La chute de la maison Canal+

LE FAIT DU JOUR. Secouée par les changements imposés par son nouveau propriétaire, Vincent Bolloré, la chaîne cryptée voit l'audience de ses programmes s'effondrer.

La chute de la maison Canal+

    Vincent Bolloré, le nouveau patron, était arrivé au pas de charge dans les couloirs de Canal +, à l'orée de l'été. Il voulait redresser les audiences, mettre le holà aux coûts excessifs des émissions et aux salaires jugés astronomiques des animateurs. Il entendait assainir les comptes d'une chaîne où la dérision et l'argent coulaient un peu trop à flots, selon lui.

    Et voilà qu'avant l'hiver, c'est déjà la curée. Côté audience, les émissions en clair chutent de près de 40 %*. Alors qu'elle atteignait une moyenne de 500 000 téléspectateurs l'année dernière, « la Nouvelle Edition » n'a pas dépassé les 372 000 téléspectateurs cette année. Quant au « Canal Football Club », qui rassemblait en moyenne 1,5 million de téléspectateurs la saison dernière, il n'intéressait que 734 000 téléspectateurs dimanche dernier. Sans parler des chiffres du « Grand Journal » qui, version de Caunes, réunissait 1,1 million de personnes et plafonne aujourd'hui à 637 000. Presque moitié moins.

    Moins 40% d'audience pour le «Grand Journal»

    Rétrospectivement, Vincent Bolloré doit regretter sa sortie sur « le Grand Journal », effectuée début juillet sur Europe 1 : « Cela fait deux ans que l'audience s'érode un peu et les émissions coûtent à peu près trois fois plus chères que la concurrence, et la concurrence nous bat », déplorait-il pour expliquer sa prise de pouvoir et les limogeages de Rodolphe Belmer, jusque-là aux commandes de la chaîne, et de Renaud Le Van Kim, producteur du « Grand Journal ».

    Or, selon nos informations, l'émission coûtera cette saison 23 Mâ?¬, contre 25 Mâ?¬ la saison dernière. Une économie de 8,7 %, mais plombée par une baisse de 40 % de l'audience. La facture s'alourdit aussi côté publicité. Plus que rentable, « le Grand Journal » saison 2014-2015 a rapporté 15 Mâ?¬. Cette année, les spots de pub suivent la même courbe que l'audience, à la baisse. Alors que les trente secondes de réclame à 20 h 5 se vendaient à partir de 20 400 â?¬ en septembre 2014, ils se négociaient à partir de 17 800 â?¬ un an plus tard, et sont déjà bradés à partir de 11 300 â?¬ pour la période janvier-février 2016 ! Conséquence, alors que les rentrées publicitaires du clair auraient dû représenter 150 Mâ?¬ pour la saison 2015-2016, la régie a déjà anticipé un manque à gagner de 50 Mâ?¬ cette année.

    La loi des séries

    Puisqu'un malheur n'arrive jamais seul, toujours selon nos informations, le nombre de nouveaux abonnés a baissé de 10 % en septembre (par rapport à septembre 2014) alors que la Coupe du monde de rugby était censée attirer des centaines de clients supplémentaires... « Toutes les tranches en clair s'effondrent et cela entraîne les audiences du soir en crypté, s'inquiète un cadre de la chaîne. La saison 2 des Revenants est un bide. Ces signes sont catastrophiques. Le public vient chercher sur Canal de l'impertinence. Or, on lui dit actuellement que ce n'est plus la chaîne de l'impertinence et du contre-pouvoir. D'où le risque que les gens ne s'abonnent plus. » Car selon une étude interne confidentielle, un tiers des clients viennent parce qu'ils sont sensibles aux valeurs véhiculées par le clair. Les abonnements se faisant pour un an, le pire est donc à craindre pour les mois à venir, et l'hiver s'annonce rude.

    * Contactée, la chaîne n'a pas souhaité commenter nos informations.