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Politique

Immigration : une forte dérive européenne vers les extrêmes

La France fonce dans le mur de l'extrême droite. L'Europe glisse vers la radicalité. Face à des nations qui dressent des murs autour d’elles et entre elles, il est urgent de trouver rapidement des réponses durables et rassurantes.
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Matteo Salvini
Matteo Salvini (C), federal secretary of the Italian political party, Lega Nord, wears a tee-shirt reading "Stop Invasion" during a demonstration with far-right activists against immigration on October 18, 2014 in Milan. AFP PHOTO / MARCO BERTORELLO
Marco Bertorello/AFP

Sondage après sondage, le scénario se précise: le Front national pourrait bien finir en tête de la course des régionales, confirmer son statut de premier parti de France et s'emparer d'une ou deux puissantes régions, le Nord-Pas-de-Calais-Picardie, fief historique de la gauche, et Provence-Alpes-Côte-d’Azur, contrôlée depuis 1998 par le Parti socialiste. Rien ne laisse à penser que ce vote sera le fruit du hasard. Les électeurs du FN agissent en parfaite connaissance de cause et les déçus du socialisme ou de la droite classique savent les conséquences de leur abstention ou de leur indifférence. Bref, le pays fonce dans le mur de l'extrême droite en toute lucidité.

Naturellement, si ce scénario se confirme, la France suscitera bien des commentaires au-delà de ses frontières. On en imagine aisément le ton. La morsure fera mal. En vérité, un tel résultat ne serait que la confirmation d'une forte dérive européenne vers les extrêmes. Avec deux mouvements contradictoires selon que la droite ou la gauche est au pouvoir.

Premier mouvement. On a vu la Grèce, gouvernée à droite jusqu'en janvier 2015, se jeter dans les bras d'une gauche radicale. Même si Alexis Tsipras a dû renoncer à ses promesses, un fait demeure: pour protester, les électeurs grecs ont zappé le parti socialiste. On assiste à présent au même phénomène en Espagne. Face au pouvoir conservateur de Mariano Rajoy, Podemos prend le dessus sur le parti socialiste espagnol. En Grande-Bretagne, enfin, les travaillistes, châtiés par les tories de David Cameron aux législatives du mois de mai dernier, ont réagi en donnant un fort coup de barre à gauche et tournant le dos au Blairisme. Ces trois exemples permettent de tirer une première leçon européenne: quand la droite gouverne, la gauche radicale devient la force principale d'opposition, voire la force d'alternance. Une tendance qui marginalise les partis socialistes historiques.

Une déferlante conservatrice

Deuxième mouvement: une vague conservatrice est en train de déferler sur l'Union européenne. Le large succès électoral le 8 mai dernier de David Cameron, après cinq années au pouvoir, en est une première illustration. Mais il y a plus spectaculaire. La Pologne, le 25 octobre dernier, a fait un triomphe à Droit et justice, une formation ultra conservatrice, catholique et hostile à la construction européenne. Un glissement donc vers la droite extrême, voire l'extrême droite, alors que le pays était gouverné depuis huit ans, non sans succès, par un parti libéral, le PO-PSL. À l'Est, du coup, se constitue, au sein de l'Union, un bloc de deux gouvernements de droite radicale avec la Pologne et la Hongrie de Viktor Orbàn, un libéral devenu au fil des ans un conservateur peu soucieux des règles européennes, notamment en matière de libertés publiques. Nul doute que le Front national se sente proche de ces deux pouvoirs.

Ces exemples montrent, surtout, que l'Europe glisse peu à peu vers la radicalité et que la marée conservatrice y est sans doute plus forte que la poussée d'extrême gauche. Les partis de droite traditionnels ne sont pas épargnés par cette évolution mais les formations socialistes en sont les premières victimes, désormais prises en étau entre cette dérive générale vers la droite et une percée de la gauche extrême.

Une tectonique des plaques politiques

Reste à comprendre les raisons de cette tectonique des plaques politiques européennes. Il y a bien sûr des explications propres à chaque nation. Mais, sans doute, ces phénomènes ont un point commun dévoilé par le dernier Eurobaromètre publié au mois de mai dernier. Cette étude a révélé une très forte poussée d'inquiétude sur l'immigration dans tous les pays de l'Union. 38% des personnes interrogées en font désormais leur principal sujet de préoccupation soit plus 14 points en six mois. Au cours de la même période, l'inquiétude sur le devenir économique chutait de 6 points à 27%, sur le chômage de 5 points à 24% et sur les finances publiques de 2 points à 23%. En dehors de l'immigration, sans surprise au fond, l'inquiétude sur le terrorisme progressait elle aussi de 6 points et affectait 17% des personnes interrogées. Dans les pays de l'Europe de l'Ouest, cette angoisse nouvelle face à l'immigration affecte en priorité les classes populaires. À l'Est, elle déstabilise toutes les catégories sociales.

C'est sans doute dans ces données qu'il faut chercher les causes profondes du grand glissement conservateur européen et d'une radicalisation brutale des peuples. La France, sans doute, n'échappera pas en décembre à ce mouvement. La seule question qu'il faut à présent se poser est la suivante: jusqu'où ce phénomène peut-il nous entraîner? Les partis dits de gouvernement, de gauche ou de droite, réunis au sein du Conseil européen devraient battre leur coulpe, réfléchir vite et trouver rapidement des réponses à la fois durables et rassurantes car nul ne peut préjuger du comportement de nations qui, déjà, dressent des murs autour d’elles et entre elles…

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