anigo (jose) (L'Equipe)

Anigo : «J'ai vu passer beaucoup de fainéants...»

Chaque jeudi, l'ancien directeur sportif de l'OM a carte blanche sur Francefootball.fr. Cette semaine, il évoque ces joueurs français si réticents aux efforts.

«Je voudrais revenir sur la petite phrase de Michel il y a quelques semaines au sujet des joueurs français. Il s’est avoué surpris de les voir choisir leur match.
Malheureusement, moi je n’ai pas du tout été surpris par cette sortie. Cela n’a rien d’un coup de colère. C’est la triste réalité. Bien sûr, Dieu merci, il existe des joueurs passionnés avec lesquels tu peux aller au combat à chaque match. Reste que beaucoup, à côté de ceux-là, font preuve d’une conscience professionnelle assez légère. Je n’ai pas peur de dire que j’ai vu passer beaucoup de fainéants dans ce métier ! Des tires au flanc qui trouvaient toutes les excuses pour ne pas forcer. Parfois, ils ne se cachaient même pas ! Il y en a qui choisissent leur match mais d’autres, ou les mêmes parfois, qui choisissent aussi leurs entraînements !

«Vous êtes nuls en termes d'autorité avec vos joueurs»

Et j’avoue que j’ai du mal à me contenir lorsque j’entends ces mêmes joueurs, pas trop portés sur l’effort déclarer, quelques semaines à peine après leur départ à l’étranger qu’ils n’ont jamais autant travaillé. Mais quelle supercherie ! Qui les empêchaient de bosser davantage lorsqu’ils étaient en France ? Pourquoi accepter sans broncher des charges de travail supérieures à l’étranger ?
En France, tout est fait pour protéger au maximum les joueurs. Ils sont choyés, câlinés, soignés. Et encadrés par des techniciens très compétents. Bref, ils sont placés dans les meilleures conditions. Mais parfois ça ne leur suffit pas !
Me reviennent les discussions que j’ai pu avoir avec des dirigeants de clubs étrangers. À chaque fois revenait le même discours : «Vous êtes peut-être les meilleurs pour former des jeunes joueurs, mais en revanche, vous êtes nuls en termes d’autorité avec vos joueurs. Pourquoi les laissez-vous autant faire ? Il y a plein de choses que nous n’accepterions jamais chez nous.»

Le laxisme est culturel. On est trop faibles avec les joueurs en France. Ils font trop ce qu’ils veulent. En Allemagne ou en Angleterre, le moindre écart de conduite, retard ou manquement au règlement entraîne une mise à l’écart directe et parfois une amende qui va jusqu’à 40% du salaire. Et personne ne criera au scandale, surtout pas le fautif. Sinon, pour bien lui faire comprendre la vie et le sens de la discipline, on l’enverra en prêt au mercato suivant.
En France, les joueurs font davantage la loi. Les retards à l’entraînement, très courants, sont rarement sanctionnés. Il faut même être très fort pour en faire accepter le principe aux joueurs… et à leurs conseillers qui trouvent toujours des excuses. En cas de faute encore plus grave, liée par exemple à une virée nocturne trop mouvementée et trop proche d’un match, il faut parfois aller jusqu’à menacer de laisser fuiter l’information dans la presse pour inciter le fautif à payer son écart de conduite.
Bien sûr, pour ramener un peu d’ordre et d’autorité, l’entraîneur a toujours le choix de se passer de ceux qu’ils soupçonnent de lever le pied ou de ne pas se comporter comme des pros. Mais combien de coaches sont prêts à se passer de leurs meilleurs éléments pour imposer leurs valeurs ? Franchement, je ne sais pas...»

«En France, les retards à l'entraînement sont rarement sanctionnés. Il faut même être très fort pour en faire accepter le principe aux joueurs... et à leurs conseillers»