«Ensemble nous avons déjà réussi 25 802 défis qui ont évité la production et la consommation de 1 316 tonnes de CO2 et 1,8 million de litres d'eau.» Voilà le message que pouvaient lire dimanche les utilisateurs de l'application «90 jours», lancée le 10 septembre (à quatre-vingt-dix jours de la fin de la COP 21), d'abord sur la plateforme Androïd et désormais sur iOS depuis mercredi - une version web est également disponible ici.
Disons-le d'emblée, ces chiffres ne représentent pas les économies réelles réalisées en eau et en dioxyde de carbone grâce aux «défis» lancées par l'application à ses quelque 12 000 utilisateurs actuels : il est tout simplement impossible de vérifier s'ils se traduisent en actes. Dans le meilleur des cas, ces économies seraient par ailleurs encore modestes au regard des 490 millions de tonnes équivalent CO2 de gaz à effet de serre (7,5 t par habitant) rejetées dans l'atmosphère par la France en 2012.
90 jours n'en reste pas moins un outil efficace pour rendre nos modes de vie moins gourmands en pétrole, charbon, eau face à l'enjeu climatique. L'idée de l'application est de proposer 20 actions concrètes réalisables par tous. Chacune d'elles chiffre l'économie en émissions de CO2 et en litres d'eau consommés – que l'on peut suivre au fil des jours dans l'onglet «statistiques» – ainsi que le temps nécessaire à sa réalisation.
Défi vinaigre blanc
«Vous allez enfin réussir à mettre en pratique votre prise de conscience», lit-on en démarrant 90 jours. L'application s'adresse «à tous ceux qui ont déjà compris que la planète va mal mais qui ne savent pas comment agir à leur niveau», explique Elliot Lepers, l'entrepreneur de 23 ans qui l'a conçue. Patron de la start-up CobbleCamp basée à Paris, Lepers (sans rapport avec Julien) est l'ancien directeur de la campagne numérique d'Eva Joly pour l'élection présidentielle de 2012 et l'un des initiateurs du site d'action contre le sexisme Macholand.fr.
Pour lui, «tout le monde aimerait être écolo mais personne n'y arrive». L'application se veut ainsi un «coup de pouce pour commencer à questionner son mode de vie, à douter de nos automatismes et réussir à trouver l'écologie qui nous ressemble», et ne vise pas à «faire de vous le parfait écologiste».
Cela étant posé, un premier défi nous est proposé après un court questionnaire : «Acheter du vinaigre blanc». Durée : 15 minutes. Du vinaigre pour préserver l'environnement, vraiment ? On appuie pour «en savoir plus» : «Les produits chimiques voire toxiques nécessitent d'être traités longuement avant de pouvoir être rejetés dans les rivières». Et on lit que le vinaigre blanc, lui, permet de nettoyer «la majorité de son intérieur» sans souiller l'eau de lavage.
On se calme sur les kiwis néo-zélandais
On «clique» illico sur «J'ai réussi». En fait, on en avait déjà acheté en prévision d'une refonte totale du stock de produits ménagers. Reste désormais à s'y mettre... Allez, défi suivant : «Je branche mes appareils sur une multiprise avec interrupteur». Ça aussi, c'est déjà fait, mais on oublie souvent de les éteindre, ces multiprises, pour empêcher les appareils qui y sont branchés (chargeur de téléphone, Playstation) de consommer du jus lorsqu'on s'en sert pas. Une nouvelle piste d'amélioration, donc...
Place au troisième et dernier défi de la journée : afficher le calendrier des fruits et légumes de saison dans la cuisine, ce qui permettrait d'économiser , selon l'appli, 10 kg de CO2 par an générés par le transport des aliments importés de lointains pays. Pas si dur à tenir, à y regarder de plus près : en ce moment, le choix de fruits – pomme, raisin, coing, etc. - et légumes - brocoli, carotte, laitue, etc. - est plutôt grand. OK, on affichera le calendrier en rentrant et on promet de faire un effort pour réduire notre consommation quotidienne de kiwis néo-zélandais.
«Panic button»
Le bilan, lorsque ces trois défis seront mis en pratique, est déjà chiffré : 38 kg de CO2 en moins (théoriquement) rejetés dans l'atmosphère. Et si l'outil était adopté à grande échelle ? «Même si tous les Français s'y mettent, ces défis ne suffiront pas à sauver la planète», concède Elliot Lepers. «Mais ils sont un premier pas pour faire avancer la réflexion sur nos modes de vie et mettre la pression sur les politiques publiques.»
La version anglaise de cette application «sans modèle économique» est en cours de développement. Et pour ceux qui seraient sur le point de se décourager face à tant de mini-défis, l'entrepreneur a intégré un «panic button» permettant de lui parler directement par téléphone pour se faire coacher. Pour l'heure, un seul appel aurait ainsi été passé. Espérons que ça dure.