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Le documentaire qui accable l’Eglise de scientologie

Trois fois couronné aux Emmy Awards, “Going Clear” sera diffusé sur Canal+ le 11 novembre. Cette enquête fouillée sur l’organisation a valu à son réalisateur pressions et menaces.

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Publié le 28 octobre 2015 à 13h38, modifié le 30 octobre 2015 à 14h10

Temps de Lecture 4 min.

Alex Gibney a été suivi, surveillé, harcelé dans la rue, insulté, menacé de représailles juridiques et calomnié sur la Toile. Un site Web a même été créé par l’Eglise de scientologie uniquement pour le décrédibiliser. L’objet de ce courroux ? Son documentaire Going Clear, inspiré du best-seller du journaliste Lawrence Wright (prix Pulitzer en 2007), Devenir clair, la Scientologie, Hollywood et la prison de la foi, publié en 2013 (en octobre 2015 en France, aux éditions Piranha), qui a fait l’effet d’une bombe aux Etats-Unis.

Présenté au Festival du film Sundance en janvier (et accueilli par une standing ovation), puis diffusé sur HBO en mars, il a été visionné par plus de 8 millions de personnes jusqu’à présent. Soit l’un des plus gros cartons de la chaîne câblée, la seule à avoir accepté de le produire. « J’ai été surpris de voir que les autres refusaient de s’embarquer dans un projet qui risquait de les amener devant les tribunaux », explique Alex Gibney.

La crainte de contentieux a aussi poussé certains pays, comme la Grande-Bretagne, à reculer de plusieurs mois la date de diffusion. Car la scientologie est rompue aux intimidations judiciaires : c’est après plusieurs dizaines de procès au fisc américain, qu’elle l’a acculé à lui accorder le statut de religion, en 1993, lui permettant dès lors d’être exemptée d’impôts.

Nicole Kidman sur écoute ?

En France, Canal+ diffuse, le 11 novembre, le documentaire incendiaire, qui a raflé trois Emmy Awards en septembre. Résumé pédagogique de l’histoire de l’Eglise, née il y a soixante ans, et de son fondateur, L. Ron Hubbard (mort en 1986), Going Clear décortique la façon dont les célébrités (parmi lesquelles les stars John Travolta et Tom Cruise, qui, selon le documentaire, aurait réclamé de mettre son ex-femme, Nicole Kidman, sur écoute) sont « utilisées ».

Le documentaire met au jour le fonctionnement interne de l’institution : les méthodes, les étapes, les enjeux, les différentes branches, le dogme ultime que seuls les plus « avancés » sont censés connaître (l’histoire d’un dictateur intergalactique nommé Xenu, qui aurait transporté des milliards d’extraterrestres sur Terre avant de les jeter dans des volcans et de les faire exploser), mais aussi les brimades, les abus de pouvoir, les pressions, les escroqueries… Sans oublier le premier rôle du redoutable David Miscavige, actuel président, successeur du fondateur, qui organise des réunions annuelles grandioses dignes d’une république bananière. Le tout, grâce à des témoignages d’anciens, « des repentis » de l’Eglise, qui en racontent les coulisses.

Alex Gibney, réalisateur du documentaire

Récompensé par un Oscar en 2008 pour son film Un taxi pour l’enfer, Alex Gibney, 62 ans, est une figure du film documentaire outre-Atlantique et un habitué des sujets sensibles : Lance Armstrong, le scandale Enron, l’organisation WikiLeaks, Steve Jobs, la torture exercée par les services américains, la pédophilie au sein de l’Eglise catholique… Il s’attendait à subir les foudres de l’Eglise de scientologie, mais il a été surpris par certains angles d’attaque, très personnels et très saugrenus. « Ils ont par exemple écrit sur un site que mon père, un enseignant, travaillait en réalité pour la CIA ! Mais quel est le rapport ! ? », s’amuse-t-il.

Dix jours avant la première du film, l’Eglise de scientologie a acheté des pleines pages dans les quotidiens The New York Times et Los Angeles Times, comparant Going Clear au récit discrédité du prétendu viol collectif sur un campus universitaire récemment publié dans le magazine Rolling Stone.

Une riposte ridicule

« Cela figure dans le dogme de l’Eglise ! souligne le réalisateur. Sous le chapitre intitulé “Fair Game”, il est indiqué que les membres sont autorisés à user de tous les moyens pour contre-attaquer. Il faudrait être fou pour ne pas s’en méfier. » Si les pressions exercées sur les témoins du documentaire n’ont rien de drôle (filatures, menaces physiques, pression morale, manifestations sur le pas de leur porte…), la stratégie de défense de l’Eglise de scientologie, notamment sur Internet, a fait sourire les médias américains qui la qualifient tour à tour d’« hilarante », de « ridicule », « grotesque », « dépassée » : un compte Twitter suivi par à peine plus de 700 personnes, des sites Web accusant les uns de battre leur femme, les autres d’être des ivrognes ou encore des feignants…

Certains y voient surtout la stratégie du désespoir d’une institution en pleine crise de recrutement. Si la scientologie revendique 12 millions d’adeptes dans le monde (dont 45 000
en France), selon Alex Gibney, elle ne compterait pas plus de 50 000 membres actifs.

La bande annonce du documentaire

Lire aussi (édition abonnés) : Une entreprise commerciale qui promet l’état « clair »

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