
La direction de Canal + a décidé de ne pas poursuivre la procédure de licenciement contre le journaliste Jean- Baptiste Rivoire, rédacteur-en-chef adjoint du magazine Spécial Investigation. Convoqué lundi 19 octobre par la direction des ressources humaines de la chaîne, M. Rivoire, assisté du délégué syndical CGT, s’est vu remettre une lettre en mains propres dans laquelle il est informé que Canal+ ne poursuivra pas la procédure initiée à son encontre le 9 octobre.
La DRH ne lui avait pas fourni le motif de cette convocation. « Ainsi, l’entretien ’à un éventuel licenciement’ fixé au 19 octobre n’a plus lieu d’être », est-il écrit.
La censure de l’enquête sur le Crédit mutuel par Vincent Bolloré n’en finit pas de faire des vagues à Canal+. Patrick Menais, le responsable du Zapping de Canal+, a également été reçu par la direction de Canal+. Celle-ci a démenti lui avoir ordonné de passer l’émission sous silence. Le 8 octobre, le Zapping a proposé six extraits de l’enquête diffusée sur France 3 deux jours auparavant. Pour le moment, il n’y a pas eu de sanctions à l’encontre de M. Menais.
Nomination comme représentant syndical
En revanche, il semble que la direction de Canal+ a tenté de solder le contentieux avec l’équipe du magazine « Spécial investigation » qui avait exprimé son mécontentement après la censure de l’enquête sur le Crédit mutuel. Dimanche soir, la direction de Canal+, jointe par Le Monde, démentait, dans un premier temps, avoir envoyé la convocation.
Puis, quelques minutes plus tard, elle expliquait que Jean-Baptiste Rivoire « n’était pas en procédure de licenciement ». Or, le journaliste a affirmé au Monde n’avoir pas reçu cette annulation.
Cette dernière a été envoyée alors que le matin du 9 octobre, Jean-Baptiste Rivoire a expédié un courriel interne à ses collègues de Spécial investigation pour leur annoncer qu’il avait adhéré au syndicat SNJ-CGT et que ce dernier l’avait nommé « représentant syndical » à Canal+. Il leur expliquait que ce mandat allait lui permettre d’assister aux comités d’entreprise mensuels, et de poser des questions à la direction, notamment sur la façon dont elle « traite » l’investigation sur la chaîne.
« Mise en cause à peine masquée » de la direction
La démarche syndicale de Jean-Baptiste Rivoire fait suite à la censure de l’enquête sur le Crédit Mutuel. Après l’annonce de sa déprogrammation, le journaliste a envoyé le 4 juin un courriel à M. Saada, cosigné par deux de ses collègues de Spécial Investigation, Steeve Baumann, rédacteur en chef adjoint, et Nathalie Moutoz, chef d’édition, dans lequel ils demandaient des explications sur cette déprogrammation.
Les trois signataires interrogaient également M. Saada sur le nouveau processus de décision du Comité d’investigation concernant le lancement des enquêtes. Ils pointaient son refus de rediffuser une enquête sur la coupe du monde 2022 au Qatar, et l’absence de réponse de la direction de Canal concernant des investigations sur la BNP et Center Parcs proposées par KM, la société de Renaud Le Van Kim qui a produit le documentaire sur le Crédit Mutuel.
Quelques jours plus tard, M. Saada a reçu les journalistes du magazine. Il s’est agacé de « la mise en cause à peine masquée » de la direction de Canal+ concernant l’investigation. Il leur a également expliqué que le processus de décision pour le lancement des enquêtes « n’avait pas changé ». « Il n’y a pas eu de déprogrammation, mais KM nous a informé directement auprès de la direction de l’antenne que le programme ne nous serait pas livré », a-t-il avancé à propos de l’enquête sur le Crédit mutuel, en soulignant qu’il n’était en rien intervenu dans la non-diffusion de ce programme. Or, il a été révélé depuis par le site Médiapart, que le documentaire avait bien été censuré par M. Bolloré.
Regrettant ce qui s’était passé, M. Saada a assuré à l’équipe que l’investigation serait renforcée sur Canal+. Dans sa prochaine édition, le 26 octobre, Spécial investigation diffusera finalement l’enquête « Hollande-Sarkozy, la guerre secrète » qui avait été déprogrammée de la grille le 28 septembre.
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