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Hollande fait-il de l'économie à la Sarkozy ?

La plupart des propositions émises par le chef de l'Etat font écho à des mesures et des pistes similaires, émises par son prédécesseur.

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Publié le 15 janvier 2014 à 15h20, modifié le 16 janvier 2014 à 07h59

Temps de Lecture 6 min.

François Hollande et Nicolas Sarkozy durant la cérémonie du 8-Mai.

« Je reste socialiste (...). Je ne suis pas gagné par le libéralisme, c'est tout le contraire, puisque c'est l'Etat qui prend l'initiative. » Cette phrase de François Hollande, lors de ses vœux à la presse, mardi 14 janvier, voulait répondre par avance aux critiques qui accompagnent ses annonces économiques. En choisissant clairement une politique « de l'offre », qui vise à améliorer les marges des entreprises, le chef de l'Etat a rompu avec la tradition, à gauche, de relance par la demande et la dépense. Et s'est rapproché fortement, sur le plan économique du moins, des idées défendues par son adversaire de la présidentielle 2012, Nicolas Sarkozy. 

Lire : Les principaux points de l'intervention de François Hollande

  • Baisse de cotisations des entreprises ? Sarkozy aussi.

Ce que propose François Hollande : Un an après le crédit d'impôts compétitivité emploi (CICE), qui vient seulement d'entrer véritablement en vigueur, François Hollande a annoncé une nouvelle forte baisse des cotisations sociales des entreprises : 30 milliards d'euros au total, du fait de la suppression des cotisations familiales, payées par les entreprises pour financer la branche « famille » de la sécurité sociale.

Ce que proposait Sarkozy : Nicolas Sarkozy promettait, au point 5 de son programme 2012, des allégements de cotisations sociales pour les entreprises. Lors d'une interview, le 29 janvier 2012, il promettait plus précisément une suppression des cotisations familiales jusqu'à un certain niveau de salaire. A l'époque, le candidat Hollande était critique sur cette mesure : « Comment imaginer que quelques points de moins de cotisations patronales pourraient d'un seul coup améliorer nos échanges extérieurs ? », s'interrogeait-il

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Nicolas Sarkozy voulait faire financer cette réforme par une hausse de TVA, alors combattue par la gauche. Moins d'un an plus tard, François Hollande recourait à la hausse de la TVA pour financer en partie le CICE.

  • Réduction de la dépense publique ? Sarkozy aussi.

Ce que propose François Hollande : « En 2014, nous allons réaliser 15 milliards d'économies. D'ici à 2017, nous devons dégager 50 milliards de plus ». François Hollande a maintenu le cap annoncé durant sa campagne : une baisse des dépenses publiques tout au long de son quinquennat. 

Ce que proposait Sarkozy : La comparaison est aisée : cette baisse de dépenses est imposée par le pacte de stabilité européen. Nicolas Sarkozy, qui l'avait signé, préconisait donc lui aussi, dans son programme, 40 milliards d'euros « d'effort sur les dépenses publiques ». La presse avait d'ailleurs, à l'époque, relevé cette forte similitude dans les mesures proposées par les deux candidats.

  • Emplois aidés ? Sarkozy aussi.

Ce que propose François Hollande : « Nous ajouterons 50 000 emplois d'avenir sur 2014 », a promis le chef de l'Etat Depuis le début du quinquennat, les emplois aidés ont été utilisés au service de la baisse du chômage : près de 100 000 « emplois d'avenir » ont été mis en place en 2013. Une politique de « traitement social du chômage » classique à gauche. 

Ce que proposait Sarkozy : Si cette politique est aujourd'hui dénoncée par l'UMP, la gauche n'est certainement pas la seule à y avoir eu recours. Il faut se souvenir qu'en 2008, Nicolas Sarkozy annonçait pas moins de 300 000 emplois aidés pour l'année suivante, dont « 60 000 contrats non marchands », équivalents des emplois d'avenir. A l'époque, M. Sarkozy, comme M. Hollande lors de sa conférence, se défendait de tout « changement de politique économique », arguant qu'on « ne fait pas d'idéologie face à la misère humaine ».

  • Réforme territoriale ? Sarkozy aussi.

Ce que propose François Hollande : « Les collectivités seront également invitées à se rapprocher. Les régions d'abord, dont le nombre peut aussi évoluer. [Les départements] devront redéfinir leur avenir », a demandé François Hollande. Pour financer les baisses de cotisations sociales, le chef de l'Etat compte sur des mesures d'économie massives, dont un rapprochement des collectivités locales (régions et départements). 

Ce que proposait Sarkozy : Ce projet n'est pas sans rappeler la réforme territoriale portée par Nicolas Sarkozy. Si le texte avait été fortement amendé par le Sénat, les recommandations de la commission Balladur, puis les premières pistes de M. Sarkozy, étaient proches de ce que propose M. Hollande : rapprochement de certaines régions, fusion des conseillers régionaux et généraux en un « conseiller territorial » siégeant au département et à la région, création des « métropoles » aux compétences étendues pour les grandes villes...

A l'époque, les socialistes fustigeaient durement une « réforme stupide, illisible, impraticable », qui n'avait pour but, à leurs yeux, que de « réduire le nombre de collectivités gérées par la gauche ».

  • Harmonisation fiscale avec l'Allemagne ? Sarkozy aussi.

Ce que propose François Hollande : Le chef de l'Etat a dit souhaiter « harmoniser les règles fiscales, notamment pour les entreprises, entre la France et l'Allemagne ». Il souhaite par ailleurs des convergences avec notre voisin allemand sur l'Europe de la défense ou la transition énergétique. 

Ce que proposait Sarkozy : Le renforcement de l'axe franco-allemand était l'un des axes majeurs de la campagne de Nicolas Sarkozy. Et dès 2010, il expliquait : « Ma première préoccupation, c'est rapprocher les systèmes fiscaux français et allemands. »

  • Simplification des normes ? Sarkozy aussi. 

Ce que propose François Hollande : Le chef de l'Etat a également évoqué la simplification administrative, promettant notament de « réduire le nombre de normes » imposées aux entreprises. Un discours qu'il tient depuis longtemps, on se souvient du fameux « choc de simplification » annoncé en 2012.

Ce que proposait Nicolas Sarkozy : Là encore, la proposition résonne d'un écho familier : en mars 2012, Nicolas Sarkozy proposait : « chaque fois qu'un ministre présentera une nouvelle norme, nous exigerons que deux normes anciennes soient supprimées ». 

  • Enseignants mieux valorisés ? Sarkozy aussi.

La comparaison peut aussi se faire sur une autre mesure, qui n'est pas strictement économique : l'amélioration des conditions de travail des enseignants en zones d'éducation prioritaire (ZEP).

Ce que propose François Hollande : Le président a promis des « mesures d'une ampleur inédite » pour rendre « plus attractifs les postes d'enseignants », sans les détailler encore, mais il est question notamment d'une décharge horaire plus importante. 

Ce que proposait Sarkozy : Revaloriser le salaire et les conditions de travail de enseignants ? C'était la proposition phare du candidat Sarkozy en matière d'éducation. Dans un discours le 29 février 2012, il proposait 500 euros supplémentaires chaque mois aux enseignants qui seraient prets à travailler plus longtemps.

On pourrait multiplier les exemples, qui vont parfois au-delà de l'économie. Ainsi, sur les Roms, on ne peut pas dire que la politique du gouvernement socialiste change beaucoup de celle de Nicolas Sarkozy, avec un nombre d'évacuations de campements illicites deux fois plus important en 2013 qu'en 2012. L'implication de la France dans le maintien de la stabilité en Afrique est également une politique semblable à celle de Nicolas Sarkozy.

On peut aussi citer quelques différences : Nicolas Sarkozy avait commencé son quinquennat par la loi « travail, emploi, pouvoir d'achat », qui contenait le bouclier fiscal, la défiscalisation des heures supplémentaires et des mesures fiscales favorables aux plus aisés. François Hollande, à l'inverse, a commencé son mandat en instaurant la taxe à 75% (retoquée depuis et réintroduite sous une autre forme), en créant de nouvelles tranches d'imposition et en augmentant la fiscalité des plus riches. Néammoins, l'un comme l'autre ont traîné comme un boulet ce premier acte positif, Sarkozy se retrouvant campé en « président des riches » quand Hollande est fustigé comme le président des hausses d'impôts.

S'il n'est pas question ici d'accréditer l'amalgame qu'opère l'extrême droite en parlant d'UMPS, force est de constater que, sur la politique économique, les marges de manœuvre sont ténues pour la France, qu'elle soit gouvernée à droite ou à gauche. Quant aux solutions, on l'a vu, elles sont souvent relativement semblables dans les deux camps.

Le distinguo s'opère en réalité désormais plus sur les questions sociétales et régaliennes que sur une politique économique en grande partie contrainte par les engagements européens de la France.

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