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Billet de blog 14 janvier 2014

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Royaume-Uni : le lien entre coupes budgétaires et inondations

Pendant le mois de décembre 2013, au Royaume-Uni, les pluies torrentielles et la tempête Hercules ont provoqué les sixièmes inondations les plus destructrices dans l’ordre d’importance depuis 1910. Elles  ont fait sept victimes et ont sérieusement endommagé plus de 1.700 habitations à travers le pays. 

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Pendant le mois de décembre 2013, au Royaume-Uni, les pluies torrentielles et la tempête Hercules ont provoqué les sixièmes inondations les plus destructrices dans l’ordre d’importance depuis 1910. Elles  ont fait sept victimes et ont sérieusement endommagé plus de 1.700 habitations à travers le pays. 

© Tim Graham / Getty Images

Chacun sait depuis quelque temps déjà que les changements climatiques portent la plus grande responsabilité de ces sinistres, explication derrière laquelle le secrétaire d’état à l’environnement Owen Paterson s’est complaisamment rangé. Son ministre de tutelle, George Eustice, est allé plus loin encore en claironnant que le gouvernement de coalition Tory-LibDem va consacrer environ deux milliards et demi d’euros à la prévention de telles catastrophes naturelles, entre 2015 et 2021. Un authentique satisfecit donc. Cependant d’autres voix se font entendre, y compris chez les conservateurs, pour expliquer la situation de manière totalement différente.

Ainsi, Anne McIntosh, députée conservatrice de la circonscription de Thirsk and Malton dans le North Yorkshire et présidente d’Efra select committee, Environment, Food and Rural Agency, la commission parlementaire chargée des questions environnementales, alimentaires et rurales, a lancé un pavé dans la mare des inondations en déclarant : Ministers must clarify how further budgets will impact on the ability of the department to respond to emergencies, entendez : les ministres doivent s’expliquer clairement sur la façon dont les budgets à venir permettront au ministère (de l’environnement) de faire face aux situations d’urgence. Propos sans ambigüité confirmés par le rapport définitif de la même commission, à lire ici, et par la réalité politique. En effet, depuis que David Cameron est entré au 10 Downing Street en mai 2010, le budget consacré à la prévention des risques naturels a baissé de 25% par an, ce qui fait que, pour l’année en cours, il y aura 150 millions de livres sterling en moins par rapport à 2010. Ces restrictions insensées ont engendré des suppressions de postes.

Le syndicat Unison *, qui inclut les travailleurs de la fonction territoriale et notamment des agences de protection de l’environnement, rappelle que, depuis que les conservateurs et leurs alliés libéraux sont au pouvoir, ce sont plus de 2.000 postes qui ont été supprimés, avec la perspective de 1.500 suppressions supplémentaires avant octobre 2014. Le ministère de l’environnement, dans la plus pure logique conservatrice, déplore le changement de climat, prétend tout faire pour endiguer rivières et fleuves en crue exceptionnelle, et, dans le même temps, fait disparaître les emplois des agents spécialistes susceptibles de l’informer des dangers imminents. Le constat de cette hypocrisie a été dressé par le Guardian, par l’Independent, qui a rappelé que, dans le Dorset, faute de personnel, l’agence de l’environnement a été dans l’incapacité de prévenir la population de l’imminence des très hautes vagues subversives. Même le Telegraph, qui ne saurait en aucun cas faire la moindre peine à son gouvernement conservateur préféré, a concédé que les réponses du ministère de l’environnement aux intempéries étaient patchy, traduisez éparses !

Selon le même Guardian du 10 janvier, certains agriculteurs des régions dévastées s’en remettent désormais  aux conseils du National Trust plutôt qu’à ceux du ministère de l’environnement. Cette incurie des conservateurs pose également de nouveau la question de la protection de Londres. De nombreux spécialistes se demandent aujourd’hui si la célèbre Thames Barrier, édifiée au niveau de Greenwich, dont on peut voir le fonctionnement sur ce schéma du Guardian,(cliquer sur la photo aérienne) pour épargner le centre de la capitale et éviter de revivre les effroyables inondations de 1952, est suffisante pour faire face aux changements climatiques.

Par ailleurs le célèbre éditorialiste du Guardian, George Monbiot a fortement ironisé, dans l’édition du 13 janvier, sur ce gouvernement conservateur si prompt à conseiller d’autres pays : For decades the British government has been funding scientists working in the tropics and using their findings to advise other countries to protect the forests or to replant trees in the hills to prevent communities downstream being swept away. But we forgot to bring the lesson home. Lisez : depuis des décennies le gouvernement britannique subventionne des chercheurs qui travaillent dans les pays tropicaux et  utilise leurs conclusions pour conseiller d’autres pays de protéger leurs forêts et de reboiser les collines pour éviter aux gens qui y vivent de subir les effets du ravinement. Mais nous n’avons oublié d’appliquer la leçon chez nous…

* UNISON n’est ni un sigle ni un acronyme mais simplement l’équivalent sémantique en anglais de en chœur, à l’unisson. C’est le second syndicat britannique, créé en février 2000, né de la fusion de NALGO, National and Local Government Officers Association, NUPE, National Union of Public Employees et COHSE, Confederation of Health Service Employees.

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