Chaque vendredi, le Süddeutsche Zeitung Magazin publie un entretien sans paroles : un invité est photographié en train de mimer les réponses aux questions qui lui sont posées. Un exercice totalement original que Courrier international vous propose de découvrir en compagnie du journaliste italien Roberto Saviano.

Né le 22 septembre 1979 à Naples
Profession : écrivain et journaliste
Formation : philosophie
Statut : en cavale

Roberto Saviano a ruiné la vie de sa famille. C’est ainsi qu’il voit les choses. “Avoir un fils ou un frère qui mène la vie que je mène, ça complique tout”, a-t-il récemment confié lors d’un entretien. Il s’écoule souvent des mois avant qu’ils puissent se réunir, toujours avec cette tension, “à laquelle s’ajoute la conscience, dit Saviano, d’avoir entraîné ma famille avec moi dans un monde d’angoisse et de doute”. Par amour pour eux, il ne recommencerait pas, et pourtant : il ne regrette rien. Paradoxal, mais c’est ainsi quand on s’en prend à la mafia napolitaine, comme le fit Saviano en 2006 avec son livre Gomorra : dans l’empire de la Camorra [sorti en français chez Gallimard]. Même s’il est libre de ses mouvements, il n’est plus un homme libre. Saviano vit caché, il change régulièrement de domicile. Pour tous ses rendez-vous, tous ses voyages, il doit consulter les services de sécurité et le ministère de l’Intérieur de chaque pays où il se rend ; dès qu’il y met un pied, les hôtels et les restaurants sont évacués et fouillés à la recherche d’une bombe ; deux gardes du corps sont présents à notre séance photo. L’adaptation de son livre, la série télé italienne Gomorra, qui a recueilli beaucoup de bonnes critiques, est diffusée à partir [du 8 octobre] sur Arte.

- Publié le 2 octobre 2014 dans le Süddeutsche Zeitung Magazin.