Prix littéraire : Kaddour, Sansal, le Maghreb au zénith

Avec le Grand Prix de l'Académie française à "2084" de Boualem Sansal et aux "Prépondérants" d'Hédi Kaddour, le Maghreb assure côté langue française.

Par notre correspondant à Tunis,

Hédi Kaddour et Boualem Sansal.
Hédi Kaddour et Boualem Sansal. © AFP PHOTO

Temps de lecture : 2 min

Si l'académie Goncourt a évincé Boualem Sansal de sa dernière liste, une autre académie le console : celle située Quai Conti. L'Académie française a attribué ex aequo son Grand Prix à deux auteurs Gallimard : Hédi Kaddour pour Les Prépondérants et Boualem Sansal pour 2084. Ce coup double, une troisième dans l'histoire du prix, consacre, par ses thématiques et par les nationalités de ses auteurs, deux pays du Maghreb. La Tunisie et l'Algérie. Ce zoom sur l'Afrique du Nord met la francophonie au centre de l'échiquier littéraire.

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Deux auteurs déjà repérés

Ces deux auteurs sont salués depuis leur premier roman. Waltenberg d'Hédi Kaddour avait obtenu le Goncourt du premier roman en 2006. Boualem Sansal le prix du premier roman 1999 pour Le Serment des barbares. Les voici consacrés par les hommes en habits verts pour deux œuvres aux sujets différents. Sansal se place dans le futur, un siècle après le 1984 de George Orwell. Kaddour a opté pour le printemps 1922. Sansal décrit l'apogée d'une dictature religieuse via le genre de la fable. Kaddour dépeint le petit monde colonial confronté à l'irruption d'une équipe de cinéma américaine. Le point de départ d'une épopée romanesque qui confronte les cultures, malmène les idées reçues, multiplie les voyages.

Deux univers : l'Abistan et Nahbès

Sous-titré La Fin du monde, 2084 s'ouvre sur cette phrase sans ambages : « La religion fait peut-être aimer Dieu mais rien n'est plus fort qu'elle pour faire détester l'homme et haïr l'humanité. » S'ensuit un ironique avertissement adressé au lecteur sur le fait que tout ce qui suivra sera « une œuvre de pure invention ». Et l'écrivain d'asséner : « Dormez tranquilles, bonnes gens, tout est parfaitement faux et le reste est sous contrôle. » Les 274 pages suivantes décrivent un pays, l'Abistan, régit par la soumission au dieu unique.

Kaddour, lui, plante les racines de son livre en Afrique du Nord, mais ne trace pas de frontières entre colonies et protectorat : sa petite ville imaginaire se nomme Nahbès. Elle est le symptôme d'un univers où les colons se considèrent comme des « Prépondérants ». Ati, le personnage central de 2084, va peu à peu remettre en question une vie soumise à l'Appareil religieux et à des diktats tels que « la soumission est foi et la foi vérité ». Raouf, avec la candeur de ses dix-huit ans, va voir la perception de son quotidien bouleversé par une actrice américaine, Kathryn.

Une distinction : le Grand Prix de l'Académie française

Inutile de vouloir lier le contenu de ces deux romans sous prétexte de leurs origines. Ils ont des points communs. Notamment ce Grand Prix ex aequo qui multipliera dès demain leurs ventes. Les réimpressions sont déjà signées par la maison d'Antoine Gallimard. Le bandeau rouge annonçant le prix sera ajouté dans les librairies et espaces culturels des hypermarchés. L'Académie française sacre également « le français, langue archipel où tous les territoires sont à égalité », selon les propos tenus par Régis Debray à Tunis, mardi soir.