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Affaire Hollande-Gayet : les questions qui se posent

A qui appartient l'appartement de la rue du Cirque ? La sécurité du président est-elle défaillante ? L'affaire de la liaison supposée de M. Hollande avec Mme Gayet soulève de nombreuses questions.

Par  et

Publié le 13 janvier 2014 à 11h29, modifié le 07 mars 2014 à 12h48

Temps de Lecture 5 min.

François Hollande et Valérie Trierweiler le 6 avril 2013 à Tulle en Corrèze.

L'affaire de la liaison supposée de François Hollande avec l'actrice Julie Gayet soulève de nombreuses questions. Le Monde a enquêté sur les dysfonctionnements à l'Elysée liés à cette affaire.

  • A qui appartient l'appartement parisien de la rue du Cirque, dans le 8e arrondissement ?

Le propriétaire est un retraité âgé de 71 ans, Jean-Pierre Discazeaux. Retiré à Biarritz, il est représenté à Paris par un mandataire spécialisé dans la gestion de biens, la SARL Cassagne gestion immobilière. Celle-ci a signé un bail d'habitation, le 15 octobre 2011, avec la comédienne Emmanuelle Hauck, domiciliée auparavant dans le 17e arrondissement de Paris.

Joint par Le Monde, M. Discazeaux n'a pas souhaité s'exprimer, soulignant simplement qu'il avait longtemps habité l'appartement de la rue du Cirque, et qu'il entendait poursuivre en justice les organes de presse ayant attribué, à tort, la propriété du logement à une fortune du CAC 40 ou à des membres du grand banditisme.

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La comédienne Julie Gayet, amie d'Emmanuelle Hauck, travaillait régulièrement dans cet appartement, depuis que ses bureaux de la rue du Faubourg-Saint-Honoré faisaient l'objet de travaux. François Hollande s'est rendu une dizaine de fois dans cet appartement depuis l'automne 2013, d'après des éléments recueillis à l'Elysée par Le Monde. Le président, amateur de deux-roues, a utilisé, comme passager, un scooter appartenant à la flotte de l'Elysée, conduit par un membre de sa sécurité. Un second équipage assurait en outre la protection de M. Hollande.

  • Quel est le lien éventuel avec le banditisme corse ?

Il est indirect et fortuit. Il se trouve qu'Emmanuelle Hauck, née à Bastia, a vécu avec l'acteur Michel Ferracci, apparu notamment dans la série « Mafiosa », diffusée depuis 2006 sur Canal+. Or M. Ferracci a été condamné, au mois de novembre 2013, à dix-huit mois de prison avec sursis pour abus de confiance dans l'affaire du cercle Wagram. Il fut directeur des jeux de cet établissement, théâtre de détournements de fonds au profit de membres du gang corse de la Brise de mer.

Selon l'avocat de Michel Ferracci, Me Pierre Haïk, le couple s'est séparé il y a six ans. Depuis la fin de 2011, Mme Hauck occupait le logement de la rue du Cirque avec ses enfants, issus de sa relation avec M. Ferracci, et qui portent le nom de leur père. Cela explique que le nom de M. Ferracci apparaisse à cette adresse, sur la boîte aux lettres ainsi que dans les Pages blanches.

Par ailleurs, après sa rupture avec Michel Ferracci, Emmanuelle Hauck était devenue la compagne de François Masini, au profil éminemment sulfureux. François Masini a été tué par balle, sur une route de Haute-Corse, le 31 mai 2013. Dans le cadre de l'enquête sur cet assassinat, la police judiciaire a, ces derniers mois, interrogé à trois reprises, en qualité de témoin, Mme Hauck. Celle-ci n'est pas connue par ailleurs des services de police.

  • Le service de sécurité du président a-t-il été défaillant ?

François Hollande est constamment protégé. Il a notamment à ses côtés deux hommes, des policiers de confiance qu'il a personnellement choisis. Ceux-ci l'escortent dans tous ses déplacements privés. C'était le cas lors de ses visites rue du Cirque. Mais ces policiers n'ont pas enquêté sur le passé de la locataire de l'appartement, ni sur ses liens avec des individus au profil sulfureux. Ils n'ont pas su, non plus, repérer les paparazzi qui traquent François Hollande. Ceux-ci auraient loué un appartement à proximité pour les besoins de leur reportage.

Cela faisait de longs mois, déjà, que la rumeur parisienne propageait l'existence supposée d'une liaison entre M. Hollande et Mme Gayet. La patronne du groupe de sécurité de la présidence de la République (GSPR), la commissaire Sophie Hatt, durement secouée par le scandale, va devoir s'expliquer auprès de ses supérieurs.

  • Que savaient exactement François Hollande et Manuel Valls ?

François Hollande, d'après l'Elysée, n'a jamais eu connaissance des liens entre la locataire de l'appartement, Emmanuelle Hauck, et certaines personnes réputées proches du banditisme corse. Ainsi, fait observer l'entourage de M. Hollande, le nom de Ferraci n'apparaît pas sur l'interphone de l'appartement. Le président n'avait connaissance que de l'identité de la locataire du logement, Mme Hauck, amie de longue date de Mme Gayet.

Quant à Manuel Valls, il a découvert, dimanche soir, les détails de l'affaire. « Nous ne sommes pas aux Etats-Unis, explique-t-il au Monde. Le GSPR est autonome. Je n'ai pas à être au courant des déplacements du président. S'il décide d'aller dans un endroit, c'est de sa responsabilité. Quand Jacques Chirac a eu son accident vasculaire en 2005, Nicolas Sarkozy, alors ministre de l'intérieur, n'a pas été prévenu immédiatement. » M. Valls, à son arrivée Place Beauvau, a reformaté le service de protection, réaffectant notamment des gendarmes à l'Elysée. Une refonte ayant également permis d'économiser 106 postes au sein des effectifs. « Dans cette affaire, la sécurité du président n'a jamais été menacée », conclut M. Valls.

  • Le magazine Closer a-t-il pu être instrumentalisé par des rivaux de M. Hollande ?

C'est une interrogation majeure, à l'Elysée, où l'on se penche sur le processus mis en œuvre à l'occasion du reportage de l'hebdomadaire people. A Paris, ces derniers mois, les rumeurs sur la liaison supposée du président ont été relatées par plusieurs relais sarkozystes de premier plan.

Or François Hollande a toujours considéré Nicolas Sarkozy comme son principal rival, en vue d'une future réelection, en 2017. Il lui a toujours prêté aussi un fort pouvoir de nuisance, lié à son passé Place Beauvau et à ses amitiés avec des responsables policiers de premier plan. En effet, l'ancien locataire de l'Elysée a conservé de puissants soutiens au sein de la police, dont une partie des effectifs resteraient acquis à M. Sarkozy. De même, à l'Elysée, des fidèles de l'ancien président sont toujours en place, en particulier au GSPR. L'interpellation de l'un des fils de Valérie Trierweiler, pour l'achat d'une petite quantité de cannabis, avait déjà été révélée par le magazine Closer en décembre 2013. Le rapport de police avait très vite fuité, et le couple présidentiel avait déjà vu dans cette affaire l'action de réseaux sarkozystes souterrains. Sans pouvoir s'y opposer.

  • M. Hollande est-il suffisamment entouré ?

C'est l'un des enseignements de cette affaire. A son arrivée à l'Elysée, M. Hollande n'a pas voulu reproduire les schémas créés par M. Sarkozy. Celui-ci disposait d'un cabinet expérimenté, proche des milieux policiers et du secteur du renseignement. Claude Guéant, secrétaire général de l'Elysée (2007-2011), avait été directeur général de la police nationale. Michel Gaudin, préfet de police de Paris, également. Pierre Charon, conseiller à l'Elysée, proche ami de Nicolas Sarkozy, fréquentait le gratin du Quai des Orfèvres.

Quant à Patrick Ouart, conseiller à la justice, il avait la haute main sur la magistrature et les nominations. Frédéric Péchenard, patron de la police pendant cinq ans, était un ami d'enfance de Nicolas Sarkozy. Sans parler de Bernard Squarcini, directeur du renseignement intérieur, totalement dévoué à Nicolas Sarkozy.

Un dispositif de guerre, rodé, efficace, pour les manœuvres de l'ombre comme celles plus officielles. M. Hollande, par goût personnel, mû par la volonté de se démarquer de ces pratiques, n'a pas voulu s'entourer de professionnels de ce profil. De fait, il ne dispose pas d'un « cabinet noir ». Son prédécesseur s'était, lui, inspiré de Jacques Chirac. Ce dernier pouvait ainsi compter sur Dominique de Villepin à l'Elysée, l'avocat Francis Szpiner ou encore le patron des Renseignements généraux Yves Bertrand.

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