Chambon, le village sauvé par les migrants
Cela fait douze ans que Chambon, village de Lozère, héberge des réfugiés. Une manne pour cette commune rurale de 285 habitants.

Ã? mille mètres d'altitude, aux confins de la Lozère et de la Haute-Loire, Chambon-le-Château est un havre de paix pour réfugiés... depuis douze ans. Couples et familles arrivés de pays en guerre ou persécutés sont hébergés durant quelque temps au Cada, centre d'accueil des demandeurs d'asile, géré par l'association France Terre d'asile. Cinquante-cinq personnes sont installées dans des maisons de ce village de 285 habitants, 30 autres non loin de là, à Langogne.
« Ils sont comme dans un sas, avec une volonté farouche de se projeter sur l'avenir. Ici, ils se reconstruisent dans la tranquillit?, explique Peggy Campel, l'institutrice qui accompagne les petits migrants en langue française. Grâce à leur présence, l'école compte 44 élèves et 4 instituteurs. C'est le principal vecteur d'intégration. « Les enfants entre eux ne font pas de différence. Mais mon fils a dû intégrer que ses copains n'étaient là que pour une courte durée », explique la maman de Mathis, qui a fêté son huitième anniversaire avec des petits camarades de quatre nationalités.
Une commune mieux dotée
En 2003, Guy Martin, le maire d'alors, avait vu ce centre d'accueil comme une bouffée d'air frais. Une arrivée vitale après la fermeture d'une laiterie, d'une scierie, d'un centre pour adolescents et la perte au total de 80 emplois.
Avec le temps, une coexistence pacifique, polie, conviviale par moments s'est organisée. Des réfugiés ont grossi les rangs de l'équipe de foot. L'un est élu au conseil des parents. « Ils démontrent chaque jour leur volonté d'intégration. L'été, ils sont actifs dans l'organisation des fêtes. L'hiver, ils déneigent les trottoirs. Mais ils n'ont pas le droit de travailler », rappelle Sara Poimboeuf, la directrice du Cada. « Depuis douze ans, il n'y a jamais eu d'incident. Les réfugiés sont respectueux », confirme un chauffeur à la retraite qui rentre ses bûches pour l'hiver.
Mais toute hostilité n'a pas disparu avec le temps. « Ils reçoivent de l'argent de l'Etat pour ne rien faire. Ils sont sur des bancs avec des téléphones portables que nous ne pouvons pas nous offrir », râle un artisan en observant les migrants sur la place. « Ici, on ne se préoccupe plus des habitants ni même des touristes qui étaient moins nombreux cet été puisque toutes les maisons sont occupées par des réfugiés qui ne rapportent rien », enchaîne une habitante.
« Ces demandeurs d'asile nous apportent au contraire beaucoup, estime Michel Nouvel, l'actuel maire divers gauche. Cinquante-cinq personnes de plus dans une si petite commune, ce n'est pas neutre sur la dotation globale de fonctionnement, cela permet à la mairie et à des particuliers de toucher des loyers de maisons rarement louées à l'année. Nous avons conservé le médecin, le bureau de poste, la pharmacie, services utiles pour nos personnes âgées. Et ils s'intègrent bien », insiste l'élu.