C'est un revenant qui retrouve la parole. Il s’agit d’un homme qui s’est épuisé au pouvoir, qui a été essoré par son passage à Matignon et qui en est ressorti déçu par François Hollande.
Vous allez me dire qu'ils sont assez nombreux dans ce cas. Cet homme, c’est Jean-Marc Ayrault. Ces temps-ci, Jean-Marc Ayrault se met donc à reparler aux journalistes.
Quand on le rencontre, ce qui m’est arrivé bien sûr, on le retrouve tel qu’en lui-même : pudique, plutôt austère, et surtout, continuant de revendiquer sa « loyauté ». Jean-Marc Ayrault aime à répéter ce mot, « loyal », quand il parle de François Hollande.

Seulement, c’est connu, la loyauté ne paye pas en politique. Alors, dès qu’on gratte un peu, on se rend vite compte qu’Ayrault en a gros sur la patate. Ce qu’il n’a pas supporté pendant près de deux ans à Matignon, c’est le côté louvoyant du Président. Sa propension à dire un peu tout et son contraire, à tout le monde et en même temps. D’ailleurs, quand on demande à Jean-Marc Ayrault si François Hollande a été clair au moment de tel ou tel épisode, l’ancien Premier ministre a toujours la même mimique pour répondre : il soupire, lève les sourcils et finit par lâcher, du bout des lèvres : « Clair ? Enfin… Vous connaissez François ? »
Sur le fond, quels sont les reproches qu’il fait au chef de l’Etat ? En fait, Jean-Marc Ayrault a le sentiment d’avoir compté pour quantité négligeable. Il avait demandé à Hollande de réagir au moment de la publication du fameux tweet de soutien de Valérie Trierweiler, à l’adversaire de Ségolène Royal aux législatives, Hollande n’en a rien fait. Il l’a exhorté à s’appuyer sur le rapport de la Cour des Comptes pour noircir le tableau économique du pays, et le bilan de Sarkozy. Hollande a préféré recourir à la méthode Coué et annoncer une reprise qui n’est jamais venue…
Enfin, ce qui est sans doute la pire critique, Ayrault juge que François Hollande a été incapable de « donner du sens » à son action . Résultat, dépité, mais enfin bavard, Ayrault vient de dégainer un amendement au budget, pour unifier la CSG et l’impôt sur le revenu, qui a recueilli le soutien de… 137 députés PS, une bonne moitié du groupe !
Une façon de se préparer la conquête de la présidence de l’Assemblée où il compte bien remplacer Claude Bartolone à la fin de l’année. Depuis le perchoir, Ayrault pourra se transformer en mauvaise conscience du quinquennat. Il l’a commencé en Premier ministre de François Hollande, il le finira en Jiminy Cricket.
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