes, elle est révulsée par l'histoire de Farkhunda, une jeune femme de 27 ans battue à mort, brûlée et jetée dans le lit d'une rivière à Kaboul, par une foule furieuse qui l'accusait à tort d'avoir brûlé le Coran, en mars dernier. La jeune femme se sent en sécurité dans l'Utah, où elle étudie, mais veut rentrer en Afghanistan un jour. Pour rapper pour les droits des femmes, à la barbe des talibans.

Publicité