Comment parvenir à réformer la France? Comment conjuguer climat et croissance? Comment être au rendez-vous de la révolution numérique? Le 2ème Sommet de l’économie est articulé sur ces trois tempos. Nous avons demandé à 10 grands patrons de répondre à ces questions, avant le coup d’envoi du Sommet, jeudi 5 novembre au matin. La réponse de Patrick Pouyanné, directeur général de Total.
Quelles sont, selon vous, les priorités pour l’après-2017?
Nous devrions tout faire pour l’emploi des jeunes, dont les difficultés à entrer sur le marché du travail déstabilisent la société. Je propose donc un plan d’urgence, avec deux mesures qu’il faudrait prendre à titre exceptionnel: alors que l’on avait favorisé depuis 2007 les carrières longues en laissant les salariés libres de partir ou non à la retraite jusqu’à 70 ans, la première mesure autoriserait les entreprises à mettre à la retraite les salariés qui disposent de leurs pleins droits, à la condition d’engager des jeunes à cette occasion ; la seconde mesure autoriserait à titre exceptionnel les CDD de trois ans, toujours pour favoriser l’emploi des jeunes.
Comment Total lutte-t-il contre le réchauffement climatique?
Total veut accompagner la transition du pétrole vers le gaz. Car dans une perspective historique où nous sommes passés depuis 300 ans du bois au charbon, puis au pétrole, c’est désormais vers le gaz qu’il faut s’orienter. C’est pourquoi, chez Total, nous concentrons nos investissements sur le gaz. Mais misons aussi sur les énergies renouvelables, auxquelles nous allons consacrer 500 millions de dollars par an.
Mais pour privilégier le gaz, énergie peu polluante, le concert des nations donnera un prix significatif au carbone. Car si on ne met pas un prix à la pollution, les acteurs économiques vont continuer à privilégier le charbon dans le mix énergétique, compte tenu des bas prix actuels et des énormes réserves dont on dispose dans le monde. Je suis frappé de voir par exemple que le Japon veut remplacer dans son mix énergétique les centrales nucléaires par des centrales au charbon. Même s’ils promettent de le faire avec des centrales supercritiques, elles polluent encore de 60 à 80% de plus que des centrales au gaz.
Pour embarquer l’industrie pétrolière vers cette évolution, nous avons réuni à Paris, le 16 octobre, huit grands patrons du secteur, qui représentent 20 % de la production mondiale de pétrole, dont Saudi Aramco, et nous travaillons ensemble sur ces questions.
Qu’est-ce que la révolution digitale change pour Total?
Il est toujours difficile de se remettre en cause dans un groupe qui a du succès. C’est pour cela que l’impératif digital est un bon thème: c’est à la fois un moyen de faire vivre notre esprit d’innovation, et de le faire sur un sujet qui passionne les nouvelles générations. Nous travaillons donc dans quatre directions: la dématérialisation de nos ventes, comme avec Fuelmarket.com ; une meilleure efficacité industrielle, quand elle peut nous être apportée par de nouveaux instruments, comme les Google Glass ; une réflexion sur nos modes de management, avec une hiérarchie qui a longtemps cru qu’avec l’information elle détenait le pouvoir, ce qui n’est plus vrai ; et puis tout ce que l’on peut faire pour mettre à profit nos bases de données clients, car il faudra bien que l’on se prépare à inciter les Google Car à s’arrêter dans nos stations !
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