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Billet de blog 19 octobre 2015

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Insulte à Erdoğan : 61 personnes poursuivies au 3e trimestre 2015 (BIA)

La répression des propos critiques à l’égard  de Recep Tayyip Erdoğan a encore été impitoyable au troisième trimestre 2015, avec pas moins de 61 condamnations, procès, lancement de poursuites ou dépôts de plaintes pour insulte à l’encontre du président turc, selon un rapport diffusé ce lundi par l’agence d’information indépendante BIA (http://bianet.org/bianet/ifade-ozgurlugu/168335-61-kisi-erdogan-mahkumu-sanigi-suphelisi).

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La répression des propos critiques à l’égard  de Recep Tayyip Erdoğan a encore été impitoyable au troisième trimestre 2015, avec pas moins de 61 condamnations, procès, lancement de poursuites ou dépôts de plaintes pour insulte à l’encontre du président turc, selon un rapport diffusé ce lundi par l’agence d’information indépendante BIA (http://bianet.org/bianet/ifade-ozgurlugu/168335-61-kisi-erdogan-mahkumu-sanigi-suphelisi).

Entre juillet et septembre, quatre personnes ont été condamnées pour « insulte au président » (article 299 du code pénal), un délit passible de un à quatre ans de prison. Un journaliste, Aytekin Yazıcı, a écopé le 17 septembre d’une peine de quatre ans d’emprisonnement ferme pour avoir diffusé sur Twitter des propos tels que « vous avec (tout) vendu morceau par morceau, vous avez (tout) embarqué boite après boite ». Il faisait référence aux enquêtes anti-corruption menées du 17 au 25 décembre 2013 par la police turque, visant notamment la famille Erdoğan et des proches, au cours desquelles ont été évoquées des boites à chaussures remplies d’argent. Les investigations ont toutes été conclues par un non-lieu et la plupart des enquêteurs ont été mutés ou mis à pied, le gouvernement arguant d’un complot mené par la communauté religieuse de Fethullah Gülen dans le but de renverser RTE.

Un lycéen de 16 ans et un cadre local du petit parti de gauche EMEP ont pour leur part été condamnés à des peines de prison avec sursis, en raison respectivement de déclarations lors d’un rassemblement politique et d’interventions sur les médias sociaux. Un avocat a quant à lui été reconnu coupable d’insulte au président et d’insulte à des fonctionnaires dans le cadre de leurs fonctions pour avoir crié lors d’un examen de l’école de la magistrature : « Vous êtes les hommes d’Erdoğan le fasciste et de son système ». Verdict : trois ans, quatre mois et 15 jours de prison ferme. Un cinquième prévenu, le directeur de la publication du quotidien de gauche BirGün, a été condamné au titre de l’article 125 du code pénal (traitant de l’insulte en général) à une amende de 7.500 livres turques (2.300 euros) pour un article sur les enquêtes du 17/25 décembre 2013.

Au cours de ce troisième trimestre, 28 prévenus, dont 13 journalistes ont par ailleurs vu se poursuivre leurs procès respectifs pour insulte au « souverain » (23 au titre de l’article 299, 5 à celui de l’article 125). On peut noter la présence parmi eux de Can Dündar, le directeur de la publication de Cumhuriyet, qui encourt 11 ans et quatre mois de prison pour une série de chroniques sur le 17/25 décembre 2013, ou encore celle de l’éditorialiste Özgür Mumcu, du même quotidien, poursuivi pour avoir qualifié RTE d’individu « cruel et peureux » en réaction aux poursuites lancées par le « Palais » contre la mère d’Abdullah Cömert, dont l’enfant a péri lors des événement de Gezi après avoir été atteint d’une grenade lacrymogène en pleine tête.

BIA mentionne également dans son rapport le lancement de poursuites contre 19 journalistes au titre de l’article 299. Le célèbre journaliste et essayiste Hasan Cemal fait partie de la nouvelle fournée en raison d’un article intitulé « Le responsable numéro un du sang versé est le sultan du Palais, point ! ». La chronique, diffusée sur le site internet d’information T24, impute au président la responsabilité de la nouvelle flambée de violences entre les forces de sécurité et les rebelles kurdes du Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK). Hasan Cemal retrouve au banc des suspects Murat Çapan, le directeur de Nokta, visé par une instruction judiciaire après la publication en « Une » de son magazine d’un photomontage dépeignant Erdoğan en train de se prendre en « Selfie » devant des cercueils de soldats turcs morts au combat.

L’agence BIA, spécialisée dans le traitement des informations relatives à la liberté d’expression et aux droits de l’Homme, recense enfin trois dépôts de plaintes pour insulte par les avocats du président, et la condamnation de deux députés, dont le président du Parti républicain du peuple (CHP), Kemal Kılıçdaroğlu, au versement de 45.000 livres turques (13.700 euros) de dommages-intérêts à RTE pour atteinte à ses droits individuels.