AboLa centrale de Beznau est plus malade que prévu
Le réacteur le plus vieux du monde a le cœur troué comme une passoire. Des spécialistes doutent qu'il puisse encore fonctionner un jour.

C'est grave docteur? Oui, beaucoup plus que prévu. A l'arrêt depuis juillet en raison «d'irrégularités» repérées dans sa cuve de pression, le réacteur de Beznau I (1969) préoccupe les spécialistes. Les analyses par ultrasons ont mis au jour pas moins de 920 trous dans la paroi en acier de la cuve. La cuve? C'est le cœur de la centrale. Une cocotte-minute de quinze mètres de hauteur où se trouvent les barres de combustible radioactif.
Autant dire que des défauts à cet endroit précis d'une installation nucléaire n'ont rien de rassurant: depuis la révélation du nombre de ces trous par le Tages-Anzeiger la semaine passée, les spéculations vont bon train.
Pour Greenpeace, le réacteur argovien est bon pour la déchetterie: «La radioactivité rend déjà l'acier cassant et affaiblit la cuve, s'énerve Florian Kasser, spécialiste du nucléaire au sein de l'association écologiste. Maintenant, on découvre en plus des faiblesses supplémentaires dont l'origine est inconnue!»
Le surveillant des installations atomiques ne confirme pas officiellement la gravité de la situation: «Nous allons nous baser sur les analyses des indications de défauts fournies par l'exploitant, Axpo, et faire un contrôle approfondi avec l'aide d'experts internationaux. Un redémarrage du réacteur aura lieu au plus tôt au premier trimestre 2016», se contente d'indiquer David Suchet, porte-parole de l'IFSN (Inspection fédérale de la sécurité nucléaire).
Axpo veut y croire
Pour l'exploitant, Axpo, ces «irrégularités» ne signent pas l'arrêt de mort du réacteur: «Nous parlons plutôt d'impuretés matérielles. En l'état actuel des investigations, rien ne dit que le réacteur de Beznau I ne pourra plus être exploité», précise Antonio Sommavilla, porte-parole de la société. Un tel optimisme décoiffe plusieurs spécialistes: «La cuve, c'est l'élément le plus critique d'une centrale! Actuellement celle de Beznau I est à 90% de son potentiel de vieillissement après 45 ans d'activité, si des irrégularités s'y ajoutent, on peut être réservé pour l'avenir», réagit un scientifique.
Des trous localisés
Une telle cuve est soumise à des conditions extrêmes: une pression équivalente à 150 atmosphères, une chaleur de 300 degrés et des radiations permanentes. «En cas de pépin, il y a de vrais risques de catastrophe, c'est hallucinant qu'Axpo continue de miser sur son réacteur, le plus vieux du monde», estime Florian Kasser. Les documents montrés par l'IFSN aux membres de la commission de l'énergie du National, la semaine dernière, ont fait dresser les cheveux sur la tête de plusieurs parlementaires (lire ci-dessous). Les trous sont tous regroupés sur le même segment de la cuve (l'anneau C) et ont une taille moyenne d'un demi-centimètre.
Si un arrêt prolongé de Beznau I (5% de la production nationale) ne posera pas de problème d'approvisionnement en électricité cet hiver, il coûtera en tout cas cher à la compagnie, en mains de plusieurs cantons alémaniques. Un chiffre de 100 millions est articulé en cas d'arrêt jusqu'en février. Or Axpo vient d'investir 700 millions dans sa centrale. Une bagatelle en comparaison de ce que coûterait un démantèlement de Beznau, estimé à plusieurs milliards de francs. En cas d'arrêt prématuré, une autre catastrophe menacerait, financière celle-là.
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